Conséquence sur la santé mentale et physique
L'hyperconnexion, ce fléau dangereux pour les salariés et les entreprises

Une étude de Microsoft révèle que les travailleurs sont interrompus toutes les deux minutes par des notifications. En France, 65% des salariés se disent dépendants aux écrans, avec des effets négatifs sur le sommeil et la concentration.
Publié: 07:47 heures
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La connexion permanente aux écrans au travail aurait de lourdes conséquences sur la santé mentale et physique.
Photo: AFP
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AFP Agence France-Presse

Courriels, notifications, visioconférences... La connexion permanente aux écrans et la multiplication des moyens de communication engendrent des journées de travail «infinies» aux interruptions permanentes, avec de lourdes conséquences sur la santé mentale et physique, alertent des experts et plusieurs études récentes.

Interrompus toutes les deux minutes

Selon un récent rapport mondial de Microsoft, qui a mesuré l'utilisation des outils numériques par 31'000 «travailleurs du savoir» dans 31 pays, «un employé moyen reçoit désormais 117 e-mails et 153 messages Teams par jour». Durant les heures de travail, les salariés «sont interrompus en moyenne toutes les deux minutes - 275 fois par jour - par des réunions, des e-mails ou des notifications de chat», d'après cette étude réalisée sur la base de «signaux de productivité Microsoft 365 agrégés et anonymisés» par le géant américain du logiciel.

L'hyperconnexion allonge considérablement la journée de travail: la société indique que «40% des employés consultent leurs e-mails avant 6h du matin», et qu'en plus des pics d'activité observés jusque-là en matinée et en début d'après-midi vient s'en ajouter un autre en soirée, 29% des employés consultant leurs e-mails vers 22h.

65% de salariés dépendants

En France, 65% des salariés se disent dépendants aux écrans et leur entreprise n'agit pour limiter leur connexion que pour 16% d'entre eux, selon une étude réalisée par Viavoice pour le cabinet de conseil en prévention santé Verbateam.

Aussi les trois quarts des 1000 personnes interrogées pour cette étude déclarent avoir «déjà ressenti des effets négatifs liés à leur usage numérique», avec notamment des troubles du sommeil (pour 76%), des difficultés de concentration (77%), un sentiment de pression constante (78%) ou de «stress et anxiété face aux sollicitations numériques».

«On voit ce phénomène non seulement s'aggraver, mais il y a aussi une tendance assez étonnante à la banalisation, voire la valorisation de cette hyperconnexion en entreprise», indique à l'AFP la directrice générale de Verbateam Flore Serré. «Il y a vraiment une pratique qui devient addictogène», selon elle, l'addiction étant définie comme «un besoin compulsif, un usage chronique et surtout, une perte de contrôle».

«Les entreprises de services sont beaucoup plus impactées que les entreprises qui ont des régimes de 3x8», relève de son côté la présidente de la Fédération française des intervenants des risques psychosociaux (Firps) Isabelle Tarty. «Avant on allait chez le client, on avait un rendez-vous le matin, un rendez-vous l'après-midi, mais ça n'était pas quatre à cinq grosses réunions dans la même journée. En termes de charge mentale, ça n'a pas encore été très bien analysé», dit-elle.

35-45 plus touchés

Isabelle Tarty ajoute avoir même rencontré des chauffeurs de bus et de métro «qui se mettent à avoir à traiter des mails à l'issue de leur travail». «Contrairement à ce qu'on pense, ce n'est pas les plus jeunes générations qui sont les plus touchées» par l'hyperconnexion, selon Flore Serré, mais «plutôt la tranche du milieu, les 35-45 ans», alors que «les jeunes, finalement, ont un petit peu plus de recul».

Le droit à la déconnexion est loin d'être toujours effectif, malgré les chartes signées en entreprise. Selon le dernier sondage publié lundi par l'Union des cadres et techniciens du syndicat français CGT (Ugict), 67% des cadres «souhaiteraient disposer d'un droit à la déconnexion effectif afin de préserver leur vie privée et leur santé», une proportion en hausse de 11 points par rapport à 2016. 

Temps de repos non respectés

Quelle que soit la situation dans leur entreprise, les salariés «ont le droit de ne pas être joignables en dehors de leur temps de travail, indépendamment de l'existence d'un accord», rappelle Pauline Mureau, avocate en droit social au cabinet Voltaire Avocats.

«Mais les temps de repos ne sont pas toujours respectés, ce qui génère des contentieux assez importants avec des risques assez significatifs pour les employeurs», d'après l'avocate. Elle explique que le salarié «pourra simplement produire les e-mails qu'il a reçus ou envoyés pour justifier qu'il a été contacté et qu'il répondait à 23 heures et qu'il a répondu à un mail suivant à 8 heures le lendemain».

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