La loi sur les cartels sera modernisée. Après le Conseil des Etats, le National a soutenu mercredi par 120 voix contre 58 et 12 abstentions une révision qui améliore le contrôle des concentrations. L'évaluation des accords cartellaires a fait débat, la gauche et le Conseil fédéral dénonçant un affaiblissement de la loi.
La révision prévoit la modernisation du contrôle des concentrations qui sera adaptée à la pratique internationale avec le test SIEC (Significant Impediment to Effective Competition). Les concentrations qui affectent la concurrence de manière significative pourront ainsi être interdites de manière plus ciblée ou autorisées moyennant des charges ou des conditions. La commission de la concurrence (Comco) pourra intervenir plus rapidement, a souligné le ministre de l'économie Guy Parmelin.
Le droit civil des cartels sera aussi renforcé, a rappelé le Vaudois. Les consommateurs et les pouvoirs publics pourront intenter une action civile et demander des prétentions en dommages-intérêts. Cette approche comble une lacune en matière de responsabilisation et va nettement moins loin que la réglementation européenne, a précisé Guy Parmelin. Cette extension n'est par ailleurs pas liée au projet du Conseil fédéral sur l'exercice collectif des droits.
Controverse
Le point le plus controversé du projet concerne l'évaluation des accords cartellaires illicites. Le droit en vigueur se contente de préciser que les accords qui affectent de manière notable la concurrence et qui ne sont pas justifiés par des motifs d'efficacité économique sont illégaux.
Le National veut introduire une évaluation au cas par cas. Il s'agit d'être pragmatique, en faveur des entreprises, a dit Beat Walti (PLR/ZH) pour la commission préparatoire, critiquant les procédures trop longues de la Comco. Il faut d'une part prendre en compte les éléments tant qualitatifs que quantitatifs lors d'une évaluation, ce qui répond à une ancienne demande du Parlement. Et d'autre part prouver le caractère effectivement dommageable d'un accord ou du comportement abusif d'une entreprise dominante, selon le PLR.
Affaiblissement
Avec cet ajout, la loi risque de devenir inopérante, s'est alarmée Sophie Michaud Gigon (Vert-e-s/VD). Le but de la loi est de lutter contre l'îlot de cherté qu'est la Suisse. «N'ouvrons pas des brèches, les gagnants seront les grands groupes et les avocats d'affaires» au détriment des consommateurs, a-t-elle appelé. Il deviendra quasiment impossible de prouver qu'un cartel existe, même si ce dernier est déjà présent de facto, a aussi argumenté Samuel Bendahan (PS/VD).
Le Conseil fédéral était aussi opposé à l'ajout du National. On risque un «affaiblissement considérable» de la loi, a averti Guy Parmelin. Les procédures administratives risquent de durer encore plus longtemps. Au Conseil des Etats, la commission compétente avait aussi tenté d'ajouter ce point. Mais elle avait échoué au vote. Au National, le camp bourgeois a cette fois eu gain de cause par 113 voix contre 75.
Ligues sportives
Le Conseil des Etats avait aussi introduit une dérogation à la loi sur les cartels en faveur des ligues de sport professionnel, notamment en ce qui concerne un éventuel cadre général pour les salaires des joueurs. Mais le National n'en a pas voulu. Le dossier retourne aux Etats.
La Chambre du peuple a encore soutenu une motion de l'ancien sénateur Olivier Français (PLR/VD), qui réclamait une professionnalisation de la Comco. Le Conseil fédéral a défini les grandes lignes d'une réforme des autorités de la concurrence qu'il présentera prochainement, a rappelé Guy Parmelin, demandant dès lors au conseil de renoncer à la motion.
Malgré cela, la majorité de la Chambre entend maintenir la pression pour que la réforme des institutions soit rapidement mise en œuvre. La motion a été soutenue à nouveau contre l'avis de la gauche et du PVL.