Cinq nouvelles interpellations, dont un principal suspect, ont eu lieu dans le cadre de l'enquête sur le casse du Louvre, affaire qui a fait le tour de la Planète, a annoncé jeudi la procureure de Paris Laure Beccuau sur RTL. «L'un d'entre eux était effectivement un des objectifs des enquêteurs, on l'avait dans le viseur», a précisé la procureure, ajoutant que les bijoux, estimés à 88 millions d'euros, n'ont pas encore été retrouvés.
«Des traces ADN» lient ce principal suspect «au vol qui a été commis», a ajouté Laure Beccuau, suggérant qu'il faisait partie du commando des quatre hommes qui ont commis le casse au Louvre le 19 octobre. «Quant aux autres personnes qui sont placées en garde à vue, ce sont des personnes qui peuvent éventuellement nous renseigner sur le déroulement de ces faits», a éclairé la procureure de Paris, sans vouloir en dire plus sur leur profil, «il est trop tôt».
Ces «cinq interpellations ont eu lieu dans différents lieux», «sur Paris, mais également dans l'agglomération parisienne et notamment dans le 93 (Seine-Saint-Denis, région parisienne)», a-t-elle poursuivi. «En fait, il y a eu plusieurs objectifs qui ont été ciblés par les enquêteurs et donc qui ont été interpellés au cours de cette soirée», a brossé la procureure.
«Secret de l'enquête»
Les «perquisitions qui ont eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ne nous ont pas permis de retrouver le butin de ce cambriolage», a souligné la procureure. «Je dirais que comme toute enquête, cette enquête, c'est comme un fil d'Ariane», a comparé Laure Beccuau, concluant: «mon rôle n'est pas d'être inquiète (sur le sort des bijoux) mais d'être déterminée».
Avant leur interpellation, deux hommes soupçonnés d'avoir participé au spectaculaire casse du Louvre ont été mis en examen et écroués mercredi soir, mais les bijoux restent introuvables. Les deux suspects, âgés de 34 et 39 ans, avaient été interpellés samedi soir et ont été mis en examen pour «vol en bande organisée, ainsi que pour association de malfaiteurs en vue de commettre un crime» et placés en détention provisoire, a annoncé dans la soirée le parquet de Paris.
A l'issue de la présentation de leur client devant le juge des libertés et de la détention (JLD), les avocats du suspect de 34 ans, Mes Réda Ghilaci et David Bocobza, ont insisté sur la nécessité du «respect le plus absolu du secret de l'enquête et de l'instruction» dans ce dossier.
Des hommes «ordinaires»
«Le seul et unique commentaire que l'on peut vous donner ce soir, c'est qu'il existe un décalage qui est abyssal entre le caractère extraordinaire de ce dossier et la personnalité tout à fait ordinaire de notre client», ont-ils déclaré aux journalistes. Les avocats du second mis en cause n'ont pas souhaité s'exprimer. Les deux trentenaires ont «partiellement reconnu les faits», a indiqué la procureure de Paris Laure Beccuau lors d'une conférence de presse en fin d'après-midi. Ils sont soupçonnés d'être ceux qui ont «pénétré dans la galerie d'Apollon pour s'emparer des bijoux», a-t-elle précisé.
La procureure a ajouté que «rien ne permet à ce stade d'affirmer que les malfaiteurs auraient bénéficié d'une complicité quelconque au sein du musée». En revanche, «nous n'excluons pas la possibilité» d'un groupe beaucoup plus large que les quatre malfaiteurs repérés par les caméras de surveillance, a-t-elle dit.
Bijoux «invendables»
Les bijoux «ne sont pas encore en notre possession. Je veux garder l'espoir qu'ils seront retrouvés et pourront être rendus au musée du Louvre et plus largement à la nation», a aussi déclaré Laure Beccuau devant la presse. «Ces joyaux sont dorénavant bien évidemment invendables. Pour rappel, (...) quiconque les achèterait se rendrait coupable à son tour de recel de ce crime», a-t-elle souligné, avant de lancer: «Il est encore temps de les restituer». Les deux premiers hommes appréhendés vivent à Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis.
Le premier homme de 34 ans a été interpellé samedi soir à l'aéroport de Roissy alors qu'il s'apprêtait à embarquer pour l'Algérie «sans billet de retour pour la France». De nationalité algérienne et vivant en France depuis 2010. Il est déjà connu des services de police et de justice pour des faits relevant essentiellement de la délinquance routière, et un fait de vol, selon la procureure. Le deuxième, âgé de 39 ans, a été interpellé à proximité de son domicile. «Rien ne permet d'affirmer qu'il était en partance pour l'étranger», a indiqué la procureure. Il est déjà connu pour des faits de vols aggravés.
Laure Beccuau a souligné le travail «jour et nuit» de la centaine d'enquêteurs et magistrats impliqués sur ce dossier, évoquant une «mobilisation exceptionnelle de tous» pour «identifier au plus vite les malfaiteurs et tenter de retrouver les bijoux». Plus de 150 analyses de prélèvements ont été réalisées «dans la plus grande urgence», a-t-elle dit. Le butin de ce casse rocambolesque qui a fait le tour de la planète est estimé à 88 millions d'euros, avait indiqué Laure Beccuau.
Vers 09H30 le 19 octobre, les membres du commando avaient installé un camion-élévateur au pied du musée, sur le quai François-Mitterrand, et deux d'entre eux, visages masqués, s'étaient hissés avec une nacelle jusqu'à la galerie Apollon. Après avoir brisé une fenêtre et les vitrines contenant les bijoux à l'aide de disqueuses, les voleurs étaient repartis à bord de deux scooters conduits par leurs complices. Le cambriolage a duré en tout moins de huit minutes. Dans leur fuite, les malfaiteurs ont laissé tomber la couronne de l'impératrice Eugénie, qui a été abîmée. La directrice du Louvre a fait savoir «combien il serait délicat» de la restaurer, a noté Laure Beccuau.
Sécurité en question
L'affaire a provoqué des débats-fleuves sur la sécurité du Louvre, musée le plus visité du monde. Elle a débouché sur un premier bras de fer. Le nouveau préfet de police de Paris, Patrice Faure, s'est ainsi dit mercredi «fermement opposé» à l'installation d'un commissariat au sein du Louvre, demandée par la présidente du musée, Laurence des Cars, après le cambriolage.
Le président de la commission de la Culture du Sénat, Laurent Lafon, a estimé mardi, à l'issue d'une visite des installations de sûreté du Louvre, que la sécurité de l'établissement n'était «pas conforme à ce qu'on peut attendre d'un musée aujourd'hui». La ministre de la Culture, Rachida Dati, s'est quant à elle dite mercredi «dans l'attente» des conclusions de l'enquête administrative sur la sécurité du musée. Celles-ci permettront de «prendre toutes les mesures nécessaires, urgentes, pour remédier à cet échec sécuritaire», a-t-elle indiqué.