Lettre de sa maman
Gino Mäder disparaissait il y a deux ans: «Une partie de moi s'en est allée»

Voilà deux ans que Gino Mäder (1997-2023) a disparu après sa chute tragique sur le Tour de Suisse. Sa mère, Sandra Mäder, lui a écrit une lettre émouvante. La voici.
Publié: 13:31 heures
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Sandra Mäder écrit une lettre émouvante en hommage à son fils.
Photo: BENJAMIN SOLAND
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Mathias Germann

Il y a deux ans jour pour jour, Gino Mäder disparaissait après une terrible chute sur le Tour de Suisse. Le 19 juin, l'épreuve rendra hommage au Suisse sur l'Albula. Son père Andreas sera alors présent, tout comme sa famille. Sa mère, Sandra Mäder, a écrit une lettre émouvante à la mémoire de son fils. Blick la publie:

Cher Gino,

Le temps ne guérit pas les blessures. Même après deux ans, la douleur ne s'atténue pas. Je me souviens très bien avoir regardé l'étape lors de laquelle tu as fait une chute si grave pendant que je passais l'aspirateur dans le salon.

Lorsque les coureurs ont franchi la ligne d'arrivée, j'ai jeté un coup d'œil rapide à l'écran. Je me suis dit: heureusement que tu as franchi la ligne. Mais au même moment, une idée m'a traversé l'esprit: «C'est bizarre, pourquoi enlèves-tu tes lunettes de soleil?» Ton premier geste à l'arrivée a été d'attraper ton ordinateur de bord... Je voulais t'écrire pour te demander si c'était nouveau. Mais je t'avais confondu avec un coéquipier. Tu n'as jamais atteint l'arrivée.

Dans mon ignorance, je suis allée faire des courses. J'étais dans les embouteillages lorsque le premier message est apparu sur mon téléphone portable: «Comment va Gino?» Puis est arrivé le premier appel de ton papa. J'ai tout de suite su que quelque chose n'allait pas.

Le reste n'a été qu'un cauchemar: les premières informations, très vagues. Puis des larmes, des tremblements, des cris. J'ai essayé de me convaincre: ce n'est pas possible, j'ai bien vu Gino franchir la ligne d'arrivée!

J'ai reçu un appel avec un numéro étranger. Et je l'ai ignoré. Je me disais. «ce que je ne sais pas n'est jamais arrivé». Pourtant, j'avais compris depuis longtemps que quelque chose de très grave t'était arrivé, cher Gino. J'ai ignoré le message de ton médecin d'équipe me demandant de le rappeler en disant: «Je ne sais pas parler anglais.» Quand je l'écris maintenant, je t'entends dire: «Maman, l'anglais est plus facile que l'italien.» Mais encore une fois, ce que je ne sais pas n'est pas arrivé...

Ensuite, les événements se sont enchaînés. Longtemps après, j'ai relu les messages Whatsapp que j'ai envoyé ce jour-là et je me suis dit: «Bon sang, ce que j'ai été brève.» Mais je sais que Jasmin, Sandra, Franziska, Gianluca et tous tes autres amis ont compris mes réponses et ne les ont pas prises personnellement. Gino, tu aurais de toute façon dit: «Maman, ne t'inquiète pas, ils t'aiment toujours.»

Le temps ne guérit pas les blessures. Nino de Angelo le chante si bien et sa chanson m'accompagne chaque jour depuis cet instant-là, en Engadine.

Gino, deux ans sans toi. Avec ta disparition, c'est aussi une partie de moi, de nous, qui s'en est allée. Durant ces deux années, j'ai pleuré et lutté comme jamais auparavant. Chaque jour est un combat. Chaque jour est infiniment difficile. Le deuil me fatigue tellement, je suis souvent épuisée.

Aujourd'hui encore, je compose parfois ton numéro pour te dire quelque chose. Je veux te demander si je dois acheter une Fiat 500 ou plutôt une autre voiture. Tu me répondrais sans doute: «Maman, tu ferais mieux de t'acheter une voiture sûre, tu es si souvent en déplacement. Et comment chargerais-tu tes deux boxers dans la petite Fiat?»

Cher Gino, tu nous manques. Moi, ton papa, Laura, Jana et Lisa, Rinaldo et Elias. Lino, Vivienne et Mona ne cessent de parler de toi. Tu me manques tellement. Je suis fière et heureuse d'avoir été ta maman. 

Ta maman.

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