Quelle naïveté de la part de Donald Trump: croire que Vladimir Poutine souhaite réellement mettre fin à la guerre contre l'Ukraine. Après son entretien téléphonique avec le président russe lundi, le président américain a parlé de «bonnes chances» d'y parvenir. Mais le Kremlin n'a sans doute pas l'attention de faire taire les armes et continue de miser, avec succès, sur des stratégies dilatoires pour atteindre ses objectifs.
Lors de sa campagne électorale, Donald Trump avait annoncé fièrement être capable de mettre fin à la guerre en Ukraine en une seule journée. On attend encore l'exploit, car si cela n'était sans doute qu'une image, quatre mois après son entrée en fonction, aucun cessez-le-feu, ni même un simple accord, n'est en vue.
Pire: de toute évidence, la Maison Blanche ne sait plus quelle stratégie choisir. Un jour, Trump est l'ami de Poutine, le lendemain celui de Zelensky. Il n'y a pas non plus de ligne claire sur le soutien à l'Ukraine. Après un blocage, le président américain a annoncé au mois de mars la reprise de l'aide militaire.
Au pied du mur
Pour Vladimir Poutine, agent de renseignement de formation, Donald Trump est un adversaire facile. «Pour le faire mariner, le président russe l'appâte petit à petit avec des deals économiques, explique Ulrich Schmid, expert de la Russie à l'université de Saint-Gall. Un scénario idéal pour Poutine serait que les Etats-Unis abandonnent définitivement leurs efforts de médiation.»
La stratégie du Kremlin consisterait à n'accepter qu'en apparence les propositions de paix. Le refus de rencontrer Trump et Zelensky à Istanbul montre que Poutine ne veut pas du tout la paix, car un gel du conflit serait en contradiction avec les objectifs minimaux de Poutine, à savoir conserver les territoires conquis, mettre fin aux sanctions et empêcher l'Ukraine d'adhérer à l'OTAN. Selon Ulrich Schmid, Poutine aimerait rétablir cette Russie qu'il qualifie d'«historique» et qui, de son point de vue, se compose de la Russie, de la Biélorussie et de l'Ukraine.
L'Europe dans tous ses états
Depuis l'investiture de Trump, le soutien occidental à l'Ukraine s'est déjà considérablement affaibli. Poutine profite de ce temps gagné pour réformer et renforcer son armée, ses services secrets et sa police. «Comme l'attention de l'OTAN et des pays de l'UE est focalisée sur la guerre en Ukraine, Poutine peut largement étendre ses activités hybrides sans être dérangé», déclare Ralph D. Thiele, président de la société politico-militaire allemande et président d'Eurodefense Allemagne.
Pour atteindre ces objectifs, Trump arrive à point nommé. En raison de sa politique imprévisible, les charges économiques et militaires des pays européens ne savent plus où donner de la tête. Trump a peut-être la volonté de parvenir à une paix rapide en Ukraine, mais force est de constater que sa stratégie contre le rusé Poutine n'a pas encore porté ses fruits.