Les débats autour de l'armée suisse passent à la vitesse supérieure. Des citoyens et des associations militaires demandent à ce que les soldats puissent non seulement emporter leur arme personnelle à domicile, mais aussi des munitions. Compte tenu de l'aggravation de la situation sécuritaire mondiale, ils estiment que les soldats doivent pouvoir être rapidement mobilisables en cas de crise.
Depuis 2007 déjà, les militaires n'ont plus le droit de stocker les munitions dites de poche chez eux. Le Conseil fédéral et le Parlement avaient pris cette décision à cause de la multiplication des suicides avec des armes militaires. Mais désormais, des voix s'élèvent pour demander de changer la donne.
Les armes militaires, des catalyseurs de violences
Une vision absurde selon la gauche. Elle estime au contraire que les armes militaires remises aux soldats après leur service obligatoire doivent être récupérées – et ce, dans le cas où l'arme n'a pas été utilisée depuis plus de dix ans dans le cadre des tirs sportifs. L'objectif? Renforcer la prévention contre les homicides domestiques.
Raison pour laquelle pas moins de 33 membres du Conseil national ont cosigné la motion déposée par l'élue socialiste Priska Seiler Graf. La Zurichoise se base sur l'étude «Homicides par armes à feu dans la sphère domestique» du Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes. Ce rapport met en évidence l’utilisation fréquente d’armes de poing ainsi que d’anciennes armes militaires dans ce type de violences. Entre 2015 et 2022, sur les 41 infractions, une seule a été commise par une femme. La grande majorité des auteurs sont de nationalité suisse et ont en moyenne 63,2 ans. Alors que les victimes sont principalement des femmes, âgées en moyenne de 54,2 ans. Dans tous les cas répertoriés, l’auteur des faits s’est suicidé par la suite.
L'étude conclut que les anciennes armes militaires constituent un facteur de risque dans les ménages: «Un auteur potentiel qui a l’intention non seulement de tuer sa partenaire (et éventuellement d’autres membres de la famille tels que les enfants) mais aussi de se suicider ensuite peut plus facilement passer à l’acte si une arme à feu est à disposition dans le ménage.»
La responsabilité de l'Etat doit compter
Priska Seiler Graf et ses soutiens veulent mettre un terme à cette situation. «Ce n’est pas à l’armée de fournir, involontairement, l’arme du crime dans les cas d’homicides domestiques», affirme la conseillère nationale dans son intervention. Pour elle, la responsabilité de l’Etat ne disparaît pas sous prétexte que la privatisation des armes militaires remonte à plusieurs décennies. Bien au contraire: avec le temps, toute justification à la conservation de ces armes ne tient plus. Quiconque n’en a plus l’usage – y compris pour le tir sportif – devrait les restituer à l’Etat.
Priska Seiler Graf est convaincue que l'étude fédérale démontre clairement qu’une telle mesure peut jouer un rôle déterminant dans la prévention des homicides par arme à feu au sein des foyers.