Ecrivons-le clairement et d'entrée de jeu: l'ASF a décidé de se séparer de Pia Sundhage. D'accord, elle était en fin de contrat à la fin de l'année et, techniquement, son contrat n'est «seulement» pas prolongé. Sauf qu'elle ne sera pas sur le banc pour les deux derniers matches de l'année, elle qui avait expressément déclaré, mardi dernier à Dunfermline, qu'elle avait bien l'intention d'honorer son contrat jusqu'au bout même en cas de décision défavorable de l'ASF à son égard. Exit Pia, avant la fin de son contrat.
La nouvelle vient de tomber, mais il n'est pas interdit d'essayer de prendre un peu de recul. Premier constat: si Géraldine Reuteler avait cadré sa frappe dans les arrêts de jeu du match face à la Finlande, un soir de juillet à Genève, jamais Riola Xhemaili ne l'aurait déviée et la Suisse aurait raté son Euro. Et donc Pia Sundhage aussi. Et personne ne regretterait aujourd'hui son départ.
En une action, Pia Sundhage est passée de l'ombre à la lumière
Oui, mais voilà. Géraldine Reuteler a manqué son geste et le destin, taquin, avait décidé ce soir-là que ce geste maladroit de la meilleure joueuse suisse de l'Euro serait précisément celui qui ferait la différence entre un tournoi raté et un tournoi réussi, inoubliable, féérique. A quoi ça tient, le football, hein...
Le fait est que ce soir-là, Pia Sundhage, sa joie sincère, son attachement pour cette jeune équipe de Suisse, sa sagesse teintée d'espièglerie et sa personne toute entière ont subitement sauté aux yeux du peuple suisse, qui s'est entiché de cette «vieille dame» de 65 ans, ainsi qu'elle s'appelait elle-même devant les caméras.
Oui, Pia Sundhage est entrée dans le coeur de la nation ce soir-là et qu'on ne vienne pas nous parler de tempérer ces mots: les audiences se comptant en millions de personne sur les trois chaînes publiques viennent au contraire les confirmer.
L'ASF doit assumer une décision impopulaire
Alors oui, aujourd'hui, la décision de l'ASF, alors que la Suédoise voulait continuer, on le rappelle, est impopulaire. Comment donc la Suisse peut-elle snober une technicienne qui a entraîné les Etats-Unis, le Brésil et la Chine et qui a publiquement exprimé son désir de continuer?
Evacuons la question de l'assistante à 50% qui devrait passer à 100%. C'est un détail. Une anecdote. En tout cas pas un point pertinent ou important des négociations. Si l'ASF avait voulu continuer, la question aurait été réglée en quinze secondes. Si la Fédération a montré la porte à Pia Sundhage, c'est parce qu'elle veut partir sur un nouveau cycle.
Pia Sundhage a fait confiance à la jeunesse
Cette décision impopulaire, il faudra l'assumer, car la solution la plus simple aurait été de continuer avec la Suédoise, surtout dans la foulée des deux succès d'octobre face au Canada et à l'Ecosse et de l'Euro réussi.
Si l'ASF veut changer, c'est qu'elle a une idée précise de la suite et qu'elle sent que Pia Sundhage n'est pas la femme de la situation. Cela ne peut pas être une question de jeunesse et de renouvellement de l'effectif, car la sélectionneure a fait énormément de place aux jeunes joueuses, leur faisant confiance non seulement dans l'effectif, mais aussi sur le terrain. Il s'agit sans doute plutôt de vision stratégique et il sera intéressant d'écouter les arguments de Marion Daube, directrice du football féminin à l'ASF, qui devrait s'exprimer mardi dans la journée.
Un soutien public inexistant de ses joueuses
Il y a un point, quand même, que l'on peut déjà relever en ce lundi soir, quelques minutes après l'annonce: les joueuses ne se sont pas exprimées en faveur de Pia Sundhage ces derniers jours. Certaines en ont eu l'occasion devant les micros, mais toutes celles qui ont été interrogées ont tenu un discours très neutre. Il faudra voir ces prochaines heures si les marques de soutien affluent, mais celles qui comptent vraiment sont celles qui sont exprimées avant la décision. Et celles-là, il faut bien admettre qu'elles n'ont pas existé.
Au revoir madame Sundhage, salut Pia: votre contrat n'est pas prolongé, mais vous avez gagné le respect des amateurs de football de ce pays.