Un tir qui a tout changé
Après l'assassinat de l'influenceur MAGA Charlie Kirk, les Etats-Unis entre sidération et escalade

Les Etats-Unis sont profondément divisés après le meurtre de Charlie Kirk. Mais qu'est-ce qui attend le pays? Visite d'une nation en ruine.
Publié: 18:39 heures
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C'est le choc après le meurtre de Charlie Kirk.
Photo: AP
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Raphael Rauch

Les drapeaux devant la Maison Blanche sont en berne. L'ambiance à Washington est remarquablement calme: les Témoins de Jéhovah proposent des cours bibliques, les évangéliques brandissent un drapeau «Jésus sauve», une pancarte «Jésus t'aime» à la main. Et puis il y a Don Folden, figure familière de Washington. Installé sur le trottoir, ce militant pacifique tient une pancarte: «Arrêtez de vous haïr parce que vous êtes en désaccord.»

Don Folden dit vouloir apporter la paix entre les peuples. Depuis une petite enceinte, il diffuse les hymnes nationaux du monde entier – y compris celui de la Suisse. Vendredi matin, à 10h45, le «Cantique suisse» résonne ainsi devant la Maison Blanche.

Que pense Don Folden de l'attentat contre Charlie Kirk? «Horrible», répond le retraité. Mais il ne croit pas que la situation aux Etats-Unis va désormais s'envenimer. «Nous avons besoin de moins de haine, de plus d'amour», déclare Don Folden.

Pour Trump, Charlie Kirk est un «martyr de la vérité»

A quelques mètres de là se trouve un stand de protestation. «Trump sème la haine», peut-on lire sur un panneau aux couleurs de l'arc-en-ciel. «Ensemble, nous pouvons mettre fin au plus grand shitshow du monde.» Anna, 38 ans, est critique: «Quand la politicienne démocrate Melissa Hortman a été assassinée, il n'y a pas eu de deuil national.»

A plus de 3000 kilomètres de Washington, dans l’Utah, le meurtre de Kirk Charlie nourrit déjà un récit héroïque dans les rangs pro-Trump. Pour les partisans de «Make America Great Again», le fondateur de Turning Point USA devient un messie tombé pour libérer l’Amérique de ses supposés péchés «woke». Donald Trump l’a qualifié de «martyr de la vérité» et lui a décerné à titre posthume la Médaille de la Liberté.

Un rempart contre les organisations étudiantes de gauche

La veuve de Charlie Kirk, Erika, a réagi avec reconnaissance. «Président Trump, Charlie t'aimait et il savait que tu l'aimais», a déclaré la veuve dans une vidéo. «Charlie, je te promets que je ne laisserai jamais mourir ton héritage. Je te promets que je ferai de Turning Point USA la plus grande organisation que ce pays ait jamais connue.»

L'ancienne Miss Arizona et joueuse de basket, chrétienne évangélique comme son mari assassiné, a désormais une mission: perpétuer l'héritage de Charlie Kirk, qui menait une croisade contre tout ce qui lui semblait woke – des personnes transgenres aux migrants en passant par les femmes qui préféraient faire carrière plutôt que de donner des enfants à leur mari. Turning Point USA se considérait comme un rempart contre les organisations étudiantes de gauche.

Kirk faisait l'éloge de la politique migratoire suisse

Charlie Kirk est déjà célébré comme un martyr par ses partisans. Un messie moderne qui voulait faire la grandeur d'une Amérique chrétienne et blanche. Que Kirk ait partagé des conspirations racistes comme la théorie du «grand remplacement», selon laquelle une «élite» voulait remplacer la population blanche par des immigrés, est aujourd’hui largement passée sous silence. Ses appels à organiser de «nouveaux procès de Nuremberg» contre les médecins pratiquant des opérations de réassignation de genre ne sont pas jugés excessifs par ses fidèles, mais cohérents avec son combat.

Jusqu'à présent, Charlie Kirk n'a pas eu d'influence sur la Suisse. Il a certes demandé, lors de la campagne électorale américaine, que les Etats-Unis soient aussi stricts que la Suisse en matière de limitation de l'immigration. A l'époque, le conseiller national de l'Union démocratique du centre (UDC) Pascal Schmid s'y était opposé: selon lui, Charlie Kirk était «mal informé», la Suisse a bel et bien un problème d'immigration. Un membre du mouvement «Turning Point USA» s'est rendu au Forum économique mondial de Davos en 2022. Sinon, aucun lien avec la Suisse n'est connu à ce jour.

«Si tu lis ceci, tu es gay»

Pour les partisans de Charlie Kirk, une chose est sûre: sa mort a un sens. Grâce à l'attentat, le mouvement Turning Point USA est désormais sur toutes les lèvres. «Le combat continue», peut-on lire sur son site web. Sa vision est «vivante et plus forte que jamais. Le feu que Charlie a allumé brûle plus fort que jamais». Sur internet, certains cercles radicaux de la mouvance MAGA appellent déjà à la guerre, alimentant la crainte d’une escalade de violences. Dans les rues de Washington, cette tension reste pourtant invisible. Charlie Kirk avait choisi un autre champ de bataille: les réseaux sociaux, où il touchait surtout celles et ceux qui se sentaient isolés, exclus, marginalisés ou réduits au silence.

Pendant ce temps, le monde se demande quelles étaient les motivations de l'auteur de l'attentat. Donald Trump souhaite la peine de mort pour le suspect Tyler Robinson. Ce dernier aurait tenu des propos très critiques à l'égard de Charlie Kirk auprès d'un membre de sa famille. Des cartouches portant des inscriptions telles que «Hé, fasciste! Attrape ça!», «Si tu lis ça, tu es gay» et des références à l'hymne partisan «Bella Ciao». La chanson italienne parle de la mort d'un partisan et d'une fleur qui rappelle qu'il est «mort pour notre liberté».

Tyler Robinson, qui voulait stopper l'ascension de Charlie Kirk, pourrait avoir obtenu l'effet inverse avec son assassinat: il va rendre Kirk immortel pour ses partisans.

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