Le directeur des investissements de Raiffeisen vous conseille
Or, immobilier, actions suisses: comment investir 100'000 francs sur 10 ans?

Comment et où investir son capital? Pour Blick, le responsable des placements de Raiffeisen, Matthias Geissbühler, présente la meilleure façon de placer une grosse somme d'argent, et revient sur les meilleures actions suisses dans lesquelles investir.
Publié: 10.01.2024 à 14:00 heures
|
Dernière mise à jour: 10.01.2024 à 14:01 heures
1/7
Le responsable des placements de Raiffeisen, Matthias Geissbühler, nous livre ses prévisions pour l'année boursière 2024.
Photo: ZVG
thomas_daniel_marti.jpg
Thomas Marti

Comment investir une grosse somme d'argent? Par où commencer? Dans quelle société placer son capital? Tant de questions que se sont déjà posées de nombreux Suisses. Pour Blick, Matthias Geissbühler, responsable des placements chez Raiffeisen Suisse, donne ses conseils pour placer au mieux son argent et explique pourquoi les actions suisses sont un bon pari.

Monsieur Geissbühler, où se situera l'Indice du marché suisse (SMI) à la fin de l'année?
Nous n'avons pas d'objectif concret concernant le SMI. Mais ce que je peux vous dire, c'est qu'il sera volatil et qu'il pourra baisser entre-temps. Si l'on prend en compte les dividendes, le SMI pourra progresser de 6% sur un an, selon mes estimations. C'est une progression plutôt moyenne, mais une performance solide. Ce sont justement les valeurs défensives comme Nestlé, Novartis et Roche qui devraient y contribuer le plus. Nous partons du principe que les autres bourses clôtureront en dessous du SMI.

En 2024, vous misez sur les actions suisses, l'or et les fonds immobiliers. Comment investiriez-vous 100'000 francs suisses sur dix ans, avec un héritage par exemple?
Dans cette situation, je miserais sans hésiter sur les actions suisses, avec une quote-part de 50 à 60% selon la capacité de risque. D'autant plus que les valeurs défensives suisses ont eu du mal l'année dernière. Roche s'est distingué par des pertes de cours à deux chiffres, Lonza a fortement perdu de sa valeur et Nestlé n'a pas non plus décollé. Les valeurs pharmaceutiques comme Novartis ainsi que la valeur défensive des biens de consommation Nestlé sont désormais évaluées à un prix avantageux et doivent faire partie de tout portefeuille. Les fonds immobiliers avec une pondération de 5 à 6% constituent un bon complément pour remplacer les obligations, grâce au rendement attractif des distributions. Ils conviennent également aux jeunes investisseurs qui ne sont pas eux-mêmes propriétaires de leur logement et qui souhaitent participer aux plus-values à moyen et long terme du marché immobilier suisse.

Pourquoi recommandez-vous l'or? Ce dernier ne génère pourtant pas de revenus, ni dividendes, ni paiements d'intérêts.
Le précieux métal jaune est utilisé comme couverture, respectivement comme protection contre les crises. Il contribue à lisser la volatilité du titre. Nous nous attendons à une baisse des coûts d'opportunité, c'est-à-dire des taux d'intérêt, à partir du second semestre. Après avoir consolidé entre 1600 et 2100 dollars l'once ces trois dernières années, le prix de l'or pourrait bien être sur le point de s'envoler. Il est donc avantageux de conserver une part d'or de 7% dans le portefeuille. A titre personnel, je conserverai les fonds restants, soit environ 27% après les 60% d'actions, 5 à 6% de fonds immobiliers, et les 7% d'or. Pour la répartition, je partirais sur une distribution à parts égales entre «obligations investment grade» en francs suisses avec une échéance plus courte et fonds du marché monétaire comme coussin de liquidités afin de pouvoir réagir avec flexibilité à l'avenir. L'année 2024 apportera sans doute de nettes fluctuations. De nouvelles possibilités d'investissement s'ouvriront alors à ce moment-là.

«
«La voie pragmatique consiste donc à entrer sur le marché de manière progressive»
Matthias Geissbühler, responsable des placements chez Raiffeisen
»

Il est pratiquement impossible de tout perdre au moment de l'achat. Investir de manière échelonnée ou par tranches est-il donc toujours pertinent?
Il n'y a pas de voie d'or. Selon certaines études, le timing est difficile, car les marchés sont en hausse constante sur une longue période. On recommande généralement de tout acheter en même temps. D'autres préconisent d'attendre une correction importante afin de pouvoir en profiter pour entrer sur le marché. C'est une alternative pertinente, mais le risque est de finir par attendre dix ans parce qu'aucune correction notable n'arrive ou pire, parce que l'investisseur la rate. La voie pragmatique consiste donc à entrer sur le marché de manière progressive. Surtout si l'on n'a jamais investi. Pour les investisseurs qui sont déjà sur le marché, il est important de réinvestir régulièrement de l'argent frais, pour que les prix d'achat puissent être lissés.

