Google, Facebook et les autres services en ligne devront payer lorsqu'ils utilisent des contenus journalistiques de médias suisses. Le Conseil fédéral a transmis vendredi au Parlement son projet sur le droit d'auteur. Avec l'évolution numérique, le débat public s'est en grande partie déplacé sur Internet. Google, YouTube ou Twitter sont aujourd'hui plus souvent utilisés comme sources d'informations que les médias traditionnels, note le gouvernement dans un communiqué.
Leurs offres reposent largement sur les prestations journalistiques fournies par des médias traditionnels. Mais les très courts extraits de textes et les vignettes d’images ne sont pour l’heure pas protégés par le droit d'auteur. Les moteurs de recherche devront à l'avenir verser une rémunération aux médias pour pouvoir afficher des extraits d'articles de journaux ou des aperçus de vignettes d'images dans leurs listes de résultats. Seuls les services en ligne comptant un nombre annuel moyen d'utilisateurs de 10% au moins de la population suisse tomberaient sous le coup de cette obligation.
Les utilisateurs privés (blogueurs), les organisations à but non lucratif (Wikipédia), les institutions publiques dépositaires de la mémoire ou les bibliothèques ne sont pas concernées par le projet. Tout comme les services en ligne de taille plus modeste.
Au bénéfice des journalistes
Cette rémunération servira à indemniser les entreprises de médias dont le siège est en Suisse pour leurs prestations. Les journalistes pourraient recevoir la moitié de cette somme. La perception doit être assurée par une société de gestion. Cela permet d'éviter que les grands prestataires ne concluent des accords uniquement avec quelques grandes entreprises de médias et ainsi de protéger les médias locaux.
Le Conseil fédéral a également opté pour une approche qui ne se base pas uniquement sur des critères d'utilisation du contenu. La répartition de l'argent tient compte à la fois des dépenses des entreprises médiatiques, notamment les salaires des journalistes, et la contribution à la satisfaction du besoin d’information par une couverture autonome et régulière de la politique nationale, régionale et communale.
Le but est d'éviter que la rémunération n'aille en premier lieu aux contenus générés par l’intelligence artificielle par lesquels on cherche à capter l’attention, plutôt qu’aux entreprises de médias publiant des contenus qui soutiennent les valeurs démocratiques et qui sont dans l’intérêt public.
Très courts extraits couverts
Contrairement à la réglementation européenne, l’approche suisse couvre aussi l’utilisation de très courts extraits de publications journalistiques, mais uniquement dans la mesure où ils présentent un rapport direct avec une publication journalistique. Le droit à rémunération ne s’applique donc pas à de très courts extraits et à des mots isolés uniquement parce qu’ils sont aussi utilisés dans une publication journalistique.
La réglementation ne porte en revanche pas sur les simples hyperliens. Même s’ils redirigent vers une publication journalistique. L’absence de définition de la taille minimum pour les snippets supprime l’incitation pour les services en ligne de les raccourcir dans l’affichage des résultats de requêtes de recherche ou les aperçus dans le but de se soustraire au droit à rémunération.
Cette approche sert l’intérêt du public à l’information, car la teneur en contenus des snippets raccourcis est plus faible, et il faut déployer davantage d’efforts pour les recherches. Elle permet aussi d’éviter une discussion sur la longueur des snippets soumis à rémunération, comme celle qui a lieu par exemple dans divers États membres de l’UE.
Intelligence artificielle
Le projet de révision ne réglemente pas l'utilisation de l’IA dans le domaine des médias. Cette question est l'objet de la motion de Petra Gössi (PLR/SZ) «Pour une meilleure protection de la propriété intellectuelle contre les abus liés à l'intelligence artificielle», que le Conseil fédéral a proposé d'adopter.