Le symbole Westbrook
Lorsque Russell Westbrook a été recruté, en provenance de Washington, il devait former un «Big 3» complémentaire et redoutable avec LeBron James et Anthony Davis, les seuls rescapés (avec Avery Bradley et Talen Horton-Tucker) de l'équipe californienne après son élimination au 1er tour des play-off 2021. Ni les fans ni la planète du ballon orange n'imaginaient qu'un immense échec se produirait au bout de la saison régulière suivante.
D'autant que dans le sillage du recordman de triples-doubles de la ligue, les grandes manoeuvres ont continué: les vétérans Carmelo Anthony, Trevor Ariza, DeAndre Jordan sont arrivés, Rajon Rondo (reparti presque aussitôt) et Dwight Howard, artisans du sacre en 2020, sont revenus, et Malik Monk ainsi que Kendrick Nunn devaient apporter du sang neuf à l'effectif le plus âgé de la NBA.
Payé 44,2 millions de dollars par saison, Westbrook, en dépit d'une volonté indéniable de bien faire, a le plus souvent mal fait les choses, au point de récolter railleries et même menaces de fans frustrés en raison de ses nombreux ratés, qui l'ont souvent fait figurer dans le «Shaqtin 'a Fool», le bêtisier concocté par l'ancienne gloire Shaquille O'Neal sur la chaîne TNT.
Pour Magic Johnson, autre légende des «pourpre et or», la faute en revient à LeBron James, qui selon lui a convaincu le manager général, Rob Pelinka, de choisir «RussWest» plutôt que DeMar DeRozan, parti de San Antonio à Chicago, où il réalise la meilleure saison de sa carrière. Possible, mais ce sont surtout les conditions contractuelles qui sont en cause, car Los Angeles ne voulait pas offrir à DeRozan le contrat de trois saisons qu'il espérait.
Sans idées, sans défense
Il y a deux ans, le pari de l'intérieur Anthony Davis, arrivé de La Nouvelle-Orléans, se révélait gagnant: les Lakers recrutaient un des meilleurs défenseurs de la ligue, doublé d'un scoreur efficace, devenu le lieutenant idéal de LeBron James. Derrière ce duo, toute l'équipe était au diapason et c'est d'abord grâce à sa force de dissuasion défensive qu'elle a remporté son 17e titre, égalant le record des Boston Celtics.
Mais cette saison 2021-2022 a été celle du crépuscule d'une défense californienne arpentée à toutes blindes par les attaques adverses, quasiment jamais contrariées pour marquer. Et offensivement, ce fut le désert, l'équipe affichant une énorme «LeBron-dépendance». À 37 ans, James a évolué à un niveau encore exceptionnel (30,3 pts de moyenne, à 52,4% de réussite) mais sans faire mieux jouer les autres, en témoignent ses 6,2 passes décisives de moyenne, loin des 10,2 de l'exercice 2019-2020.
La semaine passée, l'entraîneur, Frank Vogel, avait fait un constat amer à l'issue d'un revers à Dallas, qui valait pour l'ensemble de la saison: «Nous n'avons tout simplement pas bien joué, avec trop peu de dureté, d'intelligence, de concentration et d'envie. C'est inacceptable, on a été mauvais à tous les niveaux, les entraîneurs, les joueurs, tout le monde. On n'est pas assez bon, même pas à l'entraînement.» Un constat sans appel.
Des blessures récurrentes
Le grand nombre de blessures subies par les joueurs californiens cette saison ne peut être étranger à la longue descente aux enfers de l'équipe. Inutile de toutes les mentionner, mais forcément, cela a été plus dur sans Anthony Davis, dont la fragilité est notoire et qui n'aura finalement joué que la moitié des matches (40 sur 79, à trois rencontres du terme de la saison régulière), plombé par une entorse au genou gauche fin décembre, puis une autre blessure au pied droit, à la mi-février.
Et il a été impossible de mieux faire ces dernières semaines, sans James qui devait reposer parfois son genou gauche en proie à des gonflements récurrents, avant qu'une torsion de la cheville gauche ne lui fasse manquer plusieurs rencontres cruciales dans la dernière ligne droite.
De fait, pour que le «Big 3» avec Westbrook fonctionne, il aurait fallu que le trio joue plus que... 21 petits matches ensemble.
Et maintenant?
Restent les questions épineuses. Les Lakers voudront-ils transférer Westbrook? Le pourront-ils, sachant qu'il sera difficile de trouver un repreneur pour son contrat mirobolant? James, sous contrat jusqu'en 2023, peut-il partir cet été? Et Davis? Une nouvelle refonte de l'effectif s'impose, mais avec quelle stratégie et quelle star libre sur le marché, si Westbrook s'en va? Enfin, quid de Frank Vogel, très critiqué? Fera-t-il le premier les frais du fiasco? Les noms de Doc Rivers (Sixers) et Quin Snyder (Jazz) circulent déjà du côté de Los Angeles...
(AFP)