La sensibilité aux fluctuations de cours ou la volatilité que vous prévoyez concerne-t-elle toutes les classes d'actifs?
La volatilité restera élevée dans l'ensemble, même si 2023 a plutôt été l'exception. L'année a expérimenté des fluctuations très importantes sur les marchés de taux, et relativement faibles du côté des bourses d'actions. Cette année, nous nous attendons à une volatilité plus élevée pour les deux catégories d'actifs en raison de l'environnement économique incertain. Cela devrait entraîner de nombreuses rotations sectorielles qui feront davantage fluctuer les cours. On ne sait toujours pas quand les banques centrales commenceront à abaisser leurs taux d'intérêt, ni dans quelle mesure les taux directeurs baisseront. Tant d'incertitudes qui entraîneront des fluctuations importantes sur les marchés financiers.

Sur le marché suisse des actions, les investisseurs peuvent miser sur le SMI, le SLI, le SMIM ou le SPI avec des ETF. Lequel convient le mieux comme investissement d'après vous?
Le large Swiss Performance Index (SPI) est une bonne base. Les investisseurs bénéficient d'une importante diversification, tout en conservant une bonne part de gros titres comme Nestlé, Novartis et Roche. Nous partons du principe que les valeurs défensives auront le vent en poupe cette année et que le SPI et le SMI réaliseront de bonnes performances. Si l'on se projette au second semestre, il serait intéressant d'envisager un engagement dans le SMIM. Pendant l'été, les banques centrales commenceront à baisser les taux d'intérêt. Cela sera alors le moment d'acheter des actions cycliques, qui sont bien représentées dans le SMIM.

«
«Nous nous attendons à ce que les rendements de distribution des fonds immobiliers passent de 2 à 3%, car les revenus locatifs augmentent»
Matthias Geissbühler, responsable des placements chez Raiffeisen
»

Que pensez-vous des placements obligataires suisses?
La gestion active est très importante pour les obligations. L'année dernière, nous avons eu des rendements de distribution de 2,5% et plus dans le Swiss Bond Index (BBB). Notre exposition aux obligations a donc augmenté, mais nous l'avons aussitôt réduite après que les rendements ont nettement baissé au cours des dernières semaines. Actuellement, les rendements se situent à nouveau autour de 1,5%, ce qui correspond au niveau actuel de l'inflation. L'attrait de ces placements a en effet à nouveau diminué. Cela signifie que je protège mon capital, mais que je ne gagne pas d'argent en termes réels. Ce n'est qu'en cas de nouvelle hausse des taux d'intérêt que les obligations en francs suisses redeviendraient une option intéressante.

Le rendement des fonds immobiliers est actuellement d'un peu plus de 2%. Cela semble bas par rapport aux actions, n'est-ce pas?
Nous nous attendons à ce que les rendements de distribution des fonds immobiliers passent de 2 à 3%, car les revenus locatifs augmentent. Outre la génération d'un flux de trésorerie plus important, ces fonds devraient également profiter de la baisse des taux d'intérêt, parce que les valeurs patrimoniales nettes peuvent à nouveau être actualisées à un niveau plus bas. Nous ne nous attendons pas à de fortes augmentations des prix des évaluations immobilières. Les agios ont par ailleurs fortement baissé ces derniers temps et beaucoup d'éléments négatifs ont déjà été pris en compte.

Warren Buffett a pénétré la bourse il y a 45 ans, et il est désormais milliardaire grâce à ces investissements dans Coca-Cola. Quelles sont les trois actions suisses qui pourraient avoir le même destin à vos yeux?
Comme Warren Buffett, je miserais sur des titres qui fabriquent des produits de consommation courante. Dans le cas des actions tech, les changements sont très rapides, ce qui entraîne souvent une forte volatilité des cours. Les valeurs défensives des biens de consommation comme Nestlé doivent donc définitivement faire partie d'un portefeuille, même si l'entreprise ne peut pas afficher un taux de croissance à deux chiffres en raison de sa taille. En revanche, ses activités sont stables et à forte marge. Comme la moyenne d'âge est de plus en plus haute, une société comme Novartis ferait également partie de mon portefeuille. Pour le secteur industriel, Sika est une perle: l'entreprise a réussi de manière impressionnante à créer une solide valeur ajoutée au cours des dernières années. La société est très bien gérée et devrait apporter beaucoup de bons résultats pour les 20 à 30 prochaines années.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la