La traversée du désert. Ainsi est appelée par les supporters de la Nati ayant un peu de mémoire, ou qui en sont encore meurtris, la période allant de 1966 à 1994. Vingt-huit ans pendant lesquels l'équipe nationale suisse a dû regarder la Coupe du monde à la télévision, avant que la formation emmenée par Stéphane Chapuisat et majoritairement romande, soulignons-le avec plaisir et fierté, parvienne à s'envoler pour les Etats-Unis, un soir de novembre 1993 et de victoire 4-0 face à l'Estonie.
Le calcul est vite fait: la Nati a manqué six Coupes du monde d'affilée et l'histoire lui propose un clin d'oeil fort sympathique puisque les Coupes du monde 1994 et 2026 auront un point commun, celui de se disputer, au moins en (grande) partie, sur sol américain.
Désormais, ne pas se qualifier serait un immense échec
Car, l'information est connue, voilà qu'en s'imposant à Ljubljana ce soir, et pour autant que le Kosovo ne gagne pas à Göteborg dans le même temps, l'équipe de Suisse écrirait l'histoire inverse, en participant à sa sixième Coupe du monde consécutive, elle qui n'en a pas raté depuis l'Allemagne en 2006. La phrase est encore à écrire au conditionnel, bien sûr, mais en ayant gagné ses trois premiers matches, dont le plus important en Suède, ne pas se qualifier dans ce groupe à quatre serait un échec hautement douloureux et, osons l'écrire, improbable à mi-chemin dans ces qualifications.
Pour trembler jusqu'au bout, en fait, il faudrait que les Slovènes l'emportent ce soir et que le Kosovo aille battre les Suédois. Dans ce cas, le dernier match à Pristina serait potentiellement explosif, à tel point qu'il pourrait permettre à Edon Zhegrova et à ses copains de passer devant la Suisse et, si ce scénario devait se produire, il y aurait alors tellement de paragraphes et d'articles à écrire que les serveurs informatiques de tout le pays exploseraient.
Peu de raisons d'être pessimiste
A vrai dire, il existe peu de raisons d'être pessimiste à l'aube d'affronter la Slovénie en ce lundi soir, elle qui a été battue 3-0 à l'aller à Bâle, mais il en existe tout de même d'être prudent. Déjà, parce que la formation de Matjaz Kek est bien meilleure chez elle qu'à l'extérieur, elle qui n'y perd pas souvent (et y gagne même régulièrement). Le terrain ne sera pas Wembley, restons polis, et cette formation slovène possède un buteur de classe mondiale nommé Benjamin Sesko, même s'il ne l'a montré ni au Parc Saint-Jacques, ni chaque semaine sur les pelouses de Premier League pour l'instant. La Nati a d'ailleurs plutôt bien composé avec les grands avant-centre dans cette campagne puisque Vedat Muriqi et Viktor Gyökeres ont eux aussi paru tout petits face à Manuel Akanji et Nico Elvedi pour l'instant.
«Nous sommes dans une bonne situation et nous y sommes grâce à notre travail», a ainsi reconnu Murat Yakin, à la veille d'affronter ces imprévisibles Slovènes. Comment éviter le piège de la suffisance? «On voit le classement, bien sûr, mais on veut jouer de la manière habituelle, avec de la joie de jouer, mais aussi de la concentration et de l'intensité. Chaque adversaire auquel on laisse de l'espace peut se montrer dangereux», enchaîne le sélectionneur national.
La Slovénie a changé de système
Le match aller est-il encore dans les têtes, vu qu'il a eu lieu il y a moins d'un mois? A Bâle, les Slovènes n'avaient tout simplement pas existé, à tel point que l'on voit mal comment il pourrait en être autrement ce lundi, même sur leur terrain, tant le rapport de forces a été en faveur de la Nati. «On recommence à zéro. Par rapport au match à Bâle, ils ont changé de système. On verra demain s'ils sont revenus à l'ancien ou non, on le saura bien assez vite. Tout ce qui compte, c'est de bien entrer dans la partie», enchaîne Murat Yakin.
Les 800 supporters suisses présents ce lundi à Ljubljana pourront-elles et ils fêter la qualification pour la Coupe du monde? En tout cas, ils auront un oeil sur leur téléphone, en cas de victoire suisse, pour suivre le déroulement du match entre la Suède et le Kosovo. Murat Yakin, lui, n'a rien voulu dire d'une éventuelle fête improvisée pour les joueurs et le staff de la Nati. «Il y a un match à jouer», a sobrement répondu le sélectionneur. Confiant, mais prudent.