Le transfert de Granit Xhaka (32 ans) à l’AC Milan n’est pas encore officiel. Mais la partie rouge et noire de la capitale de la mode se prépare déjà à accueillir à bras ouverts le capitaine de la Nati. Fulvio Collovati (68 ans), lui aussi, se réjouirait si l’accord venait à être conclu. L’ancien défenseur de Milan, champion du monde 1982 avec l’Italie et consultant télé de longue date, place de grands espoirs en lui.
Blick: Monsieur Collovati, Xhaka est-il l’homme qu’il faut à Milan?
Fulvio Collovati: Si Massimiliano Allegri le veut, alors c’est une garantie.
Qu’attend Milan de Xhaka?
La saison dernière a été catastrophique, avec une huitième place au classement. Difficile de faire pire. Mais ce que l’on attend de Xhaka est très clair: qu’il apporte la bonne mentalité. C’est un joueur de classe internationale qui m’a impressionné à chaque fois que j’ai commenté ses matches avec Leverkusen ces deux dernières saisons.
Quels seront les enjeux pour Milan la saison prochaine?
Il faudra d’abord clarifier les ambitions de la direction du club. Mais avec Allegri sur le banc, Igli Tare comme directeur sportif et peut-être bientôt Xhaka, terminer dans le top 4 et décrocher une qualification pour la Ligue des champions semble tout à fait envisageable.
Le club est en pleine refonte de son milieu de terrain. Il ne mise pas uniquement sur Xhaka, mais serait aussi proche de faire venir Luka Modric. À eux deux, ils totaliseront 73 ans lorsque la saison battra son plein. Un tel duo est-il encore prometteur aujourd’hui?
L’âge m’importe peu. Si un joueur sait jouer au football, qu’il ait 38, 39 ou 40 ans ne change rien. Si tous deux portent le maillot de Milan la saison prochaine, ce sera un milieu de terrain de très haut niveau. Pour amener un peu de vivacité, il faudra sans doute un autre profil. Peut-être un autre Suisse, comme Ardon Jashari (rires). Il y a d’ailleurs des rumeurs à son sujet.
Interrogé à ce sujet, Collovati précise que l’âge n’est un problème que lorsqu’il manque la qualité. Pour des joueurs comme Xhaka et Modric, ce n’est pas un souci. En revanche, il regrette que la promotion des jeunes en Italie soit bloquée depuis des années. Il juge inacceptable que l’on préfère recruter à l’étranger plutôt que de former ses propres talents. Selon lui, cette tendance a particulièrement nui à la sélection nationale.
Le football italien traverse une nouvelle période difficile. Comment avez-vous vécu l’humiliation 3-0 face à la Norvège?
Ce n’est que l’ampleur du score qui m’a surpris. Ce revers reflète ce qui se passe en Italie depuis des années. On parle beaucoup, mais rien ne change. La fédération promet des réformes, mais elles ne se concrétisent jamais. Le travail de formation a été négligé, et nous avons raté le renouvellement de génération. Résultat: on retrouve encore des joueurs de 37 ans comme Acerbi en équipe nationale.
Pourquoi les clubs misent-ils sur des anciennes stars comme Kevin De Bruyne (33 ans, Naples), Edin Dzeko (39 ans, probable transfert à la Fiorentina) ou Modric, plutôt que sur leurs jeunes?
Les clubs privilégient les résultats à court terme. Ou alors, ils achètent des joueurs pour les revendre avec une plus-value. C’est plus rentable à court terme et demande moins d’efforts que d’investir durablement dans la formation.
Quels autres problèmes identifiez-vous?
L’Italie était autrefois le pays des défenseurs. Le monde entier nous enviait pour cela. Aujourd’hui, nous ne formons plus de défenseurs de niveau international. On préfère les faire venir de l’étranger. Cela en dit long.
Gennaro Gattuso peut-il changer les choses à la tête de la Squadra Azzurra?
Il pourra transmettre aux joueurs ce que cela signifie de représenter l’Italie. Gattuso est l’exemple parfait de ce qu’on peut accomplir avec une volonté de fer. Techniquement, ce n’était pas le plus doué, mais il a tout gagné grâce à sa combativité.
L’état d’esprit des joueurs actuels fait-il défaut?
Clairement. À mon époque, chaque convocation était un rêve devenu réalité. Il m’est arrivé de rejoindre l’équipe nationale en étant blessé. Aujourd’hui, à la moindre douleur, certains préfèrent rentrer chez eux. La Squadra Azzurra n’est plus une priorité pour tous, et c’est triste.
La qualification pour la Coupe du monde est-elle menacée?
Je ne me fais pas d’illusions. Nous ne finirons pas premiers de notre groupe. Selon moi, nous serons deuxièmes et devrons passer par les barrages. Et là, tout peut arriver. Il y a quatre ans, tout le monde pensait que nous allions battre facilement la Macédoine du Nord… On sait tous comment cela s’est terminé.