Sur les hauts de Delémont, Valentin Pilet a une vue imprenable sur la ville où il a élu domicile voici quelques années. Le Vaudois y vit avec sa copine et leur chien. «La forêt est à deux pas, pointe-t-il du doigt. C'est très calme. On se plaît beaucoup dans cette région.» En côtoyant le défenseur du HC Ajoie, il paraît difficile de se douter qu'il est l'un des bagarreurs de National League. «Mais lorsque je mets mon casque, je ne suis plus Valentin Pilet, rigole-t-il. C'est comme si je changeais de personnalité.»
Depuis qu'il est arrivé en National League, Valentin Pilet a été plus souvent dans les mauvais que dans les bons coups. Il a largement plus de bagarres que de buts dans l'élite, lui qui n'a toujours pas trouvé le chemin des filets en saison régulière. «Mais c'est mon rôle, rigole le défenseur yverdonnois du HC Ajoie. Devant la cage, s’il y en a un qui met un coup au gardien, je vais lui sauter dessus. Ce n’est pas pour faire le héros: on me le demande. Si je ne le fais pas, je ne joue pas. Et c’est aussi de la dissuasion. Le but, c’est que l’adversaire réfléchisse à deux fois avant de s’approcher un peu trop du gardien.»
Jovial hors de la glace
Mais forcément, le No 2 de la formation jurassienne commence à trainer derrière lui une réputation que l'on qualifiera poliment de bagarreur. «Ça ne me dérange pas d’être celui qui fait mal, tant que je ne blesse pas. Je donne tout pour mes coéquipiers — c’est ma manière d’exister sur la glace.» Mais lorsque l'on joue à la limite, il y a forcément des moments où elle est franchie. Il sait que son jeu est taillé pour faire mal. Et son gabarit aussi. Cela tranche avec la jovialité du bonhomme. «Mais parce que je suis un homme sociable qui aime le contact avec les gens.»
Lorsqu'il doit parler de sa carrière depuis qu'il est arrivé à Ajoie, il passe en revue certains moments qui ont forcément marqué les esprits. Mais avant d'évoquer d'autres cas, il tient à s'attarder sur un moment dont il n'est pas fier. «Il y a une scène que je regrette, avoue-t-il. C'est la charge sur Denis Hollenstein.» Cette scène de novembre 2022 lui avait valu cinq matches de suspension. «Je lui ai tout de suite écrit un message pour m'excuser, précise-t-il. Il ne m'a jamais répondu, mais j'ai la conscience tranquille.»
«C'était si grave que ça?»
Une autre scène l'a projeté sur le devant de la scène: une bagarre avec Antti Suomela, le Finlandais du Lausanne HC. «De mon point de vue, il m'enlève le casque donc si tu commences à te battre, tu vas au bout. Mais il s'est mis en boule.» Ce qui a fait scandale? Un coup lorsque son adversaire était recroquevillé. «Quand tu te bats, les émotions sont intenses et je sais que je suis quelqu'un d'assez impulsif. Je peux vite chauffer (rires).»
Le défenseur s'est rendu compte, ce soir-là, qu'il aimait le contact social, mais un peu moins la haine gratuite sur les réseaux sociaux. «À l'époque, tout le monde pouvait m'écrire, pouffe-t-il. Ma copine m'a aidé à paramétrer mon compte pour que ce ne soit plus possible depuis cette scène. J'ai reçu des dizaines d'insultes alors que je n'étais pas encore allé sous la douche. Je n'avais même pas revu les images. Je me suis dit: «C'est si grave que ça?» Dans le feu de l'action, je n'avais même pas conscience du dernier coup. Mais avec mon étiquette de joueur méchant, ça a pris de sacrées proportions.»
Dans l'avion avec Noah Rod
Deux autres scènes ont mis la lumière sur Valentin Pilet, dont la grave blessure de Noah Rod. Le capitaine de Genève-Servette a dû passer plus d'une année à l'infirmerie en raison d'une grave blessure à l'épaule. «Un accident, plaide-t-il à raison. Lui, il a répondu à mon message d'excuse et m'a dit que je n'y pouvais rien. C'est malheureux ce qui lui est arrivé. D'ailleurs, nous étions dans le même avion pour aller en vacances peu de temps après et nous avons évidemment rediscuté de cette scène. Il n'y a aucun souci avec lui. Cela fait hélas partie des risques du métier.»
En début de saison, il a étalé Derek Grant, le vétéran des Zurich Lions. Un combat qui a ancré encore un peu sa réputation. «Je ne me suis jamais entraîné aux sports de combat, précise-t-il. Mais contre lui, j'ai eu un peu de chance. Mon premier coup le touche en plein sur le nez. Cela aurait pu être l'inverse. Mais c'est vrai que sitôt la bagarre entamée, je n'ai peur de personne.»
Prolonger l'aventure avec Ajoie?
Forcément, il se fait également allumer sur la glace. Même par ses amis les plus proches. «Surtout par eux, rigole-t-il franchement. Avec Makai (ndlr Holdener, Lausanne) et Johnny (ndlr Kneubuehler, Bienne), ça n'arrête pas.» Ce dernier gardait d'ailleurs son chien pour quelques jours au moment de l'interview. Se verrait-il l'empoigner lors du prochain Bienne - Ajoie? «J'aurais un peu plus de peine à me lâcher complétement contre mon meilleur pote, pouffe-t-il. Mais en même temps, mon rôle, c'est de tout faire pour protéger mon équipe.» Le Vaudois termine par une question: «Si un attaquant s'avance face à un gardien qui est son pote, va-t-il tirer à côté? Je ne pense pas. J'ai un autre rôle, mais la finalité est la même.» Tout en tâchant de rester le plus possible dans les limites.
En fin de contrat du côté d'Ajoie, il se voit bien prolonger l'aventure. «Nous avons trouvé un équilibre de vie avec ma copine, précise-t-il. Et le HCA m'a donné ma chance en National League et j'aime mon rôle dans cette équipe. En plus, les gens sont incroyablement gentils.» À son image, en fait. Qu'on le veuille ou non.
Équipe | J. | DB. | PT. | ||
|---|---|---|---|---|---|
1 | HC Davos | 22 | 34 | 55 | |
2 | Rapperswil-Jona Lakers | 22 | -2 | 40 | |
3 | Lausanne HC | 23 | 18 | 40 | |
4 | EV Zoug | 21 | 6 | 37 | |
5 | ZSC Lions | 22 | 17 | 37 | |
6 | Genève-Servette HC | 22 | -9 | 36 | |
7 | HC Fribourg-Gottéron | 21 | 11 | 35 | |
8 | HC Lugano | 21 | 12 | 34 | |
9 | EHC Bienne | 21 | 0 | 27 | |
10 | SCL Tigers | 21 | -5 | 27 | |
11 | EHC Kloten | 22 | -12 | 27 | |
12 | HC Ambri-Piotta | 22 | -23 | 25 | |
13 | SC Berne | 21 | -14 | 22 | |
14 | HC Ajoie | 21 | -33 | 11 |