La chronique de Quentin Mouron
Et si les étrangers étaient responsables de vos hémorroïdes?

Primes d’assurance qui explosent, système à bout de souffle, familles étranglées… L’UDC tient son éternel coupable: l’étranger. Plutôt que de s’attaquer aux causes réelles de la crise, le parti recycle son fonds de commerce xénophobe, selon l’écrivain Quentin Mouron.
Publié: 11:48 heures
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Selon l’écrivain Quentin Mouron, l’UDC fait porter aux étrangers la responsabilité de tous les maux de la société.
Quentin Mouron
Quentin MouronEcrivain

Le programme de l’UDC se résume en deux mots: bêtise et inefficacité. Rassemblés en conférence de presse pour parler des coûts exponentiels de la santé, ses ténors ont dégainé la seule arme qu’ils connaissent: la peur des étrangers.

Ils ont d’abord blâmé celles et ceux qui demandent l’asile. Ces derniers sont soupçonnés d’être responsables à la fois de l’augmentation des coûts, de la détérioration des conditions de travail dans le domaine des soins, de la vétusté de certaines installations, de la fermeture de certains sites, et peut-être même des aigreurs de certains caciques du parti. Peu importe que les requérants et les requérantes d’asile n’occasionnent 0.5% des coûts de la santé, comme le fait valoir Médecins du monde Suisse. Pour l’UDC, chaque requérant d’asile est un requérant de trop.

Les travailleurs à la caisse

Mais le projet soutenu le 2 septembre dernier ne se limite pas aux seuls demandeurs d’asile. Les étrangers qui travaillent et cotisent sont aussi priés de passer à la caisse plus que les autres, en fonction de leur âge. Après tout, ils ne cotisent pas toujours depuis leurs dix-huit ans, les notables du parti entendent les faire casquer pour leurs ulcères, leurs occlusions et leurs cancers, c’est la moindre des choses.

L’essentiel, on l’a compris, ne se trouve pas dans l’augmentation des primes d’assurance maladie, ni dans l’augmentation générale des coûts liés à la santé. Cela, l’UDC s’en fout. Son souci est d’utiliser tous les leviers possibles pour cibler l’immigration, et conforter sa vision d’un monde clos, aux frontières épaisses et à la race sanguine, où les étrangers sont à peine tolérés pour peu qu’ils travaillent, se ferment leur gueule et passent à la caisse.

Secteurs nécessaires fragilisés

Les conséquences? On les voit venir. Les personnes immigrées qui travaillent dans certains des secteurs les moins rémunérés – mais les plus nécessaires – de l’économie seront fragilisées, leur paupérisation générera des coûts supplémentaires. Ces coûts seront alors répercutés sur l’ensemble du corps social, notamment sur cette fameuse «classe moyenne», victime de tous les outrages, et au secours de laquelle l’UDC prétend pourtant voler.

Mais tant pis pour le désastre. Les barons de l’UDC sont de toutes façons presque tous riches, alors vous pensez bien si les conséquences de leur incurie ne les chatouillent pas plus que cela. Le plus important, c’est qu’Amaudruz et consort fassent leur show, et la base du parti pourra toujours croire que si les primes des assurances sont élevées, ce n’est pas en raison des décisions iniques de la bourgeoisie suisse, mais à cause des immigrés, des pauvres, des Noirs et des Arabes. Comme l’écrivait René Char, «il existe une sorte d'homme toujours en avance sur ses excréments».

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