«Des types, non... des bêtes tiraient sur des gens»
Les souvenirs glaçants de la sélection allemande le 13 novembre à Paris

Le jeudi 13 novembre marque le dixième anniversaire des attentats de Paris. Dans un documentaire, des (ex-)joueurs de l'équipe nationale allemande parlent de la nuit de terreur qu'ils ont dû passer au Stade de France.
Publié: 10:37 heures
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Dernière mise à jour: il y a 58 minutes
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Dans le nouveau documentaire d'ARD, l'ancien sélectionneur Joachim Löw et d'autres protagonistes parlent de la nuit de terreur à Paris.
Photo: freshfocus
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Cédric Heeb

La nuit du 13 novembre 2015 reste l’une des plus sombres de l’histoire de la France. Cette nuit-là, des terroristes frappent plusieurs lieux de la capitale, tuant 130 personnes et en blessant plus de 350. Au milieu de cette tragédie: l’équipe nationale allemande.

Ce soir-là, les champions du monde en titre affrontent la France au Stade de France lors d’un match amical. En première mi-temps, trois détonations retentissent. Personne ne comprend ce qui se passe. «C’était trop fort pour un pétard normal», raconte Joachim Löw dans le nouveau documentaire d’ARD Terror. À l’occasion du dixième anniversaire, joueurs, entraîneurs, responsables, journalistes et membres des forces spéciales reviennent sur cette nuit de terreur.

Trois kamikazes devant le stade

On apprendra plus tard que trois terroristes se sont fait exploser à proximité du Stade de France. Les joueurs, d’abord perplexes, ne seront informés qu’après la rencontre. Le président français François Hollande, présent dans les tribunes, reçoit des informations précises à la mi-temps, mais choisit de ne rien dire pour éviter la panique.

«On ne s’inquiétait pas vraiment de la possibilité d’une bombe», raconte André Schürrle. Bastian Schweinsteiger se souvient avoir scruté les tribunes à la recherche de fumée: «Ça m’a fait bizarre.» Le capitaine de la Mannschaft préfère ne pas imaginer ce qui se serait passé si les assaillants avaient réussi à entrer dans le stade – ce qui était, semble-t-il, leur objectif initial.

Une nuit d’angoisse au Stade de France

«Après le coup de sifflet final, les agents de sécurité de la Fédération allemande de football (DFB) nous ont immédiatement ordonné de rentrer aux vestiaires», explique Christoph Kramer. C’est là qu’ils apprennent l’ampleur des attaques en cours dans Paris. «La peur nous serrait la gorge», se souvient Joachim Löw. Beaucoup pensent immédiatement au signalement d’une alerte à la bombe qui avait eu lieu le matin même à l’hôtel de l’équipe.

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«À un moment donné, on a posé des matelas pour dormir», raconte Kevin Trapp. Les joueurs passent la nuit à l’intérieur du stade, tandis que des centaines de supporters se réfugient sur la pelouse. L’angoisse monte: «Ma fiancée pleurait au téléphone. Personne ne savait si nous étions en danger. Il y avait beaucoup de peur. Des types, non... des bêtes armées de mitraillettes tiraient sur des gens innocents dans la ville», se souvient Kevin Trapp.

«Ne rentrez surtout pas à l’hôtel»

L’équipe est bel et bien menacée. Joachim Löw reçoit un appel de son conseiller, lui rapportant une information transmise par un ancien joueur de Fenerbahce, lui-même en contact avec le président turc Recep Tayyip Erdogan: «Il a dit à mon conseiller que nous ne devions en aucun cas retourner à l’hôtel. Les services de renseignement avaient des informations très claires selon lesquelles notre équipe et notre hôtel étaient également visés.»

Le départ est repoussé jusqu’à l’aube. À 5h30, la Mannschaft quitte finalement le stade, discrètement, dans des vans plutôt que dans son bus officiel. Bastian Schweinsteiger se souvient: «Personne ne parlait. Le trajet jusqu’à l’aéroport était silencieux et pesant. On se demandait si un fou n’allait pas surgir à chaque coin de rue.»

Un match annulé pour alerte à la bombe

L’équipe est rapatriée par la Lufthansa. Une fois en Allemagne, le soulagement est immense – mais de courte durée. Quatre jours plus tard, un match amical contre les Pays-Bas est prévu à Hanovre. «Certains joueurs ne voulaient pas jouer», confie Joachim Löw.

«Nous ne sommes pas des machines, nous sommes aussi des êtres humains avec des émotions», déclarait alors Ilkay Gündogan (35 ans). Le match est maintenu pour montrer que le terrorisme ne gagnerait pas. Mais une heure et demie avant le coup d’envoi, une alerte à la bombe contraint les autorités à annuler la rencontre. «On ne savait pas si c’était encore nous qui étions visés», se souvient André Schürrle.

«J’ai sursauté à chaque bruit de voiture»

Les joueurs regagnent leurs clubs. Kevin Trapp, alors au Paris Saint-Germain, retourne dans une ville traumatisée: «Je fermais les volets à 16 heures. J’ai sursauté au moindre bruit. On sentait la peur partout à Paris.»

Sept mois plus tard, l’Allemagne revient en France pour disputer l’Euro 2016. Mais le souvenir du 13 novembre plane toujours. «C’était vraiment flippant de jouer l’Euro en France», admet André Schürrle. «On s’attendait presque à ce qu’un stade explose quelque part. C’était horrible, vraiment.»

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