Cibler les hôpitaux est à la mode. 30%, c’est le pourcentage du budget que pourraient perdre certains établissements de santé vaudois. Dans le viseur du gouvernement: les sites soutenus par le canton, bien entendu, mais plus spécifiquement les Établissements hospitaliers du Nord vaudois et du Pays d’Enhaut, là où le revenu par famille est le plus faible, manière pour ce gouvernement dominé par le PLR d’affirmer que les pauvres coûtent trop cher.
On sait tout ce que l’on reproche aux pauvres en matière de santé, ils sont trop gros, ils mangent gras, ils boivent des sodas, ils ne connaissent pas l’existence du lait d’avoine et leur pyramide alimentaire est retournée sur la pointe. Ils fument dès le réveil, sous la douche, dans la bagnole, au travail, au parc, à la piscine, dans le lit le soir et leurs poumons sont noirs comme des oranges (ils n’ont même pas lu Éluard!).
Et, naturellement, ils engorgent les urgences. C’est leur marotte, leur passion, leur vice. Ils adorent s’y promener le matin, le soir, la nuit même, ce sont des attroupements – et pour un rien, car la douleur du pauvre est toujours parente du théâtre, c’est sa littérature à lui.
Les pauvres s'enrhument, rotent et crachotent
Ce immodéré goût pour la cigarette, la charcuterie et les urgences a un coût, vous pensez bien! Et si les comptes du canton ne sont pas au beau fixe, ce n’est certainement pas à cause des tripotages fiscaux de madame Dittli, ni en raison d’une conjoncture internationale défavorable, notamment en ce qui concerne le prix de l’énergie, mais c’est parce que les pauvres s’enrhument, rotent et crachotent.
Pourtant, les chiffres sont têtus, et toutes les études montrent que les riches coûtent plus chers, qu’ils consomment plus de soin, notamment préventifs, ou spécialisés... Mais qu’importe les chiffres, le gouvernement vaudois, de droite, aime autant niquer les pauvres qu’il déteste compter!
L'administration à bout de souffle
Et puis, est-ce que les victimes de ces coupes ne l’ont pas un peu cherché? À se reproduire en dépit du bon sens, à vieillir dans des appartements humides, à accumuler des maladies chroniques, à mendier des certificats médicaux pour échapper à la chaîne, au chantier, au guichet. Cette obstination maladive à vouloir vivre fatigue l’administration. Elle coûte.
Mais, grâce à ces coupes, nos chiffres redeviendront noirs, comme leurs poumons. Et, qui sait, peut-être les pauvres d’Yverdon et de Château-d’Oex se corrigeront de leur vice, et que leurs corps apprendront la vertu du silence.