Fin septembre, des parents de la commune genevoise de Plan-les-Ouates ont reçu un singulier courrier d'origine bâloise. Son objet: les mettre en garde contre une lecture de contes animée par une drag queen au Jardin d'aventure plan-les-ouatien, le 4 octobre.
A l'origine de cette missive, l'association Initiative de protection n'y va pas par quatre chemins: «Vous souhaitez peut-être paraître cool, non homophone (sic) et ne pas être traité de Nazi, mais vous pouvez aussi laisser grandir votre enfant pour qu'il devienne une personne normale, sans qu'il soit exposé à des actes de nature sexuelle ou homosexuelle. Par conséquent, gardez vos enfants à la maison.» La section cantonale de l'Union démocratique du centre (UDC) a quant à elle embrayé avec une motion visant à interdire aux Genevois de moins de 16 ans tout spectacle d'homme travesti en femme.
Blick s'est rendu à Plan-les-Ouates lors de la semaine thématique Plein-les-genres, pendant laquelle avait lieu cette fameuse lecture de drag queen. Nous y avons rencontré Xavier Magnin, conseiller administratif centriste en charge de cet évènement. Ce député et ancien candidat au Conseil d'État s'oppose clairement au parti conservateur. Interview.
Xavier Magnin, c'est quoi ce festival Plein-les-genres?
Il y avait passablement de questions pour les jeunes de 6 à 12 ans sur le genre, sur la définition d'hommes ou de femmes. C'est donc tout un travail qui a été mené durant l'année, avec ce festival comme point culminant. Le genre et le questionnement sur le genre sont ainsi abordés à travers des lectures, du théâtre, du cinéma.
Pourquoi mobiliser la Commune sur ce thème?
Pour permettre la compréhension et l'acceptation de cette homo-diversité qu’on a parfois de la peine à comprendre et qu'on doit expliquer aux enfants. Notre monde est fait de diversité et il faut accepter toutes les personnes telles qu'elles sont.
Que répondez-vous aux parents qui ont reçu un courrier leur déconseillant de se rendre à la lecture?
Comme le disait Voltaire, je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous puissiez le dire. Donc ces personnes ont le droit de donner leur avis, par le biais d'un courrier personnalisé sur la commune. Tout comme la drag queen a également le droit de s'exprimer. On doit avoir les deux. Et les personnes sont tout à fait libres d'aller à ce spectacle ou non. Je conseillerais donc aux parents de se faire leur propre idée, dans le dialogue et sans affrontement.
L'UDC dénonce une «complicité d'endoctrinement woke» de la part de votre Commune, c'est le cas?
Non, il ne s'agit pas du tout d'endoctrinement. Il s'agit d'amener des réponses à des questionnements qui se posent. C'est une approche pédagogique. Le but est que chacun puisse se faire sa propre idée et non de dire: «Ça c'est bien et ça c'est pas bien».
Vous êtes député du Centre au Grand Conseil, où l'UDC compte déposer une motion pour interdire les spectacles d'homme travesti en femmes aux moins de 16 ans. Quelle est votre position sur cette proposition de loi?
J'y suis clairement opposé. Je vous rappelle qu'il y a des moments sombres de l'histoire où on a brûlé des livres, où on interdisait tout. Ma position reste: «Il faut interdire d'interdire.» C'est une position qui permet d'avoir une vie apaisée dans la commune et le canton. Réagir comme politiquement comme le fait l'UDC est une erreur, parce qu'on ne voit pas les conséquences d'une telle interdiction. On ne pourrait plus avoir de personnes travesties à la Revue de Genève par exemple, ou on l'interdirait aux moins de 16 ans. Cela serait catastrophique au niveau culturel comme au niveau sociétal!
Comment expliquez-vous cette fronde anti-drag queens?
On est en période électorale, il faut faire du buzz et le buzz fonctionne. Malheureusement, on en est là, alors qu'on pourrait avoir une réflexion posée, comme le propose d'ailleurs le Centre.