Censure socialiste ce mardi
François Bayrou a-t-il trahi les Français? (ou le contraire)

Le Premier ministre français affronte ce mardi 1er juillet une motion de censure déposée par le Parti socialiste à l'Assemblée nationale. Son gouvernement ne devrait pas être renversé. Mais mérite-t-il vraiment les reproches qui lui sont adressés?
Publié: 12:58 heures
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Dernière mise à jour: 15:25 heures
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Le Premier ministre français affronte ce mardi 1er juillet une motion de censure présentée par le PS.
Photo: IMAGO/ZUMA Press Wire
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Richard WerlyJournaliste Blick

«Il a trahi les Français!» L’accusation est signée Boris Vallaud, le patron des 62 députés socialistes français. Elle porte sur François Bayrou, le Premier ministre centriste qui affronte ce mardi 1er juillet à l’Assemblée nationale une motion de censure déposée, justement, par le PS. Si celle-ci est votée par une majorité absolue de députés (soit 289), son gouvernement devra automatiquement démissionner. La fin de Bayrou aura sonné avec une quasi-certitude. Et ce, un an pile après le premier tour des législatives anticipées du 30 juin 2024.

Il a trahi, vraiment? La vérité est que le chef du gouvernement, nommé par Emmanuel Macron le 13 décembre, est un bouc émissaire idéal pour presque toutes les formations politiques françaises. Lesquelles ont en tête trois prochaines échéances: une possible nouvelle dissolution de l’Assemblée par le président (de nouveau possible à partir du 7 juillet), les élections municipales de mars 2026, et la présidentielle de mai 2027.

Promesses non tenues

Avoir trahi voudrait dire que François Bayrou n’a pas tenu ses promesses. Or, il n’en avait pas fait! Le dirigeant chrétien-démocrate, qui hante les coulisses de la vie politique française depuis 50 ans, a surtout exigé de Macron qu’il le nomme à l’hôtel Matignon parce que c’était sa dernière chance! Bayrou avait soutenu l’actuel président pour lui permettre d’être élu en 2017. Bayrou l’a ensuite accompagné tout au long de ses deux mandats, en lui apportant le soutien des députés de son mouvement démocrate (Modem). Bayrou a peu critiqué. Il voulait être un recours, après avoir été relaxé en février 2024 des poursuites pour détournements de fonds publics du Parlement européen, dans une affaire assez similaire à celle qui a valu à Marine le Pen d’être lourdement condamnée le 31 mars.

Son bilan? Rien. A l’exception de trois sujets qui, peut-être, permettront à la France d’aller de l’avant demain, ou après-demain.

1

Le sujet de la coalition gouvernementale

François Bayrou dirige un gouvernement sans majorité à l’Assemblée nationale, qui va de la droite au centre gauche. Il est bloqué par les deux oppositions radicales du Rassemblement national (droite nationale-populiste) et de La France Insoumise (gauche radicale). Sa main tendue au Parti socialiste a permis un temps la paix, mais le PS n’a pas bougé et veut maintenant le censurer. Sauf qu’en cas de nouvelle dissolution de l’Assemblée, les Français revoteront sans doute de manière similaire. Bayrou a ouvert la voie à un système de coalition inconnu en France sous la Ve République. Pour le moment, on n’y est pas. Mais demain?

2

Le sujet des retraites

François Bayrou a joué la montre et la négociation. Il a organisé un «conclave» des partenaires sociaux destiné à renégocier la réforme des retraites de 2023. Lequel s’est séparé la semaine dernière sans un accord. Sauf qu’entretemps, l’idée du report à 64 ans de l’âge de départ à la retraite s’est enracinée. Trahison? Sur le plan politique, les socialistes voulaient davantage. Mais pour la France de moins en moins compétitive, c’est une bonne nouvelle. Cette méthode de concertation sociale pourra être réutilisée.

3

Le sujet des comptes publics

Rendez-vous est pris autour du 14 juillet. François Bayrou donnera les grandes lignes du futur budget 2026. Obligation dictée par le surendettement du pays et son déficit public chronique? Trouver 40 milliards d’euros d’économies. La gauche enrage. La droite refuse d’augmenter les impôts. Bayrou apparaît coincé. Sauf que là aussi, le temps passé à scanner les dépenses publiques n’a pas été perdu. Le premier ministre sera utile s’il donne à son pays une indispensable leçon de rigueur budgétaire.


Bayrou, traître? Non. Le chef du gouvernement a déçu. Il fait de la «petite» politique pour obtenir des votes favorables à l’Assemblée. Il ne tranche pas. Il ne réforme pas. Mais depuis son arrivée au pouvoir, le pays est calme sur le plan social. Bayrou discute avec tout le monde, y compris la droite nationale-populiste qui peut à tout moment l’exécuter si elle vote une motion de censure de la gauche. Et si François Bayrou, maire de Pau (Pyrénées Atlantique) était une sorte de médecin généraliste dont la mission est d’amener le patient jusqu’à l’hôpital? Il le rassure. Il le prépare. Il anticipe. Car il en est convaincu: le pays a bel et bien besoin d’une opération chirurgicale.

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