La justice française fait respecter la loi. Son indépendance est garantie par l’article 64 de la constitution. Elle n’est donc pas une arme implacable, tant s’en faut, contre les rumeurs, le complotisme et leurs commanditaires.
C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre la surprenante décision prise, jeudi 10 juillet, par la Cour d’appel de Paris. Celle-ci a en effet décidé de relaxer Natacha Rey et Amandine Roy, les deux accusatrices de Brigitte Macron. Pour ces deux femmes, omniprésentes sur les réseaux sociaux en 2021 et 2022, l’épouse du président français serait un homme. Plus précis encore: Brigitte Macron, 72 ans, serait en fait née sous le nom de Jean-Michel Trogneux, son frère à l’état-civil, né en 1945. Un changement d’identité qualifié par les intéressées d’«escroquerie», de «tromperie» et de «mensonge d’Etat».
Condamnations et relaxe
Les deux protagonistes avaient, dans cette affaire, été condamnées à une amende de 500 euros avec sursis pour diffamation en première instance le 12 septembre 2024. Le tribunal leur avait alors imposé de payer un total de 8000 euros de dommages et intérêts à Brigitte Macron, et 5000 euros à son frère, toutes deux parties civiles au procès.
Natacha Rey avait pour sa part été précédemment condamnée par le tribunal correctionnel de Lisieux pour diffamation (pour sept discours affirmant que Brigitte Macron n’est pas la mère de ses enfants Tiphaine, Sébastien et Laurence) le 14 février 2023, condamnation confirmée en appel le 28 juin 2023. La Cour de cassation avait ensuite rejeté son pourvoi le 21 janvier 2025, estimant que «les arguments présentés ne sont pas de nature à remettre en cause les condamnations prononcées par la cour d’appel de Caen». La condamnée avait fait valoir qu’elle n’est pas l’auteure des déclarations qui lui sont imputées.
Bénéfice de la bonne foi
Pourquoi cette relaxe en appel dans cette seconde procédure? Parce que le tribunal a, cette fois, reconnu aux deux femmes «le bénéfice de la bonne foi». Mais surtout parce que l’objet de la plainte pour diffamation, et les articles concernés, était différent. Seul un passage des articles ou interventions incriminés faisant référence à un détournement de mineur entrait dans le champ d’application de la loi de 1881 sur la presse.
Celle-ci réprime en effet «toute atteinte à une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion», mais aussi «à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap». Or dans le cas de Brigitte Macron, les deux accusatrices affirment avoir révélé un changement d’identité concernant une personne publique. Leurs propos n’étaient, selon leurs avocats, «pas insultants ni diffamatoires envers la personne visée». Le défenseur de Brigitte Macron, Me Jean Ennochi, a fait connaître son désaccord à l’issue du jugement.
Brigitte Macron, cible parfaite
Brigitte Macron est, depuis l’accession de son mari à l’Elysée en mai 2017, la cible de multiples rumeurs et accusations, largement nourries par la différence d’âge entre les deux époux (lui est né le 21 décembre 1977) et par le fait que l’actuel chef de l’Etat fut l’élève, en 1992, d’un cours de théâtre donné par sa future femme, alors enseignante au lycée La Providence d’Amiens où il était scolarisé.
Quid des deux accusatrices? Elles restent pour l’heure silencieuses. Sur les réseaux sociaux en revanche, leurs soutiens ont multiplié les déclarations. «Natacha Rey, pourchassée, persécutée, condamnée. Mais finalement Natacha Rey relaxée», s’est félicité son avocat. Les rumeurs sur Brigitte Macron ont été relayées à travers le monde, surtout aux Etats-Unis via l’influenceuse américaine ultraconservatrice Candace Owens. L’un des moteurs de la rumeur avait été la présumée présence d’un dossier classifié sur Emmanuel Macron, trouvé par le FBI en septembre 2022 lors d’une perquisition à la résidence de Donald Trump à Mar-a-Lago en Floride.