Des démons partout en Italie
Les prêtres n'arrivent plus à suivre avec les exorcismes

En Italie, la demande en exorcisme a explosé depuis le début de la pandémie. Il semblerait toutefois que les démons n'ont pas franchi les Alpes.
Publié: 11.12.2021 à 11:31 heures
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Dernière mise à jour: 12.12.2021 à 06:37 heures
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Depuis le début de la pandémie, le commerce de l'exorcisme est en plein essor en Italie.
Photo: Blick
Chiara Schienz

L'incident serait survenu dimanche 5 décembre, dans le sanctuaire de la Madone de Monte Berico à Vicence: une femme de 28 ans s'en prend à un prêtre dans le confessionnal. Des témoins oculaires parlent d'une «scène de film d'horreur». Les soupçons se portent rapidement sur un démon qui aurait possédé la jeune femme.

Le prêtre fait appel à un exorciste, qui tente pendant huit heures d'expulser le démon. Pour cet abbé, il s'agit d'un démon tenace: «Normalement, le Mal s'enfuit après quelques Ave Maria, mais dans certains cas, le démon mord la personne et ne veut plus la quitter.»

L'Italie enregistre un demi-million d'exorcismes par an

Les exorcismes ne sont pas une rareté en Italie: l'association internationale des exorcistes estime que les services des «libérateurs» y sont sollicités environ un demi-million de fois par an. Depuis des années, la tendance est à la hausse. Et depuis le début de la pandémie, la demande a explosé.

Au point que les exorcistes en Italie sont complètement débordés, comme l'écrit «l'Aargauer Zeitung». L'université pontificale Regina Apostolorum de Rome propose depuis quelques années des cours pour les futurs exorcistes. En octobre dernier, 137 personnes s'y étaient inscrites. Un nouveau record.

Dino Battiston, exorciste italien de longue date, explique au journal: «Les gens se sentent seuls, se perdent, et ensuite s'accrochent aux choses matérielles, à l'argent, puis deviennent obsédés par l'envie et la haine: c'est le premier signe du Mal.»

Le pape François avance des arguments similaires. Selon lui, le diable «pénètre dans nos cœurs par le biais du porte-monnaie». Le diable, ou «séducteur» comme le nomme le pape, nous dirait: «Pensez à ceci, faites cela. Le danger est de discuter avec lui, comme Eve l'a fait. Mais si nous entamons un dialogue avec le diable, nous sommes perdus. On ne discute pas avec le diable.»

Les symptômes de la possession évoluent

Nous avons parlé au pasteur Rudolf Nussbaumer, du canton de Schwyz. Lui aussi parle d'une légère augmentation des exorcismes en Suisse. Il la relativise toutefois: «Oui, il y a une légère augmentation, mais qui s'observe déjà depuis plusieurs années.» Lui-même ne fait que des prières personnelles de délivrance et assister aux exorcismes. Souvent, il oriente les personnes «possédées» vers des psychiatres croyants, car «de nombreux problèmes semblent se mélanger». Une éventuelle «obsession et un psychisme affaibli» seraient similaires et déclenchés par un manque de confiance en la vie, la solitude, et l'isolement, qui «prend des proportions dangereuses en cette période de pandémie».

Hansruedi Huber, du diocèse de Bâle, fait toutefois d'autres observations: «La demande de nos services de délivrance dans le diocèse de Bâle a diminué ces deux dernières années», explique-t-il. Il remarque toutefois des changements dans les symptômes déclarés: «Il y a davantage de personnes qui s'annoncent et qui se sentent possédées par des cauchemars».

La foi ne peut pas être «achetée»

Hansruedi Huber critique l'attitude de certains croyants vis-à-vis de l'exorcisme, ou du «service de libération», comme on appelle la pratique aujourd'hui. «Certains pensent qu'il existe une formule magique et qu'ensuite ils seront débarrassés du problème. Mais la foi n'est pas un produit de consommation que l'on peut acheter à la Migros ou télécharger», précise-t-il. Il est important que les personnes concernées fassent également un travail sur elles-mêmes.

Selon l'Eglise catholique, les symptômes typiques d'une «possession» sont des crises d'épilepsie, un changement de caractère, de la rage, une augmentation de la force inhabituelle, une agressivité contre le religieux et une clairvoyance psychique. Les médecins y voient les symptômes d'une maladie physique ou d'un trouble psychique qui devraient être traités par des professionnels.

(Adaptation par Jocelyn Daloz)

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