Une présidente au nez refait et aux poignets trop bien garnis: au Pérou, Dina Boluarte se retrouve au cœur de deux scandales qui ébranlent son mandat et sa crédibilité. Déjà frappée d’un taux de désapprobation record de 93%, le plus bas au monde, la cheffe d’Etat fait désormais l’objet de plusieurs enquêtes menées par le procureur général, relève CNN dimanche 18 mai.
Deux affaires en particulier agitent l’opinion publique: une rhinoplastie réalisée en secret durant un congé présidentiel de douze jours, et l’apparente possession de luxueuses montres Rolex, soupçonnées d’avoir été reçues en guise de pots-de-vin. Si Dina Boluarte nie en bloc, ses explications peinent à convaincre une population déjà largement désabusée.
Mais au Pérou, ces scandales ne sont pas une anomalie. Depuis le début des années 2000, sept anciens présidents ont été poursuivis pour corruption ou violations des droits humains. Un huitième s’est suicidé alors que la police s’apprêtait à l’arrêter. Dans ce contexte, la présidence de Dina Boluarte s’inscrit dans une longue série de crises politiques.
Une chirurgie vraiment «essentielle»?
La présidente soutient que ses opérations médicales à l'été 2023 étaient médicales, et donc «essentielles». Problème: son propre chirurgien, Mario Cabani, la contredit publiquement. Selon lui, cinq interventions ont été pratiquées dont une rhinoplastie, une septoplastie, une chirurgie des paupières inférieures et une greffe de graisse sur les sillons nasogéniens. Une seule avait une visée fonctionnelle. Le reste? Purement esthétique.
Et pendant ce temps-là, le Pérou était sans présidente aux commandes. Elle n'a ni averti le Congrès, ni les délégués au pouvoir, alors qu'elle était tenue constitutionnellement de le faire. A la suite des propos de son chirurgien, Dina Boluarte a déclaré par l'entremise de son porte-parole qu'il s'agissait d'une «affaire privée».
Le «prêt» des Rolex
L’affaire ne s’arrête pas là. En mars 2024, la police découvre plusieurs montres de luxe, dont des Rolex, ainsi que des bijoux au domicile de Dina Boluarte. Elle est accusée d'enrichissement illicite et de non-déclaration.
La valeur du butin? 420'000 francs suisses, alors que le salaire mensuel de la présidente est de 3700 francs suisses. Dina Boluarte a une explication… plutôt légère. Elle parle d'un «prêt», reçu par erreur. Il est clair pour elle qu'elle se trouve au milieu d'un complot dont elle est la victime.
La malédiction péruvienne
Ailleurs, ces révélations auraient de quoi choquer. Au Pérou, elles s’inscrivent dans une longue litanie d'affaires louches au sommet de l’Etat. Les scandales présidentiels avérés ou présumés sont si courants qu’une de ses prisons a hébergé quatre anciens dirigeants tombés en disgrâce.
Tout commence en 2000 lorsque Alberto Fujimori est impliqué dans une affaire d'escadron de la mort. Il sera condamné à 25 ans de prison pour crime contre l'humanité et corruption. Alejandro Toledo a écopé de 20 ans pour avoir perçu des millions en pots-de-vin. Ollanta Humala vient d’être condamné à 15 ans pour financement illégal de campagne. Alan García s’est tiré une balle dans la tête le jour de son arrestation.
Pedro Pablo Kuczynski a démissionné, éclaboussé par des affaires de blanchiment. Martin Vizcarra a été destitué pour corruption présumée. Toutefois, Anibal Quiroga, doyen de la faculté de droit et de sciences politiques d'une université péruvienne, met en garde: il existe également des cas de procédures judiciaires utilisés à des fins de manœuvres politiques, dans le but d'éliminer, de nuire ou délégitimer un adversaire.
Et maintenant Dina Boluarte
En plus des scandales esthétiques et des montres de luxe, Dina Boluarte est accusée d’avoir couvert une répression qui a fait 60 morts, et d’avoir utilisé un véhicule officiel pour aider un politicien recherché.
Un parfum d’impunité plane sur le palais présidentiel. Comme si la fonction suprême au Pérou portait en elle une malédiction. Une malédiction toujours d’actualité.