30% de taxes au 1er août
Les Européens ont-ils tout raté face aux tarifs de Trump?

30% de tarifs au 1er août! Donald Trump a tranché: le «deal» que l'Union européenne propose aux Etats-Unis sur le plan commercial ne lui convient pas. Les négociateurs bruxellois ont maintenant deux semaines pour redresser la barre.
Publié: 17:24 heures
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Dernière mise à jour: 17:30 heures
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Ursula von der Leyen a survécu la semaine dernière une motion de censure au Parlement européen. Mais elle est sous pression de Berlin.
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

Les Européens sont-ils en train de perdre la partie de poker commerciale déclenchée par Donald Trump? Au vu de la décision du président américain d’imposer, à compter du 1er août, 30% de tarifs douaniers sur les produits importés des 27 pays membres de l’Union, la conclusion semble évidente. Comment en est-on arrivé là et comment en sortir? Retour sur les 5 ratages européens auxquels Bruxelles doit remédier d’urgence.

Ratage N° 1: Pas de riposte

La Chine et les Etats-Unis ont signé, le 26 juin, un accord commercial qui met provisoirement fin à la guerre commerciale déclenchée par les annonces de Donald Trump le 2 avril – le fameux «liberation day» – puis par la surenchère de Pékin. Une grande partie de cet accord a été négocié à Genève, où les deux délégations se sont rencontrées en mai. Comment en est-on arrivé là? Parce que la seconde puissance économique mondiale a tapé fort, menaçant à son tour les Etats-Unis de tarifs supérieurs à 100%.


Résultat selon le «Wall Street Journal»: les marchandises chinoises subiront 30% de nouveaux droits, dont 10% de droits «réciproques» (c’est le tarif universel de base imposé par l’Amérique au reste du monde), plus 20% de sanctions pour le trafic de fentanyl. S’y ajoutent environ 25% de droits préexistants, précise la Maison-Blanche. Un accord sur les aimants et les terres rares a aussi été conclu. Mais attention: si l’on inclut les biens et les services, le déficit commercial des Etats-Unis vis-à-vis de la Chine était de 295 milliards de dollars en 2024, contre 50 pour l’UE.

Ratage N° 2: L’écueil allemand

Donald Trump a compris que le Commissaire européen Maros Sefcovic, bien connu en Suisse pour avoir négocié les futurs accords bilatéraux avec le Conseil fédéral, est soumis à de rudes pressions du côté de Berlin. En clair: l’Allemagne presse en faveur d’un accord rapide avec les Etats-Unis, quitte à accepter des tarifs douaniers accrus, parce que deux secteurs exportateurs sont frappés de plein fouet: l’automobile et les machines-outils. Le Chancelier allemand a officiellement proposé d’accepter des droits de douane à 10%, pour éviter une escalade à 20%, voire 50%, faute d’entente avec Washington. 

«Les 27 Etats membres de l’Union sont de plus en plus divisés sur la meilleure manière de répondre à la guerre tarifaire mondiale lancée par Trump le 2 avril» écrivait récemment la lettre «La Matinale européenne». «Nous sommes prêts à répondre» a pour sa part martelé plusieurs fois Ursula von der Leyen, présidente de la Commission. Oui, mais quelle réponse?

Ratage N° 3: Plus de taxe numérique

C’est l’arme fatale dont dispose l’Union européenne, dont le grand marché de 450 millions d’habitants est essentiel à la prospérité des géants de l’internet et de l’intelligence artificielle: imposer, en riposte, une taxe sur les données et sur les transactions de ces firmes multinationales. 

Or selon le média «Politico», la Commission européenne a renoncé à prélever une taxe sur les entreprises numériques, une décision qui donne la victoire à Donald Trump et aux géants américains de la technologie tels qu’Apple et Meta. Le refus d’une telle taxe constituerait un revirement majeur pour l’UE, qui envisageait cet impôt pour rembourser la dette de l’Union.

Ratage N° 4: Trump préfère la force

Un sommet a ravi Donald Trump: celui de l’OTAN les 24 et 25 juin à La Haye. Lors de cette journée et demie passée aux Pays-Bas, le président des Etats-Unis a obtenu tout ce qu’il voulait. A l’exception de l’Espagne, qu’il a tancé en public, les 30 autres pays membres de l’alliance ont accepté d’augmenter leurs dépenses de défense jusqu’à 5% de leur produit intérieur brut. Ce qui signifie, concrètement, un afflux de commandes militaires vers les industriels de l’armement américains désormais en difficulté pour fournir leurs clients aux prix prévus, comme la Suisse l’expérimente avec les F35.

Plus grave: le Secrétaire général de l’OTAN Mark Rutte a choisi de flatter à l’excès le locataire de la Maison Blanche qui a, en retour, accepté de signer un communiqué réitérant la garantie de sécurité… prévu par le traité de l’organisation. La force a donc payé à l’OTAN. Pourquoi négocier, dès lors, avec l’Union européenne? «Veuillez comprendre que le chiffre de 30% est bien inférieur à ce qui est nécessaire pour éliminer la disparité du déficit commercial que nous avons», a écrit Donald Trump à Ursula von der Leyen. La méthode du marteau.

Ratage N° 5: Des calculs contestés

Qui gagne? Qui perd? Quels secteurs de l’économie européenne peuvent supporter une augmentation des tarifs douaniers et lesquels ne le peuvent pas? En théorie, la Commission européenne affirme depuis des mois avoir fait cet inventaire. Sauf que rien n’est clair. 

«Je doute qu’il soit possible de trouver un accord qui ne soit pas seulement des concessions unilatérales» a confirmé un diplomate à «La Matinale européenne». Il est possible de trouver un accord pour des mesures sectorielles pour l’acier et l’aluminium, car les produits exportés ne sont pas produits aux Etats-Unis, et pour l’automobile. Mais que va-t-il se passer pour la pharmacie?». 

Une autre arme américaine est apparue. La section 899 du «One Big Beautiful Bill Act» la super loi budgétaire récemment adoptée par le Congrès propose de taxer les investissements étrangers aux États-Unis, en imposant une retenue à la source sur les revenus de capitaux en provenance de pays accusés par les Etats-Unis de pratiques fiscales «déloyales». En clair: Même s’il négocie, Trump peut réenclencher la guerre à tout moment.

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