La Confédération doit faire des économies. Après les pertes de plusieurs milliards de francs de ces dernières années, de nouveaux déficits menacent. Il n'est donc pas étonnant que la ministre des Finances libérale-radicale Karin Keller-Sutter cherche à préserver chaque centime – ou plutôt chaque milliard.
Un apport de l'impôt sur le tabac devrait permettre d'améliorer les chiffres. Une augmentation de la taxe sur les cigares, cigarillos, tabac à coupe fine et autres tabacs à fumer devrait rapporter 35 millions de francs supplémentaires par an à partir de 2025.
Mesure critiquée en interne
On ne sait pas encore à combien s'élèvera l'augmentation de l'impôt pour chaque produit. Pour les cigares par exemple, une augmentation de 9,80 francs aujourd'hui à 14,40 francs par 1000 pièces serait possible. Si le gouvernement faisait pleinement usage de sa compétence en matière d'augmentation, la Confédération pourrait même encaisser quelque 68 millions de francs supplémentaires.
Mais le plan du Conseil fédéral fait l'objet de critiques internes. Les fonctionnaires des douanes, rattachés au département des finances de Karin Keller-Sutter, ont mis en garde contre des conséquences indésirables d'une augmentation de l'impôt sur le tabac et ont proposé d'y renoncer. C'est ce que montrent les documents de la consultation interne sur le budget fédéral, que Blick s'est procurés en vertu de la loi sur la transparence.
Tourisme d'achat et marché noir
La division compétente de l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF) a notamment mis en avant deux points: «L'augmentation aurait pour conséquence de stimuler le tourisme d'achat et de désavantager ainsi l'économie nationale, écrit l'office dans sa prise de position. Il faut également s'attendre à une augmentation du commerce illégal et de la contrebande.»
Une augmentation massive des impôts renforcerait encore les différences de prix déjà existantes avec les pays voisins, analyse l'OFDF. Et l'augmentation de l'écart de prix inciterait les personnes domiciliées en Suisse à acheter du tabac à l'étranger, où les prix sont plus avantageux, en l'important «dans le cadre de la franchise quantitative de 250 pièces du trafic touristique». À l'inverse, les étrangers n'achèteraient plus de produits du tabac en Suisse.
Le Conseil fédéral maintient le cap
Les fonctionnaires des douanes mettent ainsi en doute la possibilité de générer les recettes supplémentaires espérées. Ils craignent même que des emplois locaux soient perdus. «Cela pourrait entraîner des pertes au niveau des impôts de la Confédération, ainsi qu'au niveau des impôts sur le bénéfice et le capital des entreprises», conclut l'OFDF.
Enfin, l'office renvoie à un rapport sur l'impôt sur le tabac que le Conseil fédéral doit encore transmettre au Parlement. Ce rapport devrait traiter de la question de l'augmentation des impôts. La recommandation est d'attendre ce rapport avant d'agir.
Mais ces craintes sont restées sans réponse. Le Conseil fédéral maintient l'augmentation. D'ici septembre, la ministre des Finances Karin Keller-Sutter doit présenter au collège gouvernemental une modification de l'ordonnance correspondante, qui devrait entrer en vigueur début 2025.