Elle n'était qu'une adolescente lorsqu'elle a mis au monde son bébé. Marina est tombée enceinte sans le vouloir et pour elle, il n'a jamais été question d'avorter. Aujourd'hui, près de vingt ans plus tard, elle revient sur ce qui a été pour elle son plus grand défi en tant que mère.
«C'est arrivé lors de ma première fois. Quand j'ai découvert que j'étais enceinte, j'ai éclaté en sanglots. J'ai paniqué, mais je ne voulais pas avorter. Je ne me suis jamais posée cette question. Au fond de moi, je savais que je voulais garder le bébé. Mes parents ont été très compréhensifs et m'ont beaucoup soutenue. C'est sans doute lié au fait que ma mère a eu son premier enfant à 17 ans. Tout comme ma grand-mère, elles ont toutes deux été des mères adolescentes. Est-ce une coïncidence ou le destin, je ne peux pas répondre à cette question... Bien sûr, nous en avons parlé. Mais je n'ai jamais prévu de répéter ce schéma.»
«Mon petit ami de l'époque avait 18 ans, c'est-à-dire deux ans de plus que moi. Il était donc encore très jeune. Nous avons vécu ensemble pendant ma grossesse et il m'a soutenue. Dans une petite ville du Valais, c'était un scandale: j'étais visée par toutes sortes de commérages. J'étais la traînée qui l'avait déjà fait à 16 ans, ça se voyait avec mon ventre rond. J'en ai beaucoup souffert, même durant ma formation. J'étais en apprentissage de vendeuse, que j'ai quand même pu terminer, grâce à l'aide de mes parents.»
Tirer son lait à l'école
«Le plus difficile pour moi, c'étaient les chuchotements, les regards qui en disent long – je me sentais jugée, au travail, à l'école. Souvent, j'avais honte. Surtout quand le bébé est arrivé et que j'ai dû tirer mon lait à l'école, dans les toilettes, là où tout le monde le remarquait.»
«L'accouchement s'est bien passé, on s'est occupé de moi avec attention et je me suis sentie respectée, prise au sérieux. C'était terrible après, avec les autres mères présentes dans la pièce. Il y avait à nouveau ces regards. C'était tellement évident qu'elles me critiquaient. C'était vraiment méchant. Qui a dit qu'on ne pouvait pas être une bonne mère à 17 ans? J'ai vu des trentenaires qui n'avaient aucune idée de la façon dont elles devaient tenir leur bébé. Toute mère est une débutante et doit apprendre à s'occuper d'un bébé, quel que soit son âge.»
«Quand Lydia est arrivée, les choses se sont compliquées avec son père. Elle avait quatre mois lorsque j'ai rompu avec lui. Il devenait de plus en plus agressif et même violent, du moins envers moi. Je ne voulais plus jamais avoir affaire à lui. Lydia n'a plus eu non plus de contact avec lui, à la demande de son père. Mais elle a souvent demandé à voir son papa, un rôle que mon père a un peu endossé. Pour moi, il était important qu'elle ait une référence masculine dans sa vie.»
Perte de nombreuses amies
«Pendant que mes amies parcouraient le monde à 17 ans, sortaient et tombaient amoureuses, j'étais à la maison avec mon bébé. Je ne trouvais pas cela grave, j'avais choisi d'être mère. Et j'en profitais. Cependant, j'ai perdu beaucoup de contacts à l'époque, je menais une vie complètement différente de celle de mes amies du même âge. Je me suis rattrapée lorsque Lydia a grandi: je sortais de temps en temps en discothèque. Je n'ai volontairement pas eu de nouvelle relation. Ma première expérience avec un homme a été très difficile, et je ne voulais pas revivre ça. Je voulais être à 100% là pour Lydia et la protéger.»
«J'ai longtemps lutté contre les préjugés, même plus tard lorsque Lydia était plus âgée. Souvent, ses professeurs ne me prenaient pas au sérieux. Ils disaient: 'Ah oui, vous l'avez eue si tôt' ou 'Elle n'a pas de père'. Dès que quelque chose ne va pas, le sujet revient immédiatement sur ma jeune maternité. Cette stigmatisation est vraiment difficile à gérer. Mais ça en vaut la peine. Aujourd'hui, Lydia a 18 ans et je suis extrêmement fière d'elle. C'est une fille formidable et je lui souhaite de pouvoir suivre son propre chemin, comme elle le souhaite.»
Marina a été photographiée pour le projet «Girl Interrupted» de Felix Bucher, réalisé pour l’ONG On Board Together.