Trois quarts d’heure se sont écoulés depuis la fin du match à scandale entre Aston Villa et YB. L’entraîneur bernois Gerardo Seoane prend le temps de répondre aux journalistes des médias non détenteurs de droits.
Sans surprise, le sujet central n’est pas la performance sportive ni le triplé de Donyell Malen, mais bien les débordements des supporters après les deux premiers buts du Néerlandais. Une affaire reprise partout: tabloïds, Guardian, Telegraph, BBC. Et partout, la même conclusion: ce qui s’est produit est une honte, et YB doit être sévèrement sanctionné.
Gerardo Seoane coupe court aux questions
Les deux premières questions adressées à Gerardo Seoane portent logiquement sur ces incidents. L’entraîneur explique posément son point de vue, évoquant notamment une réaction policière qu’il juge excessive. Mais lorsqu’on lui pose, en troisième question, s’il a déjà vécu quelque chose de similaire, il se dérobe: «Je propose que nous passions au sport. Nous avons déjà répondu à trois questions sur ce sujet.»
Sauf que non: il n’y en a eu que deux. Les journalistes insistent: «Très bien, c’était la dernière question à ce sujet. Ensuite, on passe au sport.» Gerardo Seoane écoute la question, esquive et conclut: «C’était la dernière. Bien.» Sujet clos, donc. Sans jamais répondre à la question posée.
Un communiqué qui évite soigneusement le mot «fans»
Le club bernois adopte la même stratégie. Dans un communiqué publié à 23h38 heure locale, YB condamne «avec la plus grande fermeté» les jets d’objets en direction des joueurs et se distance «de toute forme de violence». Mais à aucun moment les mots «nos fans» ou «le secteur visiteurs d’YB» n’apparaissent. YB évite soigneusement de nommer les siens. Résultat: l’impression que les débordements seraient l’œuvre de quelques individus isolés, incontrôlables.
Or la réalité est différente. Oui, un seul supporter a touché Donyell Malen avec un gobelet. Mais des dizaines de fans bernois ont lancé des bières et des morceaux de plastique. Tous ces projectiles ne sont pas arrivés «par hasard» sur la pelouse. Ce ne sont pas deux casseurs isolés, comme on aime trop souvent le raconter en Suisse: ce sont des supporters.
Les fauteurs de troubles risquent gros
Deux d’entre eux ont d’ailleurs été menottés et escortés hors du stade sous les applaudissements des fans d’Aston Villa. Et si des poursuites sont engagées, ils pourraient le regretter. La justice anglaise a déjà condamné, à la fin des années 1990, des fratries de hooligans à 18 ou 24 mois de prison pour des actes comparables.
Les fauteurs de troubles d’YB risquent donc la même chose. Les images de vidéosurveillance sont en cours d’analyse: pour certains, ce bref voyage en Angleterre pourrait se transformer en cauchemar. Et que fait YB? Le club se défile. Comme d'autres acteurs.
L’UEFA ferme les yeux – encore une fois
L’UEFA, elle, détourne volontiers le regard dès que de tels incidents éclatent. Pour que les téléspectateurs ne perçoivent pas ce qui dérange dans son «produit». Sa plateforme d’information a même franchi un cap dans l’absurdité: dans son compte rendu en ligne, pas une ligne sur les incidents. Rien. Le vide total.
Dans quelle bulle vivent-ils? Jusqu’où peut-on prendre les amateurs de football pour des naïfs? Il suffit pourtant d’un clic pour constater que le web entier ne parle que de ça: la honte de Villa Park, et des supporters suisses qui, après Manchester et Glasgow, se déchaînent à nouveau sur l’île. Bref: qui deviennent des récidivistes.
Un malaise profond
YB a un problème avec une partie de ses supporters – et avec la manière dont le club choisit d’en parler. Les instances du football ont un problème avec tout ce qui vient perturber leur image parfaite. Et beaucoup d’observateurs ont, eux, un problème plus général avec ce football-là. Difficile de leur donner tort.