Le projet phare de la nouvelle conseillère fédérale socialiste Elisabeth Baume-Schneider a connu un échec retentissant. La ministre de la Justice voulait construire des villages de conteneurs sur des terrains de l'armée et créer ainsi 3000 places pour les requérants d'asile. Coût: 133 millions de francs.
Mais le Conseil des Etats a balayé la proposition. Et Elisabeth Baume-Schneider doit maintenant tout recommencer. A quoi faut-il s'attendre?
Réunion de crise
Des documents internes de l'Etat-major spécial Asile, un comité de crise composé de représentants de la Confédération et des cantons, montrent à quel point l'ambiance est tendue en coulisses. Si une alternative aux villages de conteneurs n'est pas trouvée rapidement, la Confédération «ne pourra plus remplir pleinement ses tâches en matière d'asile», selon le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM). Les cantons et les communes sont déjà à bout de souffle.
Le 14 juin, les principaux acteurs du domaine de l'asile se sont réunis au Bernerhof, un ancien hôtel de luxe bernois qui sert aujourd'hui de siège au Département fédéral des finances. Des dirigeants des départements de la justice, de l'armée et du social étaient présents, accompagnés de la magistrate jurassienne Elisabeth Baume-Schneider. La conseillère fédérale a insisté sur la gravité de la situation et a suggéré une «séance extraordinaire» pour fin août.
Cette réunion devrait réunir des représentants de la Confédération, des directeurs cantonaux de la justice, de la police et des affaires sociales, ainsi que les dirigeants des communes et des villes. Objectif: un «échange sur la planification de la prévention» avant la prochaine session parlementaire. Le porte-parole du SEM Reto Kormann confirme que la rencontre est prévue «après les vacances d'été».
Risque de pénurie accru
Le temps presse. Selon les prévisions des fonctionnaires de l'asile, une pénurie de places menace déjà à partir de septembre. «Si, à capacité d'hébergement constante, le nombre de demandes d'asile devait augmenter brusquement à partir de juillet, les places disponibles pourraient être épuisées à la mi-septembre», rapporte Reto Kormann.
Comment créer des places supplémentaires? L'Etat-major spécial Asile a déjà pris des premières mesures: le SEM doit louer des abris collectifs de protection civile (PC) aux cantons et les exploiter, si nécessaire, comme de petits centres d'asile fédéraux. C'est à la Confédération qui se chargerait des programmes d'occupation, de la scolarisation des enfants et des soins médicaux.
Ce nouveau plan constitue un revirement. Lors d'une réunion du 1er juin, les représentants de l'Etat-major spécial Asile s'étaient encore clairement prononcés contre l'option des abris PC. Le procès-verbal que Blick a pu consulter en vertu de la loi sur la transparence le démontre clairement: «Les abris de protection civile ne sont pas une option du point de vue de l'Etat-major spécial. Conformément à la planification d'urgence, ceux-ci sont avant tout à la disposition des cantons en tant que réserve d'hébergement et ces derniers en ont un besoin urgent en cas de situation critique.»
Les cantons montent au front
Le fait que les cantons doivent venir au secours de la Confédération risque d'alourdir davantage l'ambiance déjà tendue. Gaby Szöllösy, secrétaire général de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales, salue la «collaboration constructive», mais demande que la Confédération renonce à son exigence de cofinancement de l'exploitation des installations fédérales avec les cantons: «Cela va à l'encontre de la répartition des tâches établie et il n'existe aucune base légale pour cela.»
En outre, le SEM devrait renoncer à l'attribution anticipée de demandeurs d'asile aux cantons, selon Gaby Szöllösy, car elle «sape le système des procédures accélérées».
Le porte-parole du SEM Reto Kormann a une vision différente: «La Confédération et les cantons tentent de se serrer les coudes, bien que les abris PC soient réservés aux cantons sur la base de l'ordonnance d'urgence sur l'asile.» L'objectif serait de créer au total 3000 places d'hébergement supplémentaires d'ici au début de l'automne – notamment pour éviter une attribution prématurée aux cantons. La Confédération ne peut toutefois pas l'exclure, même si des places supplémentaires sont créées rapidement.
L'armée se dit également sur-sollicitée
Outre les cantons, l'armée doit donc également apporter son aide. Selon l'Etat-major spécial Asile, la Confédération va sonder l'armée dans les semaines à venir pour voir dans quelle mesure il serait possible d'utiliser des logements destinés à la troupe. L'armée cède déjà temporairement 3800 places d'hébergement au SEM. Et ce, bien que les locaux disponibles soient également rares à l'armée.
Il y a quelques semaines à peine, le Département fédéral de la défense (DDPS) tirait déjà la sonnette d'alarme: dans une lettre adressée à la Commission des finances du Conseil des Etats, les collaborateurs de Viola Amherd soulignaient le risque que les écoles de recrues ne puissent plus être organisées dans leur intégralité si l'armée devait continuer à mettre à disposition autant de places pour des requérants d'asile.