L'Union démocratique du centre (UDC), ce parti de la loi et de l'ordre, semble avoir un problème majeur avec la loi et l'ordre. La justice veut enquêter sur cinq membres du groupe parlementaire. Mais avant de pouvoir le faire, la commission d'immunité du Conseil national doit décider ce lundi si l'immunité de ces cinq personnes doit être levée.
Cette mesure existe, car celui qui siège au Parlement est généralement protégé contre les poursuites pénales pour des déclarations ou des actes en rapport avec sa fonction. Ceci afin que les politiciens ne soient vraiment combattus que sur le plan juridique et pas simplement politique.
Dans le collimateur des enquêteurs, ces cinq hommes: les conseillers nationaux Andreas Glarner, le chef de groupe Thomas Aeschi et Michael Graber. S'y ajoutent le conseiller aux Etats et ancien président du parti Marco Chiesa ainsi que l'ancien conseiller national et secrétaire général de l'UDC Peter Keller.
Le cas Chiesa et Keller
«Un Tunisien a attaqué avec un couteau.» «Des migrants demandeurs d'asile en tournée nocturne de cambriolage de voitures.» Lors de la campagne électorale de 2023, l'UDC a fait de de la criminalité sa campagne. A chaque fois, on pouvait lire: «Nouvelle normalité?» Plusieurs plaintes pénales ont suivi. Le Ministère public bernois veut clarifier la situation et savoir si la campagne a enfreint la loi sur la discrimination. Dans le cas de Marco Chiesa, la commission juridique du Conseil des Etats a toutefois déjà pris une première décision: elle veut préserver son immunité.
Cet exemple a rappelé une affaire concernant l'ancien président de l'UDC Toni Brunner. Le Tribunal fédéral était arrivé à la conclusion que les annonces de l'UDC «Les Kosovars éventrent les Suisses» violaient la norme pénale contre le racisme. Toni Brunner avait conservé son immunité, tandis que le secrétaire général de l'époque et son adjointe avaient été condamnés. Sans fonction politique, ils ne bénéficiaient pas de l'immunité.
Le cas Aeschi et Graber
Le Palais fédéral n'avait encore jamais vu un tel scandale. Les deux parlementaires UDC se sont battus à mains nues avec des policiers fédéraux pendant la session d'été. La visite du président du Parlement ukrainien en était l'occasion. Thomas Aeschi et Michael Graber voulaient absolument passer un escalier bloqué par la sécurité. Ils ne voulaient pas se laisser arrêter par les policiers fédéraux... Grosse erreur.
Thomas Aeschi a argumenté que le travail parlementaire avait la priorité sur les visites d'Etat à l'étranger. Le Ministère public de la Confédération semble voir les choses différemment. Il demande la levée de l'immunité des deux hommes. Une procédure pénale formelle pourrait ainsi être engagée contre eux pour entrave à l'accomplissement d'un acte officiel.
Le cas Glarner
Le conseiller national UDC a été dénoncé pour un tweet critiquant l'islam qu'il avait rédigé après les attaques au couteau de Mannheim et de Solingen en Allemagne. Le Ministère public bernois souhaitr ouvrir une procédure pour éventuelle discrimination raciale.
Les cinq hommes de l'UDC n'ont toutefois pas trop de soucis à se faire. Dans le cadre de leurs fonctions, la liberté d'expression est généralement respectée. L'immunité est très rarement levée et la liste des personnes épargnées est longue. Dernièrement, seul l'ancien conseiller national UDC Christian Miesch a perdu son immunité. Dans l'affaire dite du Kazakhstan, il était soupçonné d'avoir accepté de l'argent pour une intervention parlementaire. L'enquête a ensuite été classée.
Cette fois-ci, la commission d'immunité pourrait se montrer plus clémente. Après tout, sur les neuf membres qui la composent, quatre appartiennent à l'UDC et plaideront en la faveur de leurs collègues de parti.