Un «déni démocratique»?
La Municipalité de Lausanne promet à ses policiers un refus du désarmement

La Municipalité de Lausanne s'oppose au désarmement de sa police municipale, malgré le postulat approuvé par le Conseil communal. Dans une lettre aux agents ce vendredi, le syndic Grégoire Junod réaffirme le «monopole de la force publique, symbolisé par l’équipement».
Publié: 31.01.2025 à 10:59 heures
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Dernière mise à jour: 31.01.2025 à 15:35 heures
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Le Conseil communal de Lausanne souhaiterait désarmer la police municipale. Mais la Municipalité et le syndic du chef-lieu vaudois Grégoire Junod s'interposent.
Photo: KEYSTONE
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Léo MichoudJournaliste Blick

La Municipalité et le syndic de Lausanne caressent leurs policiers municipaux dans le sens du poil. Il faut dire que le postulat du Vert Ilias Panchard, plébiscité par le Conseil communal à la mi-janvier, a enflammé les cœurs des agents, inquiets que leur arme disparaisse de leur ceinture. Ce vendredi matin du 31 janvier, une missive est parvenue à l’ensemble des agents du chef-lieu vaudois pour les rassurer, a appris Blick.

«Par le présent courrier, la Municipalité tient à vous informer qu’elle entend donner une suite négative à ce postulat et qu’elle a chargé la Direction de la sécurité et de l’économie de préparer une réponse dans ce sens», commence la lettre signée par le syndic socialiste de Lausanne Grégoire Junod et son secrétaire. De quoi sans doute réjouir aussi bien les syndicats de police, que la droite vaudoise. Le municipal libéral-radical (PLR) à la tête de la Sécurité Pierre-Antoine Hildbrand – qui s’est fermement opposé à la décision des élus communaux lausannois – devra donc répondre au postulat sur le plan politique.

Le flingue, symbole indéboulonnable

«Sur ce sujet, il y a beaucoup d’inquiétudes et aussi une certaine incompréhension, à la fois au sein du corps de police et au sein de la population, justifie Grégoire Junod. Dans la mesure où la position du collège municipal est très claire, il nous apparaissait utile de clarifier les choses rapidement.» Faisons le tour des clarifications apportées par ce courrier.

Le texte des autorités lausannoises admet d’abord que «la majorité des interventions de police ne nécessite pas l’usage de la contrainte, et bien heureusement d’armes à feu». En effet, le dernier coup tiré lors d’une intervention par un policier municipal daterait de 2007, selon les documents officiels. L’adresse aux agents continue: «Il n’en reste pas moins que le monopole de la force publique, symbolisé par l’équipement, est un pilier de l’autorité que vous représentez.»

Ilias Panchard (Les Vert-e-s) dénonce un «déni démocratique» qui «fait pitié»

Amené, forcément, à réagir à la prise de position de la Municipalité, le conseiller communal vert Ilias Panchard n'y va pas de main morte: «Je constate un déni démocratique de la Municipalité. Cette communication bâclée fait pitié.» Pour lui, le courrier du syndic Grégoire Junod en réaction à son postulat «Projet pilote pour une police de proximité sans arme à feu» montre «que la majorité de l'Exécutif préfère étouffer un débat politique légitime dès qu'il est sous pression».

L'élu écologiste s'interroge: «C'est presque à se demander si c'est la Municipalité qui dirige le corps de police ou l'inverse». Il espère que la Ville «répondra maintenant tout aussi vite à toutes les demandes du Conseil communal pour la solidarité, le climat et l'égalité», bien qu'il «en doute fortement». Quelle que soit la réponse qui sera donnée à son postulat, Ilias Panchard fait savoir qu'il continuera à s'engager «pour une vraie police de proximité qui prévient les conflits et apaise les tensions».

