Les experts se ravisent
Le franc devrait continuer de se renforcer face au dollar et à l'euro

Une nouvelle appréciation du franc par rapport au dollar et à l'euro devrait se produire d'ici à la fin de l'année pour plusieurs raisons, selon trois experts interrogés par Blick.
Publié: 11.09.2025 à 06:17 heures
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Dernière mise à jour: 11.09.2025 à 09:30 heures
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Actuellement, un euro coûte 93 centimes de francs suisses.
Photo: imago/Eibner
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Thomas Marti
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Alors que les vacances d'été touchaient à leur fin, le franc suisse s'est apprécié par rapport aux devises de référence. Ce mouvement de cours a été causé par les incertitudes en matière de politique économique aux Etats-Unis, en France et en Grande-Bretagne. A cette incertitude se sont ajoutées les prévisions des économistes, estimant que la Banque nationale suisse (BNS) n'appliquera pas de taux d'intérêt négatifs et que la banque centrale américaine (Fed) baissera ses taux directeurs au cours des douze prochains mois.

Cette appréciation du franc après les vacances d'été est très remarquable, car l'accalmie estivale sur les marchés des devises entraîne rarement des mouvements de cours aussi prononcés. Sur un mois, la hausse du franc s'élève à 2,5% par rapport au dollar américain, à 2,8% par rapport au dollar canadien et à 1,3% par rapport à l'euro. Sur un an, notre monnaie a enregistré une hausse de 14,6% par rapport au dollar américain, tandis que le dollar canadien a reculé de 9,9% et que le yen japonais, le dollar néo-zélandais et le dollar australien ont subi des pertes de change de 7,2 à 7,7%.

Ce renforcement du franc est en grande partie dû au changement de prévisions des experts en devises et des économistes. Par exemple, il y a deux mois, Laurie Anderson, économiste chez Nomura Securities, prévoyait une nouvelle baisse du taux directeur de la BNS en territoire négatif lors de la prochaine réunion de politique monétaire du 25 septembre. Mais puisque le renchérissement du franc a été plus élevé que prévu en août – à 0,2% – l'experte n'attend plus de nouvelle baisse du taux directeur.

«Aucune nouvelle baisse des taux nécessaire»

Karsten Junius, chef économiste de la Banque J. Safra Sarasin, prévoit lui aussi que le taux directeur restera fixe à 0%. «Après des chiffres d'inflation légèrement plus élevés en juillet et août, nous ne voyons aucune raison de revoir à la baisse la prévision d'inflation à moyen terme de la BNS. Selon nous, l'orientation actuelle de la politique monétaire est suffisamment expansive pour qu'aucune nouvelle baisse des taux ne soit nécessaire», explique-t-il.

Si la Fed baisse le taux directeur américain comme prévu – d'une fourchette de 4,25-4,50% à 4,00-4,25% – l'écart de taux se réduit. En conséquence, les placements et les investissements américains deviendront moins attractifs. Si la Fed continue à baisser son taux directeur à 3,25-3,50% au cours des douze prochains mois suivant les anticipations du marché, cet abaissement réduirait encore l'attractivité des obligations américaines et déclencherait une baisse de la demande de dollars.

La Banque nationale plus tolérante

Martin Schlegel, président de la direction générale de la BNS, s'est montré plus nuancé vis-à-vis de l'appréciation du franc suisse lors d'une interview lundi. En parallèle, le cours de l'euro par rapport au franc est de 0,93 et celui du dollar de moins de 0,80. En d'autres termes, le franc suisse nominal est très fort et l'inflation globale n'est que de 0,2% en comparaison annuelle, estime Chris Turner, Global Head of Markets chez ING Bank.

Lors de son interview, deux réflexions du président de la BNS ont surpris Chris Turner. Martin Schlegel a d'abord expliqué les difficultés à réintroduire les taux d'intérêt négatifs. Mais ensuite, le président de la BNS a ajouté que, compte tenu de la hausse plus rapide des prix, et donc des coûts pour les entreprises à l'étranger, l'appréciation réelle du franc suisse n'était pas aussi importante qu'elle en avait l'air.

Selon Chris Turner, la BNS devrait être un peu plus confiante face à l'appréciation du franc suisse. Une baisse des taux d'intérêt en zone négative est donc peu probable, surtout dans le contexte actuel où la politique et la dette pèsent lourd sur les marchés des devises. Cette situation favorise de longues positions stratégiques sur le franc suisse, poursuit Chris Turner. Selon lui, ces positions rendent plus probables un nouveau test de l'euro par rapport au franc sur les plus bas de cette année à 0,9220 franc.

La faiblesse du dollar devrait perdurer

L'amélioration de la situation pour les liquidités a éliminé certains risques pour la devise américaine qui auraient pu se produire en l'absence totale d'afflux, écrit George Saravelos, responsable de la recherche FX à la Deutsche Bank dans une note aux clients ce lundi. «L'incertitude concernant la stabilité de la demande d'actifs américains reste toutefois élevée», poursuit l'expert.

En parallèle, le soutien cyclique du dollar s'est détérioré, se traduisant par une nette réduction de l'écart de taux entre l'euro et le dollar, a-t-il ajouté. A présent, cet écart reflète à court terme une juste valeur de l'euro par rapport au dollar dans une fourchette de 1,18 à 1,20. De nouvelles baisses des taux d'intérêt de la Fed inciteraient les investisseurs étrangers à se protéger contre les placements en dollars. Etant donné que le dollar a depuis réduit sa prime de risque/d'intérêt bon marché excessive liée à la politique du président Trump, les perspectives globales pour le dollar restent asymétriquement mauvaises, selon George Saravelos.

Le dollar devrait se déprécier par rapport au franc à 0,73 franc d'ici fin 2026, estime Karsten Junius. Actuellement, les avis s'accordent sur une valeur future de 0,79 centime à la fin du quatrième trimestre 2026. La banque J. Safra Sarasin prévoit qu'un euro vaudra alors 0,91 franc.

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