Éducation ou violence banalisée?
Un nouvel appel à interdire gifles et fessées secoue Berne

Les milieux de la protection de l’enfance appellent la Chambre des cantons à suivre le Conseil national, et à bannir pour de bon les châtiments corporels et les violences psychologiques sur les enfants. Le chemin à parcourir semble encore long, mais les lignes bougent.
Publié: 18.02.2022 à 12:32 heures
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Dernière mise à jour: 18.02.2022 à 16:22 heures
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Le châtiment corporel apparaît toujours plus comme une pratique d'un autre âge.
Photo: Getty Images
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Daniella GorbunovaJournaliste Blick

En 2020, 1590 cas de maltraitance d'enfants ont été signalés sur l'ensemble des cliniques helvétiques, selon Pédiatrie Suisse. C'est 1,5% de plus que l'année précédente. Reste que ces chiffres ne sont que la toute petite pointe de l'iceberg, et ne correspondent pas à la véritable étendue du problème. Pour la même année, l'Université de Fribourg parle par exemple d'un enfant sur quatre!

En Suisse, le débat sur la pénalisation des gifles et des fessées n'est pas nouveau. Il est aujourd'hui relancé sous l'impulsion de la conseillère nationale centriste Christine Bulliard-Marbach. Et, cette fois, cela pourrait être la bonne. «Nous sommes à un tournant sur cette question. Des œillères sont tombées», affirme la politicienne dans «Le Temps».

Ainsi, une motion vient de voir le jour à Berne. Elle réclame l'inscription dans le Code civil du «droit à une éducation sans violence» afin de protéger les enfants contre «les châtiments corporels, les violences psychologiques et contre toute forme de rabaissement». Adoptée par le Conseil national en automne 2021, elle doit passer devant le Conseil des États, en principe cette année, comme l'explique le média romand.

Une Berne toujours frileuse

Jeudi, la Commission des affaires juridiques du Conseil des États a décidé de ne pas se prononcer sur le fond de cette proposition et d’attendre les conclusions d’un rapport du Conseil fédéral sur la question, qui devrait tomber d’ici à l’été. Le dossier n'est donc, concrètement, pas près d'avancer.

Car le Conseil fédéral estime toujours que «les enfants sont protégés par le droit pénal», la gifle étant déjà considérée comme une infraction.

Autre élément clé, plus Suisse que Suisse, l'État rechigne à se mêler des affaires familiales: «Une réglementation légale ne saurait décrire de manière satisfaisante comment les parents ont à se comporter.» Et une nouvelle norme risquerait d’attiser «une peur de l’interventionnisme étatique», affirme le Conseil fédéral, qui privilégie pour l'heure les programmes de prévention au niveau des cantons.

Un enfant sur quatre subit encore des violences

Dans l'autre camp, on prépare l'offensive comme jamais. Les milieux de l'enfance, en particulier, tirent la sonnette d'alarme. Cette semaine, une trentaine d’organisations, dont Pédiatrie Suisse, Pro Juventute ou Terre des Hommes, se sont de fait alliées pour presser les conseillers aux États d'accepter la motion de Christine Bulliard-Marbach.

«Un enfant sur quatre est régulièrement exposé à la violence psychologique», s’alarment les milieux de la protection de l’enfance dans un communiqué se basant sur une étude de 2020 de l’Université de Fribourg, réalisée à la demande de la fondation Protection de l’enfance Suisse.

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