La défense a plaidé mercredi le meurtre par dol éventuel, au second jour du procès en appel dans le drame sanglant du parking des Charmilles, à Genève. Insistant sur le jeune âge du prévenu au moment des faits, elle a dénoncé la mesure d'internement.
«Il n'est pas dangereux», a insisté Robert Assaël, son avocat avec Yaël Hayat. Selon lui, le prévenu «a fait un chemin extraordinaire» d'un point de vue intellectuel puis émotionnel en près de sept ans de détention. Et de rappeler qu'il était à peine âgé de 18 ans ce 19 janvier 2019 à l'aube quand il a poignardé à mort un Portugais de 22 ans et blessé autre jeune au bras. Tous rentraient de soirée.
Il y a un an, le Tribunal criminel l'avait jugé coupable d'assassinat et condamné à plus de 16 ans de prison, une peine assortie d'un traitement ambulatoire et de l'internement. Une «mesure ultime» qui ne se justifie pas pour ce jeune homme, qui «n'est pas né violent», mais qui a «basculé à l'adolescence», compensant l'absence du père par un groupe fort, ont expliqué ses défenseurs.
«En réaction»
Ce groupe avait violemment agressé deux trentenaires à St-Jean en janvier 2017, les laissant lourdement handicapés. «Il ne faut pas faire l'amalgame» entre les deux affaires, comme l'a fait le Tribunal criminel, a mis en garde Me Assaël.
Dans le cas des Charmilles, le prévenu n'avait aucune «intention de tuer» dans ce qui a commencé comme une altercation entre deux personnes, à laquelle il ne participait pas. «Il a sorti son couteau en réaction au coup de poing» donné par un des jeunes «qui voulait en découdre», a décrit l'avocat, mettant cette réaction sur le compte de la peur.
L'alcool et le groupe, deux facteurs détectés par un expert peu avant le drame des Charmilles ont aussi joué un rôle, a avancé Me Hayat. «Le groupe n'aura plus de rôle quand il sortira de prison dans plusieurs années et n'en a déjà plus, car il a sa famille», a-t-elle avancé. Et d'insister: le prévenu peut encore progresser grâce à la thérapie, alors que l'internement n'y donne pas droit.
Sincérité en doute
Une autre version des faits a été livrée dans l'après-midi. Avocat du jeune blessé d'un premier coup de couteau et qui a fait appel, Guglielmo Palumbo a plaidé la tentative d'assassinat. Selon lui, le prévenu, «d'une dangerosité extrême», «était prêt à tuer pour tuer». Le second coup, mortel cette fois, est ce qui a permis à son client - «cible» du prévenu - de s'échapper.
Le prévenu a ainsi tué un homme qui s'est interposé en lui demandant ce qu'il avait fait à son ami, a déploré Me Palumbo. Tout comme lui, Vincent Spira, avocat des parents et du frère du défunt, a insisté: il faut juger l'homme de 2019. «Il avait affirmé avoir changé après St-Jean, mais il est sorti, a bu de l'alcool et portait une arme, alors que tout ceci lui était interdit», s'est-il indigné.
Et Me Spira d'évoquer les doutes de ses clients quant à la sincérité du criminel. Pour lui, sa pseudo-absence de mémoire est «une stratégie de défense». «Ne pas se souvenir lui sert à minimiser ses actes. Il n'y est pour rien, et c'est la faute des autres», a-t-il dénoncé, estimant que le «dossier fourmille d'exemples qu'il ment quand il affirme ne pas se souvenir.»
Le procès se poursuit vendredi matin avec le réquisitoire du procureur et les répliques des parties. Le verdict sera rendu ultérieurement.