En outre, il se dit «scandalisé par le parallèle indécent que le Municipal Hildbrand a osé faire entre mon postulat et les féminicides». Dans une interview parue jeudi dans Blick et écrite par L'illustré, en réaction à la tentative récente de féminicide, Pierre-Antoine Hildbrand (PLR) jugeait la décision du Conseil communal d'accepter le postulat du Vert «irrespectueuse des femmes et des hommes sur le terrain». Pour Ilias Panchard, une telle réaction de son adversaire politique est «indigne de sa fonction».

Amené, forcément, à réagir à la prise de position de la Municipalité, le conseiller communal vert Ilias Panchard n'y va pas de main morte: «Je constate un déni démocratique de la Municipalité. Cette communication bâclée fait pitié.» Pour lui, le courrier du syndic Grégoire Junod en réaction à son postulat «Projet pilote pour une police de proximité sans arme à feu» montre «que la majorité de l'Exécutif préfère étouffer un débat politique légitime dès qu'il est sous pression».

L'élu écologiste s'interroge: «C'est presque à se demander si c'est la Municipalité qui dirige le corps de police ou l'inverse». Il espère que la Ville «répondra maintenant tout aussi vite à toutes les demandes du Conseil communal pour la solidarité, le climat et l'égalité», bien qu'il «en doute fortement». Quelle que soit la réponse qui sera donnée à son postulat, Ilias Panchard fait savoir qu'il continuera à s'engager «pour une vraie police de proximité qui prévient les conflits et apaise les tensions».

En outre, il se dit «scandalisé par le parallèle indécent que le Municipal Hildbrand a osé faire entre mon postulat et les féminicides». Dans une interview parue jeudi dans Blick et écrite par L'illustré, en réaction à la tentative récente de féminicide, Pierre-Antoine Hildbrand (PLR) jugeait la décision du Conseil communal d'accepter le postulat du Vert «irrespectueuse des femmes et des hommes sur le terrain». Pour Ilias Panchard, une telle réaction de son adversaire politique est «indigne de sa fonction».

Une affirmation tirée de la Constitution vaudoise, qui évoque ce «monopole de la force publique» en son article 44. «Les activités de la police de Lausanne s’inscrivent dans le cadre de l’organisation policière vaudoise et du droit cantonal, qui prescrit le port d’arme comme principe général», indique encore le courrier.

Remerciements sans désarmement

Dans son intervention, rendue publique dans la matinée, la Municipalité «rappelle qu’il existe déjà, à Lausanne, plusieurs unités en uniforme et non armées dont le rôle est complémentaire à celui de la police mais dont les fonctions, le rôle et la formation diffèrent clairement de ceux des policières et policiers». Elle pense ici aux correspondants de nuit, aux agents de la propreté urbaine, mais surtout aux agents d’accueil et de sécurité.

La Municipalité estime qu’en tant que dépositaires de «la responsabilité de la sécurité publique», les agents de police municipaux doivent «demeurer armés pour leur protection comme pour celle de la population.» Elle rappelle le «contexte sécuritaire difficile» qui touche Lausanne à l’heure actuelle en raison du deal de rue et de la «surcharge du service pénitentiaire».

Décision de droite dans une Muni de gauche?

La prise de position de la Municipalité pourrait étonner, étant donné qu'elle partage avec le Conseil communal sa majorité de gauche. Le socialiste Grégoire Junod s'explique au nom de son collège. «Les discussions du Conseil municipal sont évidemment confidentielles, mais la décision fut claire et collégiale. Le PLR essaie souvent de faire croire dans le débat public qu'il y aurait de grosses divergences en matière de sécurité publique au sein de la municipalité de Lausanne, mais nous sommes en réalité parfaitement alignés, qu’il s’agisse de la lutte contre de deal de rue ou du renforcement de la présence policière en ville.»

Enfin, le collège d’élus lausannois termine en réitérant aux forces de l’ordre «sa pleine confiance, consciente de l’ampleur du travail actuel en lien notamment avec les enjeux de deal de produits stupéfiants et de l’intensification de la présence policière en rue». Les remerciements sont actés, qu’en sera-t-il du débat sur le désarmement?

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