Un nouveau pays sur la liste
En Europe, une percée nationaliste à la tête des parlements

Depuis le début de la guerre en Ukraine, des partis nationalistes et prorusses ont pris la tête de quatre parlements nationaux en Europe. La République tchèque s’ajoute à la liste de ces pays où la poussée populiste inquiète.
Publié: 10:42 heures
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Tomio Okamura a été élu par le Parlment tchèque.
Photo: AFP
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ATS Agence télégraphique suisse

Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, des partis nationalistes et prorusses ont décroché quatre présidences de parlements dans des pays européens, la République tchèque étant l'exemple le plus récent, ce qui représente un défi pour l'UE.

Mercredi, le Parlement tchèque a élu le chef du parti d'extrême droite SPD Tomio Okamura à sa tête. Dès le lendemain, celui qui prône l'arrêt de l'aide bilatérale à l'Ukraine, a fait retirer le drapeau ukrainien du bâtiment de l'assemblée, hissé en signe de solidarité.

Pas de majorité absolue

Italie fin 2022, Autriche en 2024, Slovaquie plus tôt cette année et donc République tchèque cette semaine: ces pays ont rejoint les rangs de la Hongrie, avec sa chambre acquise au nationaliste Viktor Orban depuis 2010.

A chaque fois, les nationalistes ont décroché cette présidence suite à un accord avec d'autres formations politiques, car ils ne jouissent pas – sauf à Budapest – de la majorité absolue. Et ils ne sont pas de la même couleur politique que le chef du gouvernement.

Des mouvements portés par Trump

Première explication à cette tendance selon Catherine Fieschi, chercheuse associée au centre Robert-Schuman de l'Institut universitaire de Florence: le dirigeant hongrois «a bien ouvert la voie». «Il a démontré qu'il est possible de rester dans l'Union européenne» sans respecter les traités. Mais pour la spécialiste, ce n'est pas un hasard si cette accélération a lieu dans des pays d'Europe centrale, la réélection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis ayant créé une «dynamique» dans ces pays.

«Son personnages n'agit pas comme un repoussoir» dans cette partie de l'Europe, où il y a aussi une question de «culture politique» différente et une relation «ambiguë» avec la Russie. La position géographique plus proche de Moscou et un passé communiste partagé les conduit à vouloir éviter «l'escalade» avec le Kremlin plus qu'ailleurs, estime-t-elle.

Enfin, tous ces pays bénéficient largement des fonds européens et une partie de leur opinion publique, comme de leur classe politique, craint de devoir partager l'argent lors d'un nouvel élargissement de l'UE, estime-t-elle encore. Ils vont «y perdre quelque chose», selon eux, alors que la perspective d'une adhésion de l'Albanie ou du Monténégro s'approche, mais surtout en cas d'intégration de ce vaste pays qu'est l'Ukraine.

«Gagner en respectabilité»

Pour les formations nationalistes, qui ont profité de ces inquiétudes, obtenir la présidence du Parlement est, selon les experts, une avancée indéniable. En Slovaquie, le parti HLAS a décroché le perchoir en mars grâce à l'appui qu'il offre depuis 2023 au dirigeant Robert Fico et à l'extrême droite du parti SNS.

Il n'a pas cherché à rassurer ses alliés européens et a été exclu du groupe parlementaire européen S&D, qui estime que ses positions concernant «la guerre menée par la Russie, les migrations, l'État de droit et la communauté LGBT+ n'ont pas leur place au sein de la famille des progressistes».

En Autriche, le président du Parlement issu du parti d'extrême droite FPÖ Walter Rosenkranz, qui a obtenu le perchoir grâce aux apports de voix des autres partis, n'essaie pas de rassembler au-delà de son camp, comme le font d'ordinaire les personnalités qui occupent cette fonction, protocolaire et représentative.

Conquête de pouvoir

Il profite de son statut pour commémorer par exemple la semaine prochaine un homme politique nazi, malgré les protestations de la communauté juive, des autres formations qui l'avaient soutenu et d'intellectuels.

«Pour ces partis longtemps hors système, prendre le contrôle de présidences permet de contrebalancer les exécutifs, les partis de gouvernement ayant souvent été à la recherche de coalition en raison de leur affaiblissement», affirme Cyrille Bret, chercheur associé à l'Institut Jacques-Delors. Ce genre de poste convient «tout particulièrement aux partis contestataires en phase de conquête du pouvoir», estime-t-il.

«Ils peuvent utiliser les compétences de contrôle pour critiquer le gouvernement sans assumer eux-mêmes les responsabilités, sans oublier les gains budgétaires» ou les pouvoirs de nomination. Cela leur permet «aussi de se 'notabiliser' et de donner une impression de respectabilité».

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