Arsène Lupin a des héritiers! Né de l’imagination du romancier Maurice Leblanc (1864-1941), le cambrioleur le plus célèbre de Paris n’aurait sans doute pas fait mieux. Il était un peu plus de 9h30, ce dimanche 19 octobre, lorsque plusieurs voleurs émérites, «véritables professionnels de haut niveau» selon la police, se sont introduits dans la salle «Apollon» du musée du Louvre.
Comme Arsène Lupin, ces cambrioleurs avaient sans doute effectué des repérages détaillés, puisqu’ils ont utilisé un monte-charge garé à proximité pour pénétrer dans le musée, alors que des centaines de visiteurs y étaient entrés depuis neuf heures, dès l’ouverture dominicale. L’arrivée des cambrioleurs et leur fuite s’est faite grâce à de puissants scooters.
Quatre minutes sur place
Au final, pour le moment du moins: quatre malfaiteurs, sept minutes et demie du début à la fin de l'opération, quatre minutes sur place, des vitrines déverrouillées après avoir scié les cadenas à la disqueuse, et un vol de bijoux difficile à estimer, car les pièces dérobées, toutes identifiées et maintes fois photographiées sous toutes les coutures, sont impossibles à écouler telles quelles. La police s’est donc aussitôt mise en chasse de receleurs possibles, afin d’identifier les auteurs de ce braquage digne d’un film. C’est de cette façon qu’en 2016, les enquêteurs avaient remonté la piste des bijoux volés à la star américaine Kim Kardashian.
Le démontage à grande vitesse de bijoux de ce type, puis l’exfiltration des diamants et des pierres précieuses, est souvent une mission encore plus ardue que le cambriolage lui-même. Dans l’affaire Kardashian, tous les protagonistes ont été retrouvés. Ils sont passés en jugement le 23 mai dernier à Paris. Les bijoux volés font partie des cadeaux offerts par l’Empereur Napoléon III à l’impératrice Eugénie. Une collection de bijoux et huit pièces inestimables ont été dévalisées. La couronne impériale a été abandonnée sur place. Un casque, des gants, un talkiewalkie et les disqueuses ont été retrouvés. « Nous retrouverons les œuvres et les auteurs seront traduits en justice» a promis Emmanuel Macron.
La sécurité du musée en question
La question la plus délicate posée par ce cambriolage spectaculaire pour les autorités françaises est la sécurité du musée du Louvre, l’un des plus fréquentés au monde avec 8,2 millions de visiteurs en 2024. Ce chiffre est passé à neuf millions en 2025, dont 80% d’étrangers. Le 14 octobre 2023, le musée parisien avait déjà été évacué et fermé à cause d’une menace d’attentat. Après vérification, rien d’anormal n’avait été découvert et il avait rouvert le lendemain. Les salariés avaient fait grève ces dernières semaines pour protester contre le manque de moyens. Plus grave: un rapport pas encore publié de la Cour des Comptes, dont France Info a révélé le contenu lundi 20 octobre, pointe des retards «considérables» et «persistants» dans la mise aux normes des installations techniques du musée le plus visité au monde. Dans le secteur Denon, où se trouve la Galerie d’Apollon, cambriolée, mais aussi la Joconde, un tiers des salles ne dispose d’aucune caméra de surveillance. Dans le secteur Richelieu, les trois-quarts des salles sont dépourvus d’équipement de vidéosurveillance.
Le Louvre, ancien palais des Rois de France, abrite un musée depuis 1793. Il fait l'objet d’une campagne de restauration annoncée le 28 janvier par Emmanuel Macron, ce qui peut expliquer le choix des cambrioleurs d'utiliser un engin de chantier dotée d'une nacelle. En début d’année, la présidente-directrice du plus grand musée du monde, Laurence des Cars, avait lancé un cri d’alarme, affirmant que «les bâtiments du Louvre arrivent à un niveau d’obsolescence inquiétant».
Visiter le Louvre? Une épreuve
«Visiter le Louvre constitue une épreuve physique avait-elle poursuivi en présence du président français, venu inspecter les lieux, en dénonçant le manque d’espaces de restauration et de toilettes, la signalétique obsolète ou la régulation thermique défaillante. Suite au cambriolage, une enquête a été ouverte ce dimanche pour «vol en bande organisée et association de malfaiteurs criminelle».
Plusieurs vols célèbres ont eu lieu au musée du Louvre dans le passé. La Joconde, le fameux portrait de Mona Lisa par Léonard de Vinci, a été volée le 21 août 1911. L’enquête, rocambolesque, avait piétiné pendant deux ans, avant que le tableau ne réapparaisse à Florence. Le voleur était un vitrier italien ayant travaillé au musée, Vincenzo Peruggia. Il avait simplement décroché le tableau et était sorti avec sous sa blouse.
Autre vol: celui de deux pièces d’armure volées le 31 mai 1983 puis restituées au musée 38 ans plus tard après leur identification lors d’une expertise pour une succession à Bordeaux. Le troisième vol notable est celui d’un tableau de Camille Corot, «Le Chemin de Sèvres», dérobé le 3 mai 1998. Ce paysage du peintre impressionniste n’a jamais été retrouvé.