La draft NBA, ce monde impitoyable, affronté en 2006 pour Thabo Sefolosha, en 2024 pour Kyshawn George. Réunis ce dimanche au Musée Olympique pour une rencontre exceptionnelle avec le public, les deux hommes sont revenus sur cet épisode marquant de leur vie, qu'ils ont vécu bien différemment. «Personnellement, je me rappelle de quasiment tout», assure le Chablaisien, lequel a un avantage sur son aîné, puisque ce jour, très important, il l'a vécu voilà une année à peine. «C'est prenant, c'est sûr, ce sont beaucoup d'émotions d'un coup», explique celui qui a été choisi en 24e position par les New York Knicks.
Les Knicks, juste pour la photo
«Mais je savais en mettant la casquette que ce n'était pas la bonne!», a-t-il confié ce dimanche. Son agent l'avait prévenu cinq minutes avant que les Knicks allaient l'échanger avec Washington. Mais, tout de même, il a fallu jouer le jeu face à Adam Silver, le grand manitou de la NBA, pour la traditionnelle photo et les premiers mots, une épreuve que vient de traverser Yanic Konan Niederhäuser.
Thabo Sefolosha, en 2006, a vu lui sa cote s'envoler grâce à son travail acharné. Le Vaudois était déjà âgé de 22 ans et jouait en Italie, où son nom commençait à buzzer. Voilà deux décennies, aucun Suisse n'avait encore jamais joué en NBA, et les Européens étaient bien moins nombreux qu'aujourd'hui. Mais ses performances ont attiré l'attention des scouts américains.
Alors, un été, il s'envole pour les Etats-Unis, pour se faire repérer encore mieux. «J'ai enchaîné 17 work-outs en 30 jours! Je voulais me faire connaître, que toutes les franchises puissent voir mes qualités. C'était éreintant, un vrai marathon.» Mais ses efforts paient. «D'après les prévisions, je devais être drafté au milieu du deuxième tour. Mais ça, c'était avant mon voyage aux Etats-Unis. J'étais dans une bulle, comme en mission, je ne faisais que ça. Et je me suis fait remarquer positivement.» Au point d'être drafté en 13e position par Philadelphie.
«Je fais quoi avec la casquette?»
«Mais moi, contrairement à Kyshawn, je ne savais rien, j'étais sûr que j'allais jouer pour les Sixers! Quand j'ai mis la casquette, c'était sincère», rigole-t-il franchement. Il donne alors quelques interviews et c'est là qu'il apprend que Chicago a acquis ses droits. «Je n'en avais aucune idée. Ma première pensée, c'était: je fais quoi avec la casquette?» Eclats de rire dans la salle.
La NBA et son business sont ainsi faits qu'il n'y a pas à réfléchir. «Tu as le General Manager au téléphone, il te dit que l'avion est à 9h le lendemain et qu'à 12h tu es attendu à la salle.» Direction donc les Bulls, la mythique franchise de Toni Kukoc et de Michael Jordan.
La polémique Ace Bailey
Les deux hommes, dont l'émotion est encore perceptible en évoquant ce grand jour, peuvent-ils comprendre l'attitude d'Ace Bailey, cet Américain qui a ostensiblement tiré la gueule en apprenant qu'Utah, une franchise peu attractive à ses yeux, l'avait drafté? Prudent, ils s'abstiennent de le juger.
«Les choses changent, elles évoluent pour le bon et le moins bon. Et il y a beaucoup de choses qu'on ne connaît pas, il peut y avoir des représentants qui t'influencent... C'est un jeune de 18 ans, il vient de se faire drafter, j'ai un peu de peine à croire que ce soit lui qui prenne 100% des décisions qui le concernent. Il y des gens autour de lui et des paramètres qu'on ignore», répond Kyshawn George.
Thabo Sefolosha a apprécié Salt Lake City
Avec le recul de celui qui a mis fin à sa carrière et a sa liberté de parole, Thabo Sefolosha va un peu plus loin. «Ce n'est pas complètement nouveau, il y a déjà eu ça à l'époque. Chaque individu prend ses décisions. Moi, je n'étais pas dans une position où je pouvais faire la fine bouche, mais c'est un plan de carrière, c'est du business. Je n'ai pas envie de porter un jugement, d'être critique. C'est le choix du joueur. Ce que je peux dire, c'est que moi, j'aurais été content avec n'importe quelle équipe.» Le Vaudois a d'ailleurs joué aux Utah Jazz et a donc vécu à Salt Lake City. «C'est une ville magnifique. J'ai beaucoup apprécié mes deux ans là-bas. Après, chacun aime ce qu'il aime...»