«Ça m'a paru une éternité»
Noah Rod de retour après dix-neuf mois de calvaire

Le capitaine de Genève-Servette fait son retour au jeu cette saison après avoir manqué de nombreux mois en raison d’une très grave blessure à l’épaule. Touché lors d’un match face à Ajoie, Noah Rod aurait pu ne jamais rejouer au hockey. Témoignage.
Publié: 21:45 heures
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Dernière mise à jour: 21:48 heures
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Noah Rod a vécu près de deux ans compliqués.
Photo: BASTIEN GALLAY / GALLAYPHOTO
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Grégory BeaudJournaliste Blick

«Pour être franc, je ne suis pas sûr que je puisse refaire un tel chemin.» Au moment de repenser à l’année et demie de cauchemar qu’il vient de vivre, il y a un mélange de fierté et de douleur chez Noah Rod. Le capitaine de Genève-Servette a bien failli perdre l’usage de son bras gauche le 13 février 2024 au cours d’un match à Porrentruy face au HC Ajoie. «Un bête accident, précise-t-il. C’est ma faute. Je ne me protège pas bien et je n’en veux pas au joueur qui m’a propulsé contre la bande.»

Un geste banal, mais des conséquences terribles. Punaisé contre la bande par Valentin Pilet, Noah Rod ne se relève pas. Sur la glace, le silence se fait. Son épaule vient de se disloquer et les nerfs qui la contrôlent sont touchés. Le capitaine de Genève-Servette a subi la blessure la plus grave de sa carrière au moment où son épaule s’est fracassée contre le bord de la patinoire.

Le diagnostic est sérieux. «Une dislocation de l’épaule, avec le plexus brachial touché», se souvient l’infortuné. Concrètement, qu’est-ce que cela signifie? Les nerfs ont été sérieusement endommagés et la carrière du No 96 ne tenait, sans mauvais jeu de mots, plus qu’à un fil.

À Porrentruy, Noah Rod, un dur au mal, a connu un calvaire. «Ils m'ont donné beaucoup d'antidouleurs, mais rien ne faisait effet. J'ai demandé à être endormi, mais ils ne voulaient pas, s’est-il souvenu quelques mois plus tard. J'ai passé environ quatre heures avec l'épaule démise. Personne ne voulait la toucher. Ni le médecin d'Ajoie, ni l'ambulancier, ni celui de la Rega. Ce n'est qu'en arrivant à Berne qu'ils ont pu la remboîter.»

Spécialistes dubitatifs

À cet instant, il ne le savait pas encore, mais ce n’était que le début d’un très long chemin vers la guérison. «Cette période a duré une éternité quand j’y repense.» Rejouer au hockey? Ce n’était plus la question. «Il fallait déjà que je retrouve mon bras», précise-t-il. Et à cet instant, les nombreux avis médicaux divergeaient. «Je suis allé chez un neurologue qui n’a souhaité bonne chance, en rigole-t-il aujourd’hui. Je lui ai dit que je ne venais pas chez lui pour chercher des encouragements, mais un espoir de guérison.» Un autre rendez-vous s’est également terminé par une dose de frustration supplémentaire. «Ils me disaient que mon bras ne fonctionnait pas… Je le savais. Ce n’est pas ce que je cherchais.»

Et pendant qu’il errait de médecin en médecin, Noah Rod a continué de suivre le parcours de ses coéquipiers genevois. Pas question de les abandonner: «Deux jours après l’accident, j’étais de retour à la patinoire». S’il a tenté de ne pas le montrer, les prévisions étaient, dans un premier temps, mauvaises. «De nombreux professionnels m’ont dit que je ne rejouerais jamais. Dans ma tête, j’ai toujours essayé d’y croire même si c’était parfois très difficile.» Et une lueur d’espoir s’est allumée au détour d’un énième rendez-vous dans un cabinet. «J’avais enfin quelqu’un de positif, précise-t-il. Je ne demandais pas une date de retour au jeu, mais juste une confirmation que j’avais raison d’y croire.»

«Mon travail, c’était mon bras»

Après s’être fait opérer, Noah Rod a eu le bras immobilisé. «C’est un sacré un handicap, en rigole-t-il aujourd’hui. Je mets au défi quiconque d’essayer d’attacher ses chaussures ou de cuisiner en n’utilisant qu’un seul bras. Bonne chance…» Et cela ne s’est évidemment pas fait sans mal dans la vie personnelle de ce jeune papa. «Il y a eu la période où je pensais tellement au bras que ma femme m’a dit: il y a d’autres choses dans la vie aussi.»

