Fuite de gaz mortelle
Un ramoneur accusé de négligence après la mort d'une octogénaire

Un ramoneur est accusé d'avoir provoqué une fuite de gaz mortelle à Binningen (BL): il aurait oublié de monter le couvercle d'un conduit de fumée. Trois personnes ont été gravement intoxiquées et une femme est décédée.
Publié: 15:36 heures
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Le ramoneur François B. est-il responsable du décès d'une femme début décembre 2021?
Photo: DR
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Qendresa Llugiqi et Beat Michel

Début décembre 2021, le couple G.* a d'abord été découvert inconscient dans l'après-midi dans un appartement de Binningen (BL), avant qu'on ne trouve leur voisine Elisabeth M.*, 87 ans, décédée la nuit suivante. La raison: une intoxication au monoxyde de carbone.

Le responsable de cette tragédie serait François B.*, 55, ans, un homme exerçant la profession de ramoneur. Il serait à l'origine de la fuite de gaz mortelle. C'est du moins la conviction du Ministère public du canton de Bâle-Campagne. Dès ce jeudi, il devra répondre de ses actes devant le tribunal pénal cantonal à Muttenz. Il est accusé d'homicide par négligence et de lésions corporelles graves par négligence à plusieurs reprises.

François B. se dit innocent de tous les crimes qui lui sont reprochés: «Je n'ai pas fait d'erreur», martèle-t-il.

Système d'échappement non étanche

Le Ministère public du Canton de Bâle-Campagne reproche au ramoneur d'avoir bâclé un entretien le 7 décembre 2021. Il était chargé de travaux d'entretien sur une installation de chauffage au gaz naturel, y compris le système d'évacuation des fumées, dans un immeuble d'habitation à Binningen. Il avait déjà assuré l'entretien de ces installations les années précédentes.

Mais le mardi en question, il aurait oublié de remettre en place le couvercle de l'ouverture de service du tuyau d'évacuation. Il se peut aussi que le couvercle soit tombé lors d'une sorte de déflagration, car François B. avait préalablement enduit l'opercule de silicone. En d'autres termes: l'installation n'était pas étanche. De plus, il n'aurait pas effectué le contrôle final, ou alors il l'aurait fait de manière incorrecte.

Le monoxyde de carbone s'est répandu dans la maison

Selon l'accusation, cela a permis au monoxyde de carbone – un gaz incolore et inodore mais hautement toxique – de s'échapper par le tuyau d'évacuation des gaz de combustion dans la chaufferie et, de là, de pénétrer par un conduit d'installation et une porte de service, dans l'appartement du couple G., ainsi que dans la cuisine d'Elisabeth M. Les trois habitants de la maison ont été gravement intoxiqués au monoxyde de carbone, le gaz ayant bloqué l'absorption d'oxygène dans le sang.

Mercredi soir déjà, l'épouse G. avait temporairement perdu connaissance et avait dû être hospitalisée. Aucun diagnostic n'avait toutefois pu être établi. Le lendemain, en début d'après-midi, Mme G. et son mari étaient retrouvés inconscients dans leur chambre à coucher. Le couple a été transporté d'urgence à l'hôpital. Le diagnostic: une grave intoxication au monoxyde de carbone. Leurs vies étant en danger, ils ont dû être intubés et ventilés en réanimation. Selon l'acte d'accusation, ils ont tous deux subi des séquelles permanentes.

Alors que le couple G. luttait pour sa survie à l'hôpital, l'aide est arrivée trop tard pour Elisabeth M. Alors qu'elle était rentrée chez elle le jeudi vers 17 heures, les policiers l'ont retrouvée sans vie le lendemain dans l'après-midi. L'heure du décès est difficile à estimer, mais elle se situe probablement entre jeudi 17 heures et vendredi 2h15.

«Toujours le même schéma»

Le ramoneur François B. se dit très affecté par cette tragédie. «Je suis bien sûr désolé de ce qui est arrivé au couple et à cette dame», assure-t-il. Malgré tout, il est convaincu d'une chose: «Je procède toujours de la même manière. Je suis convaincu que je n'ai pas oublié de fermer le couvercle!»

L'avocat de François B., Me Matthias Aeberli, explique à Blick que la période qui s'est écoulée depuis l'incident a été très éprouvante pour l'accusé. «Ce n'est pas facile, même si on est convaincu de son innocence, de faire partie d'une procédure pénale, surtout en tant que prévenu. De plus, la procédure s'est étendue sur quatre ans, c'est vraiment long.»

L'avocat le répète: son client n'est aucunement coupable. «Pour l'être, il aurait dû négliger plusieurs choses, ce qui semble plutôt improbable. Par exemple, le fait que le couvercle soit posé sur le vase d'expansion, que l'ouverture soit effectivement activée et que de la vapeur ou de la fumée s'en échappe.»

Des exigences de 100'000 francs

Me Matthias Aeberli poursuit: «Il est prouvé dans le dossier que la pièce est restée ouverte plusieurs jours après et que de nombreuses personnes y ont eu accès». Autrement dit, la scène de crime présumée aurait pu être contaminée. «Il y a une personne de référence interrogée qui a contrôlé l'installation de chauffage, mais qui n'a pas détecté de défaut».

Un point laisse l'avocat songeur: «Le couple a été hospitalisé jeudi en début d'après-midi, où l'intoxication au monoxyde de carbone a été constatée. L'autre victime est décédée dans la nuit de jeudi à vendredi. Pourquoi personne ne les a prévenus ou n'a éteint le chauffage par précaution, du moins temporairement?»

Les réquisitions pénales du Ministère public doivent être communiquées aujourd'hui, jeudi, lors de l'audience principale. Des prétentions civiles d'un montant d'environ 100'000 francs sont formulées à l'encontre du ramoneur François B. L'accusé est présumé innocent.

* Noms connus de la rédaction

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