Le commentaire de Myret Zaki
En plus du Centre, qui ne s’est pas trahi à droite?

Opportuniste, Le Centre? L'UDC, le PLR, le MCG ne font pas mieux, estime notre journaliste Myret Zaki. Compromis, grands-écarts idéologiques et apparentements contre-nature: il n'y en a pas vraiment un pour rattraper l'autre. Business is business?
Publié: 16:42 heures
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Que ce soit l'UDC, le Centre, le PLR ou le MCG, ces partis sont opportunistes, estime Myret Zaki.
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Myret ZakiJournaliste Blick

Après la défaite de Lionel Dugerdil au Conseil d’Etat genevois, on a reproché au parti du Centre de ne pas avoir «joué le jeu» en soutenant le candidat UDC. Certes. Le Centre Genève a oscillé allègrement, sur un spectre commodément extensible, entre le centre gauche, le centre droit, et la droite de la droite quand cela en valait le coup, comme en 2023, lorsqu’il a pactisé avec l’Alliance incluant l’UDC – et qu’il en a profité. 

Si donc on pouvait entendre des supporters de l’UDC, du PLR et du MCG, frustrés par la victoire du Vert Nicolas Walder, parler de lâchage du Centre, «parti des traîtres», vraie «girouette», etc..., ce dimanche 19 octobre, c’était à attendre. Car on n’a pas encore vu une mobilisation du Centre profiter à l’UDC, tandis que le contraire est vrai.

Ouverture contre-nature

Mais en fait d’opportunisme et d’équilibrisme, si l’on examine tous les partis concernés par cette polémique d'après-second tour, honnêtement, il n’y en pas un pour rattraper l’autre. Il faut donc avoir le double standard bien accroché à la doublure satin de son trench coat pour oser jeter la pierre. 

Parlons de l’UDC: que penser d’un Lionel Dugerdil qui a fait campagne sur des thèmes triés sur le volet pour faire le jeu du PLR et des milieux économiques? Bien que souverainiste convaincu, il a proposé aux Genevois un programme commun avec un PLR qui est en réalité le champion du Oui aux Bilatérales III (bien plus que la gauche). Le candidat viticulteur de Satigny a pourtant vécu lui-même, et clairement dénoncé il n’y a pas si longtemps, le dumping du marché suisse par les vins italiens et français, moins chers, ainsi que les dangers de l’ouverture à l’UE pour la production agricole helvétique en général. 

Dénoncer, mais tolérer

Pour ménager ses alliés économiques, l'UDC Genève a évité le sujet des travailleurs étrangers, combattu par le parti mais soutenu par le PLR, sachant que c’est un enjeu clé pour les entreprises: pouvoir continuer d’accéder à de la main-d'œuvre bon marché. La contradiction ultime de l’UDC est là: dénoncer politiquement l’immigration économique, mais la tolérer en pratique, car nombre de ses élus ou donateurs, et même alliés de circonstance, proviennent du patronat.

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On peut toujours argumenter qu’en politique aussi, business is business
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Et que dire du Mouvement citoyen genevois, qui a aussi fait partie de cette grande famille de l’Alliance en 2025? A part que le rapprochement est contre-nature avec le PLR, pour un MCG populaire et profilé depuis des années sur des thèmes du social (retraités, logement), c’est surtout la lutte anti-frontaliers qui s’est émoussée au fil des ans.

Depuis la mise en place de la préférence cantonale à l’emploi par Mauro Poggia, il ne s’est plus passé grand-chose sur ce volet. Alors que le mouvement fête ses 20 ans d’existence, cette ligne idéologique s’est moins diluée à cause du désintérêt des Genevois pour la question des frontaliers qu’à cause de la nécessité d’agréer les milieux économiques. Le nombre de frontaliers à Genève a d’ailleurs triplé sans trop d’entraves réelles depuis que le parti s’est lancé. 

S'allier jusqu'à se fondre?

Enfin, parlons du PLR: que dire de ce parti des Bilatérales III, qui a soutenu à Genève le candidat d’une UDC frontalement anti-UE, parce qu’au plan cantonal, il avait promis de faire toutes les concessions aux milieux économiques? 

On peut toujours argumenter qu’en politique aussi, business is business. Mais au prix d’une telle contorsion idéologique, cela pourrait prendre des airs de capitulation. Surtout que le dernier baromètre électoral a montré que c’est aux dépens du PLR que l’UDC progresse au niveau national cette année. 

L'identité du PLR sortira-t-elle indemne de cet art consommé du compromis? L'audience en progression de l'UDC vaut en tout cas au parti agrarien une attention croissante des lobbies économiques, et notamment ceux des assurances, immobiliers et bancaires, dont il est aisé de vérifier qu’ils misent désormais davantage sur l’UDC que sur le PLR. Business is business.

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