Les Iraniens se sont rendus aux urnes vendredi 18 juin pour élire un nouveau président, sans enthousiasme et surtout sans grandes illusions: Les sondages donnaient en effet le candidat ultraconservateur Ebrahim Raïssi largement favori, avec en toile de fonds les soupçons insistants d'élections truquées. Au point que le président sortant, le modéré Hassan Rohani, n'a pas même attendu les premiers résultats partiels pour déclarer vainqueur cet homme homme persuadé de descendre du prophète Mahomet lui-même et fermement opposé à l'ouverture de son pays aux valeurs non islamiques.
Ebrahim Raïssi est un disciple du guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, qui l’a nommé à la tête du pouvoir judiciaire en 2019. En 1988, le conservateur faisait partie du comité de la mort qui a fait exécuter des milliers de personnes pendant cinq mois sans procès ni verdict. La majorité des victimes de ce «nettoyage politique» faisait partie du plus grand parti d’opposition, les Moudjahidines du peuple. Les partisans de gauche ainsi que les dissidents et les athées ont été également tués.
Un positionnement anti-occidental
Les positions d’Ebrahim Raïssi sont clairement anti-occidentales. Il prône la ségrégation entre les sexes, l’islamisation des universités, la révision d’Internet et la censure de la culture occidentale. Il a déclaré qu’il avait l’intention d’établir «des liens avec tous les pays sauf Israël». Voici ce qu’il déclare à propos de l’accord sur le nucléaire: «Nous respecterons l’accord, mais c’est nous qui fixerons les conditions, pas les États-Unis.»
Les organisations de défense des Droits de l’Homme l’accusent de crimes contre l’Humanité et il a déjà été sanctionné par Washington et l’Union européenne.
Il y a quatre ans, Ebrahim Raïssi s’était déjà présenté, sans succès à l’époque, comme candidat à la présidence contre Hassan Rohani. Il est marié à la professeure Jamileh Alamolhoda, avec qui il a deux filles.
Des candidats soigneusement sélectionnés
La sélection des candidats à l’élection présidentielle est limitée et contrôlée en Iran. Sur 552 candidats masculins et 40 femmes, les membres du Conseil des gardiens de la Constitution n’avaient admis que sept candidats qui satisfaisaient leurs exigences. Quatre sont restés en lice pour l’élection.
Tous les autres n’ont pas satisfait aux critères de «qualifications idéologiques» et de «loyauté» ou ont osé remettre en question la direction avisée du régime par Ali Khamenei. Ainsi, l’ancien président du Parlement Ali Larijani et le vice-président Eshagh Jahangiri n’ont pas été autorisés à se présenter aux élections. Tous deux sont considérés comme modérés et auraient voulu poursuivre le parcours d’Hassan Rohani. Ce dernier a lui-même protesté auprès du Guide suprême Ali Khamenei à propos de ce refus.
«La nation» a vaincu la «propagande»
La «nation iranienne a démontré à l'occasion de la présidentielle qu'elle avait vaincu «une fois de plus» la «propagande des médias mercenaires de l'ennemi», a déclaré samedi le guide suprême iranien Ali Khamenei au lendemain du scrutin.
Avant l'élection, M. Khamenei avait exhorté à de nombreuses reprises ses compatriotes à faire échouer une campagne d'appels au boycottage du scrutin relayée par l'opposition en exil. Les résultats presque définitifs confirment la victoire de l'ultraconservateur Ebrahim Raïssi au premier tour, mais les autorités n'ont pas encore donné d'estimation de la participation, qui menace d'être faible étant donné le mécontentement de la population face à cette élection savamment contrôlée par le régime.
(fel/daj/ATS)