Le bras de fer peut commencer
«Qu'elle veuille ou non quitter la Suisse, c'est à UBS d'en décider!»

Afin d'éviter un nouveau cas «Credit Suisse», la ministre des Finances Karin Keller-Sutter souhaite garder UBS en laisse. La banque de Sergio Ermotti devra notamment détenir plus de fonds propres pour ses filiales étrangères. Reste à savoir quelle sera sa réponse.
Publié: 06.06.2025 à 15:00 heures
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Dernière mise à jour: 06.06.2025 à 17:33 heures
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La ministre des Finances Karin Keller-Sutter entend maintenir un certain contrôle sur UBS.
Photo: keystone-sda.ch

UBS fait face à de nouvelles exigences comme le renforcement de ses fonds propres à l'étranger. Par cette mesure, le Conseil fédéral entend ainsi limiter les risques pour l’économie nationale. La crise de Credit Suisse a montré la nécessité d'améliorer le dispositif «too big to fail». A cet effet, le Conseil fédéral propose vendredi de réviser plusieurs lois et ordonnances dès l'automne prochain. 

La loi vise avant tout UBS, unique banque d'importance systémique en Suisse après la chute de Credit Suisse. En ligne de mire, une augmentation des fonds propres des grandes banques actives à l'étranger.

Garantir les fonds propres

Sans mesure, UBS n'est pas à l'abri. Son taux de couverture est déjà inférieur au taux réglementaire. En cas de crise, elle pourrait être incapable de réagir.

Afin d'éviter un tel scénario, le Conseil fédéral impose aux banques systémiques de couvrir l’intégralité des participations dans des filiales étrangères au moyen de fonds propres. Cette mesure garantit qu'une dépréciation des filiales étrangères n'ait pas d’influence sur les fonds propres de base durs de la banque mère en Suisse. Le Conseil fédéral renonce toutefois aux mesures qui visent un relèvement général des exigences en matière de fonds propres, les estimant moins adéquates.

Selon les estimations du Conseil fédéral, «entourées de grandes incertitudes», la banque mère UBS devra avoir jusqu'à 18 milliards de dollars de fonds propres en plus pour répondre aux exigences. Il lui faudra jusqu'à 26 milliards de fonds propres de base durs.

Le projet de loi sur les exigences en matière de fonds propres auxquelles une banque mère établie en Suisse sera tenue de répondre pour couvrir ses participations dans des filiales étrangères devrait être mis en consultation à l’automne 2025. Des délais transitoires assez longs sont prévus pour l’exécution des modifications proposées.

Le mot d'ordre? La responsabilité

Pour compléter la législation, le Conseil fédéral instaure un régime de responsabilité. Les banques devront indiquer dans un registre les personnes responsables de quelles décisions. Elles pourront ainsi clairement imputer la responsabilité d’un comportement fautif à la personne concernée et prononcer des sanctions ciblées: restitution du salaire variable, suppression ou réduction des bonus.

L'Autorité de surveillance des marchés financiers (Finma) pourra elle retirer l’attestation d’une activité irréprochable ou prononcer une interdiction d’exercer. Par ailleurs, les compétences de cette dernière seront étendues. Elle pourra ordonner des mesures plus rapidement et de manière plus efficace ou prononcer des amendes contre les établissements manquant à leurs obligations.

Les exigences relatives aux plans de stabilisation et de liquidation seront par ailleurs rehaussées. La Finma pourra ordonner les mesures qui permettent de corriger les lacunes du plan de stabilisation. Ces autres mesures seront mises en consultation au premier semestre 2026.

«J'espère qu'elle restera en Suisse»

Avant même l'annonce de ces réglementations, Sergio Ermotti avait déjà laissé entendre qu'UBS pourrait s'envoler vers d'autres territoires, plus souples en la matière. Durant la conférence de presse de ce vendredi 6 juin, Karin Keller-Sutter a été interrogée à ce sujet. S'agit-il d'une menace en l'air ou d'un réel danger pour l'économie suisse? «Qu'elle souhaite partir ou non, c’est à UBS, et à elle-seule, d'en décider. Il n'appartient pas au Conseil fédéral de se prononcer sur ce point.» Mais d'ajouter malgré tout: «J'espère qu'elle restera en Suisse.»

De son côté, le Parti socialiste (PS) salue le renforcement de la Finma et l’exigence d’une couverture en fonds propres de 100% également pour les filiales. Il estime toutefois que les propositions ne vont pas assez loin pour maîtriser les risques liés à la nouvelle mégabanque UBS. «Les mesures proposées dans l’ensemble présentent encore des lacunes importantes. Sans compter que rien n’est proposé pour limiter les risques dus à la taille d'UBS», écrit le co-président du PS Cédric Wermuth.

Le parti exige que les prescriptions en matière de fonds propres soient mises en œuvre le plus rapidement possible. Le Conseil fédéral aurait la possibilité de mettre rapidement en œuvre ces mesures par voie d’ordonnance. Au lieu de cela, il choisit une voie nettement plus longue qui laisse craindre que les propositions soient excessivement édulcorées par le centre-droit au Parlement, ajoute le conseiller national argovien.

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