«
Je suis allé chez un neurologue qui n’a souhaité bonne chance. Je lui ai dit que je ne venais pas chez lui pour chercher des encouragements, mais un espoir de guérison.
Noah Rod, capitaine de Genève-Servette
»

Problème? Le joueur de Genève-Servette est un travailleur acharné et l’envie de revenir un jour au jeu a pris le pas sur tout le reste. «Je ne pouvais pas passer 15 minutes avec ma fille à jouer, j’étais obligé de faire des exercices de la main, détaille-t-il. Je m’entraînais tous les jours, j’avais le physio ici et aussi un physio privé à Nyon. Je commençais à 8h, finissais à 17h30. Mon travail, c’était mon bras.»

Le plus dur devant lui

Durant près d’une année et demie, une question est tout de même demeurée centrale: «Sera-t-il possible de porter une nouvelle fois le maillot du GSHC?». Et, paradoxalement, la réponse n’est intervenue que très récemment. «Pendant l'été, je ne savais pas si j'allais pouvoir jouer ou non», a-t-il précisé. Afin de mettre toutes les chances de son côté, l’attaquant s’est entraîné dans son coin. «Je me suis remis sur la glace à la fin du mois de mai en louant des heures à gauche et à droite. Mais même là, j’avais encore des doutes. Au niveau de ma blessure, je ne savais pas vraiment si ça allait bien ou pas.»

Ce n’est finalement qu’au moment de réintégrer sa «meute» que le leader a su que le processus de guérison était terminé. «À l’été, il y a encore eu pas mal de moments de doute. C’est clair qu’il y a toujours une appréhension après une absence aussi longue. Maintenant, elle est passée.» Capitaine emblématique du GSHC, il a également pu retrouver sa voix dans le vestiaire. «C’est difficile de ne pas être sur la glace avec les gars et de leur dire de se bouger (rires), je devais faire attention à ce que je disais.» Mais dans les faits, il arrivait à la patinoire avant ses coéquipiers et repartait après eux. Montrer l’exemple, toujours.

Chasser les vieux démons

Son premier match a eu lieu à Yverdon. «C’est difficile, à ce moment, de ne pas penser à tout ce que j’ai vécu pour en arriver là. Tu as des souvenirs de par où t’es passé et c’est naturel de te dire que si tu dois repasser par là, ce sera compliqué. Cette période était une éternité. Surtout que pendant longtemps, je n’avais pas du tout le hockey en tête, je pensais juste à ma vie de famille. Lorsque tu joues, tu ne réflichis pas aux blessures irréversibles Mais c’est bien de cela que l’on parle. Que tu rentres d’un match à la maison et que tu n’es plus capable d’avoir une vie normale avec ta femme et ta fille.»

En début de saison, il a pu effectuer son retour sous le maillot des Aigles en championnat. «Jouer le premier match à domicile, c’était vraiment cool pour moi, apprécie-t-il. Beaucoup de gens m’avaient dit qu’ils seraient présents. Chaque soir durant toute la rééducation, j’ai rêvé de ce moment.» Ironie du sort, c’est contre Ajoie qu’il a pu effectuer ce premier match officiel. Lors de la préparation, il avait rechaussé les patins contre les Jurassiens, à Porrentruy, là où tout a failli s’arrêter. Initialement, il ne devait pas jouer. «L’équipe avait besoin de moi, alors j’y suis allé», remarque-t-il. L’occasion de chasser les vieux démons. «Je me suis retrouvé dans la même position au même endroit, constate-t-il. C’est évident que j’y ai pensé.»

Mais - et c’est bien le plus important -, les doutes ont laissé place au bonheur d’être de retour au jeu. De pouvoir à nouveau aller guerroyer avec ses coéquipiers. Durant une saison complète, le GSHC n’avait plus de capitaine. Aujourd’hui, il est prêt à prêter main (et épaule) forte à son équipe. Les Aigles en avaient bien besoin. Lui aussi.


National League 25/26
Équipe
J.
DB.
PT.
1
HC Davos
HC Davos
6
17
18
2
Genève-Servette HC
Genève-Servette HC
6
-5
13
3
Lausanne HC
Lausanne HC
6
17
12
4
ZSC Lions
ZSC Lions
6
9
12
5
Rapperswil-Jona Lakers
Rapperswil-Jona Lakers
6
7
12
6
EV Zoug
EV Zoug
6
-1
11
7
HC Fribourg-Gottéron
HC Fribourg-Gottéron
6
4
10
8
SCL Tigers
SCL Tigers
6
-5
8
9
EHC Kloten
EHC Kloten
6
-4
6
10
SC Berne
SC Berne
5
-5
5
11
HC Lugano
HC Lugano
6
-7
5
12
EHC Bienne
EHC Bienne
5
-6
4
13
HC Ambri-Piotta
HC Ambri-Piotta
6
-9
4
14
HC Ajoie
HC Ajoie
6
-12
3
Playoffs
Barrages qualificatifs
Barrages de relégation
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