Il aurait pu écoper de six ans de prison. Mais l’un des tortionnaires d’animaux les plus connus de Suisse, le Thurgovien d’Hefenhofen Ulrich K.*, s’en sort finalement à bon compte. L’homme de 54 ans a été condamné mardi à huit mois de prison avec sursis. Dans les faits: il ne se retrouvera pas derrière les barreaux et pourra continuer l'élevage animal.
Dans son jugement rendu mardi, le Tribunal de district d’Arbon (TG) n’a pas suivi le Ministère public qui réclamait la prison, ainsi qu’une interdiction d’exercer contre l’éleveur. La défense avait, elle, demandé l’acquittement du principal accusé, dénonçant plusieurs vices de forme au cours de la procédure. La fermeture de l’exploitation remonte à août 2017.
Une gifle pour le Ministère public
Ulrich K. obtient même 6000 francs de réparation pour tort moral, car la médiatisation des faits a porté atteinte à son droit de la personnalité. «Je vais être malade, je m’en vais!», s’est indignée une militante de la protection animale en quittant la salle au moment du verdict.
L’éleveur a été relaxé sur de nombreux chefs d’accusation, notamment en ce qui concerne l’évacuation de la ferme. Le juge justifie ainsi la décision du panel de cinq personnes: «Nous ne portons pas un jugement définitif sur l’action de l’office vétérinaire ou de la task force. Il ne s’agit pas d’un examen complet de ce qui s’est passé entre Ulrich K. et le canton.»
Et d’ajouter: «Ce qui était inattendu pour beaucoup, impensable pour certains, s’est produit. Tout le monde a droit à un procès équitable. Si le doute s’installe dans l’esprit du tribunal, il doit y avoir un droit à l’acquittement.» La majeure partie de l’accusation s’effondre donc. C’est une gifle cinglante pour le Ministère public.
L’ex-compagne du paysan écope, elle, d’une peine pécuniaire avec sursis pour infraction à la saisie d’animaux. Après la fermeture de l’exploitation, elle a devancé la police sur un alpage — aussi exploité par l’éleveur — pour s’y emparer de deux chevaux et les placer chez un paysan avant de les vendre.
En revanche, trois autres co-accusés ont été acquittés, dont deux bouchers. Ces derniers avaient vendu à Ulrich K. des porcelets handicapés pour les engraisser.
«Tout a déjà été dit»
En 2017, Blick avait révélé les dysfonctionnements et les maltraitances à la ferme d’Hefenhofen. Les images de chevaux décharnés et mourants avaient choqué les esprits. L’affaire a pris de l’ampleur. Le paysan Ulrich K. s’est, lui aussi, mis en branle – littéralement: il avait foncé avec sa voiture sur le trottoir, manquant de renverser un groupe de personnes présentes, comme l’indique l’acte d’accusation. Il était notamment remonté contre plusieurs manifestants et défenseurs des animaux postés à l’époque devant sa ferme.
Quelques jours plus tard, en août 2017, les autorités étaient intervenues pour évacuer la ferme. La police a arrêté l’éleveur de veaux. Il aura fallu attendre plus de cinq ans pour que le procès ait lieu. Pendant ce dernier, Ulrich K. s’est montré peu loquace. «Quand j’entends les explications du procureur, mes cheveux se dressent sur la tête!», a-t-il contesté. Avant de répéter à plusieurs reprises que «tout a déjà été dit».
Le jugement de première instance du tribunal de district peut être porté devant la Cour suprême du canton de Thurgovie.
*Nom connu de la rédaction
(Avec ATS)