La France sans gouvernement
Les 5 leçons à retenir après la chute de Bayrou

La chute de François Bayrou était attendue. Une majorité de députés a donc choisi de refuser la confiance à son gouvernement. Emmanuel Macron se retrouve obligé de trouver, dans un pays sans budget, un nouveau Premier ministre.
Publié: 08.09.2025 à 21:35 heures
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François Bayrou a tenté une ultime fois, lundi 8 septembre, de convaincre les députés français de lui accorder leur confiance.
Photo: IMAGO/Bestimage
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Richard WerlyJournaliste Blick

Fin de l’histoire pour François Bayrou. Pour la première fois sous la Ve République, soit depuis 1958, un Premier ministre ayant choisi d’engager la responsabilité de son gouvernement se retrouve renversé par une majorité de députés. 364 voix contre, 194 pour et 15 abstentions: dès ce mardi matin, le chef du gouvernement présentera sa démission à Emmanuel Macron. Lequel devrait rapidement lui trouver un remplaçant. Mais pour faire quoi? Et surtout, avec quel avenir face à une assemblée majoritairement hostile? Le futur chef du gouvernement français devra en tout cas retenir ces cinq leçons.

Leçon 1: La vérité (financière) ne paie pas

François Bayrou n’a pas réussi à convaincre une majorité de députés. Mais ce que le Premier ministre français a dit devant l’Assemblée nationale ce lundi 8 septembre est vrai. La France est au bord de la falaise financière. «Notre pronostic vital est engagé», a martelé en vain le maire de Pau (Pyrénées Atlantiques), en citant le chiffre qui fait peur. Une dette publique de 3415 milliards d’euros, soit presque 120% du produit intérieur brut du pays. Et ce, alors que les agences de notation financière doivent prochainement se prononcer sur la note de la France. Bayrou pensait provoquer un électrochoc. C’est raté. Les socialistes, dont les 66 députés sont indispensables à la survie politique d’un gouvernement, continuent de réclamer l’abrogation de la réforme des retraites d’avril 2023.

Leçon 2: Macron n’a pas droit à l’erreur

Le président de la République n’a pas d’autre choix que d’accepter, ce mardi 9 septembre, la démission de ce Premier ministre qui lui avait forcé la main au début décembre 2024, pour succéder à Michel Barnier, déjà censuré par les députés pour des questions budgétaires. Et maintenant? S’il refuse de dissoudre l’Assemblée nationale – ce qu’il a laissé entendre – Emmanuel Macron doit absolument nommer une personnalité capable de forger une sorte de contrat de coalition à durée déterminée, au moins pour faire adopter un budget. 

Le projet de loi de finances doit normalement être présenté au Parlement début octobre. Il faut donc faire vite. Deux options: soit nommer un proche (comme les ministres sortants Darmanin, Lecornu ou Vautrin) avec pour mission de rallier les socialistes, ou désigner une personnalité indépendante ou acceptable par le PS. On parle de l’ancien ministre Jean-Louis Borloo, du président de la région Nord Xavier Bertrand (qui vient de la droite), ou du ministre sortant des Finances Eric Lombard. Un choix à très hauts risques.

Leçon 3: Une coalition demeure possible

C’est la seule issue qui peut permettre d’éviter le retour anticipé aux urnes. Cela voudrait dire que le parti Socialiste, la droite traditionnelle, les centristes et peut-être les Ecologistes acceptent au moins de ne pas censurer le projet de budget 2026, après en avoir accepté les grandes orientations chiffrées. A coup sûr, un tel compromis signifiera des économies budgétaires revues à la baisse par rapport au projet Bayrou de 44 milliards d’euros. 

Attention: cela ressemblera de toute façon à du bricolage, et cela signifiera un gouvernement français sans envergure. Avantage pour Macron? Eviter une crise politique majeure qui poserait la question de son éventuelle démission, alors qu’il se bat pour rester aux avant-postes sur la scène internationale.

Leçon 4: Tout peut basculer dans la rue

C’est la grande crainte après ce camouflet parlementaire sans précédent adressé par une majorité de députés à François Bayrou, et par ricochet à Emmanuel Macron. Dans le viseur inquiet du président de la République? Le mouvement du 10 septembre dont le mot d’ordre est «Bloquons tous!». Un mouvement qui est parti des réseaux sociaux, mais qui a désormais le soutien de la gauche radicale, désireuse d’accroître la pression de la rue sur le gouvernement. Une situation sociale compliquée serait le pire des scénarios en France, où les syndicats ont lancé un appel à la grève pour le 18 septembre. La rue est en embuscade. A gauche, les socialistes le savent et redoutent d’être accusés de pactiser avec la droite.

Leçon 5: Une France grandement fragilisée

C’est le résultat certain de ce vote de défiance massif. Emmanuel Macron est encore plus affaibli, à un an et demi de la fin de son second mandat, à l’issue duquel il ne pourra pas se représenter. Pourquoi parler de Macron? Parce que le premier parti de France, le Rassemblement national, réclame désormais ouvertement son départ, en exigeant une dissolution de l’Assemblée nationale, puis la démission du Chef de l’Etat s’il devait être désavoué dans les urnes. Au niveau européen, le coup est rude pour Macron, aux avant-postes sur le futur possible déploiement d’une force militaire de réassurance en Ukraine. La constitution protège bien sûr le président. Mais dans les faits, l’instabilité chronique le ligote et mine sa crédibilité.

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