Un drame sur le lac Majeur fait quatre morts
«Mon ami a perdu sa femme, sa maison et son petit chien»

Ce dimanche de Pentecôte, un bateau avec 23 personnes à bord a été pris dans un orage près de Lisanza (I) et a coulé. L'équipe fêtait un anniversaire. Quatre personnes sont décédées.
Publié: 30.05.2023 à 10:04 heures
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Alors que la tempête faisait encore rage, les équipes de secours italiennes se sont rendues sur les lieux du bateau chaviré.
Photo: DR
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Myrte Müller

Ce lundi de Pentecôte, le soleil se reflète sur l’eau du lac Majeur. De petites vagues échouent sur la plage de sable. La chaleur et la luminosité estivale invitent à la baignade en cette fin du mois de mai.

Ce lundi matin, le lac Majeur montre son plus beau visage. Tout semble calme. Mais à environ 600 mètres de la rive de Lisanza, près de Sesto Calende, des plongeurs tentent encore de récupérer les vestiges de l’embarcation nommée «Good… uria».

Quand on y regarde de plus près, trois embarcations de la police des eaux pointent à l’horizon. Elles sont les derniers témoins sur la côte du drame qui s’est joué la veille. Un bateau a coulé ce dimanche soir, pris dans une tempête. A bord: 23 personnes.

Une vingtaine de touristes et deux membres d'équipage

Cette équipe avait décidé de louer la péniche «Good... uria» en fin d’après-midi. Parmi elle, 21 touristes italiens, israéliens et britanniques, âgés de 20 à 60 ans. S’y ajoutaient deux membres d’équipage.

Le groupe était nombreux pour la taille de l’embarcation. La péniche faisait 16 mètres de long. Et les prévisions météorologiques étaient plutôt mitigées. La météo annonçait l’arrivée d’orages ce dimanche matin déjà.

Pourtant, le bateau affrété a pris le large. La tempête éclatera en fin d’après-midi seulement. «Le ciel s’est assombri, puis il a commencé à pleuvoir», se souvient Luca Caietti, 61 ans. Cet architecte italien habite au bord du lac, à Lisanza. Selon cet Italien du coin, les tempêtes de cette ampleur sont très rares. Lui-même en a très peu observées. Il était parti se promener avec son chien lorsque l'orage a éclaté. Ce tourbillon était accompagné de vents particulièrement violents. «J'ai rarement vu autant de pluie d'un seul coup!», ajoute-t-il.

Luca Caietti, 61 ans, est parti se promener avec son chien. Lorsque l'orage a commencé à souffler le 28 mai, l'architecte est rentré chez lui.
Photo: Myrte Müller

«Je les ai vus tirer un corps à terre»

Le chef de bord avait certainement lui aussi vu l’orage se préparer. Le skipper devait avoir hâte de rentrer chez lui. Mais le bateau n’arrivera pas jusqu’au port. A 19h, il s’est mis à pleuvoir des cordes. Des capotes auraient dû protéger l’embarcation de la pluie. Mais un vent violent s’est abattu. Fatalement, le bateau a chaviré.

Ses occupants ont été jetés par-dessus bord. Au loin, c’était pourtant le silence. Personne n’a entendu les cris des passagers dans le tumulte de l’orage. Finalement, l’un d’eux a atteint le ponton à la nage et alerté les autorités.

Tout s’est ensuite enchaîné. Eduardo Favarone, l’adjoint au maire de Sesto Calende, a accepté de nous raconter le déroulement des événements. «Un journaliste m’a appelé», amorce le sexagénaire. Aussitôt, le vice-syndic s’est précipité sur la rive, où les opérations de sauvetage battaient leur plein. «Un hélicoptère a décollé malgré les intempéries, explique-t-il. On n’y voyait pas grand-chose au milieu de la tempête. Mais il est parvenu à scruter le lac à l’aide d’une caméra thermique.»

Edoardo Favarone, 67 ans, s'est précipité sur la rive dimanche soir lorsqu'il a appris le drame.
Photo: Myrte Müller

Dix ambulances et deux camions de pompiers ont alors été mobilisés. Ils ont stationnés sur la rive, tandis que les unités de sauvetage de la police des eaux et de la Guardia di Finanza se sont portés au secours des malheureux qui avaient chaviré. Dix-huit autres passagers parviendront à atteindre la terre ferme sains et saufs.

Le parquet italien enquête

«Le premier corps a été repêché vers 20h», poursuit Eduardo Favarone. Il fait une pause. «Et je les ai vus ramener le corps à terre», souffle-t-il.

Les recherches ont duré toute la nuit. Au petit matin, le couperet est tombé: on dénombre quatre morts dans ce drame. Parmi eux, un Italien de 62 ans et une Italienne de 53 ans. Selon le quotidien italien «La Stampa», tous deux travaillaient pour les services de renseignement italiens. La troisième victime est un touriste israélien.

Et la quatrième personne décédée est l’épouse du propriétaire de la péniche. Originaire de Russie, cette cinquantenaire vivait avec son mari Claudio C.* sur la «Good… uria». Ils louaient aussi leur péniche pour des croisières.

Le propriétaire du chantier naval, Angelo Moratti, se dit «bouleversé». Ce cinquantenaire connaissait bien Claudio C. «J’ai fait sa connaissance lors d’événements caritatifs, détaille-t-il. Il vivait de la location de son bateau.» Mais la vie de Claudio C. est aujourd’hui en miettes, soupire notre interlocuteur. «Il a tout perdu, se désole Angelo Moratti. Sa femme, sa maison et probablement aussi son petit chien auquel il était très attaché.» Claudio C. a-t-il assisté au drame? «D’après ce que j’ai entendu, il était lui aussi à bord», nous répond le propriétaire du chantier naval.

Le propriétaire du chantier naval, Angelo Moratti (59 ans), est un ami du propriétaire du bateau qui a perdu sa femme dans l'accident.
Photo: Myrte Müller

Des suites judiciaires pourraient venir s’ajouter au désarroi du propriétaire de la péniche. Le parquet italien de Busto Arsizio aurait ouvert une enquête et examinerait dans quelle mesure la tragédie aurait pu être évitée.

*Nom connu de la rédaction

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