Un des deux policiers accusés de viol par une femme dans une geôle du tribunal de Bobigny a été mis en examen et placé en détention provisoire samedi pour viol aggravé, ont annoncé ses avocats, une affaire qui a suscité une vive condamnation du ministre de l'Intérieur. Aucune information n'a encore pu être obtenue concernant le second policier.
Le premier, âgé de 35 ans, a été mis en examen pour viol aggravé par personne ayant abusé de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, a indiqué son avocat Xavier Nogueras à des journalistes. Conformément aux réquisitions du parquet, il a été placé en détention provisoire, a affirmé son autre avocate, Léa Canches, après son passage devant un juge des libertés et de la détention en fin d'après-midi.
Un acte «consenti»?
Les deux policiers ont reconnu avoir eu des relations sexuelles avec cette femme, tout en affirmant qu'elles étaient consenties, avait expliqué vendredi à l'AFP une source proche du dossier. Une source proche a précisé que la jeune femme est âgée de 26 ans et que le deuxième policier a 23 ans.
Me Nogueras a fait état lui aussi d'une «relation consentie». Selon l'avocat, le policier qu'il défend «a huit ans d'expérience», «est aguerri, expérimenté, passionné par son métier», et «se retrouve en face de quelqu'un qui porte des accusations, alors qu'elle-même est particulièrement habituée aux locaux de garde à vue, de ses propres aveux».
Après avoir «vu trois magistrats, puisqu'elle a été condamnée à une peine de 18 mois d'emprisonnement», cette femme «va très opportunément déclarer que l'acte, qui est reconnu par ailleurs par mon client comme étant un acte parfaitement consenti, aurait été commis sous la contrainte, sous prétexte que celui-ci est en uniforme», a déclaré l'avocat.
Fuites dans la presse
«Il y a un volet évidemment disciplinaire, il y a un volet moral, mais on n'est pas ici pour faire ni de la morale ni de la déontologie des policiers: on est sur un volet pénal et le seul port d'un uniforme ne nous permet pas d'affirmer que celui-ci exerçait une quelconque contrainte sur une personne qu'il dit être seule à l'initiative de ce qu'il s'est passé», a encore affirmé le conseil.
«C'est très consternant pour nous de constater qu'un dossier a autant fuité dans la presse», avant même que «nous puissions y avoir accès», a par ailleurs affirmé Me Nogueras. «Ce qu'on souhaiterait, c'est que le secret soit respecté le plus longtemps possible pour permettre à ce policier (...) de pouvoir parler librement et que ce ne soit pas sous pression», a encore dit cet avocat.
La jeune femme était, au moment des faits qu'elle dénonce, «déférée au parquet de Bobigny pour des faits de soustraction par un parent à ses obligations légales compromettant la santé, la sécurité, la moralité ou l'éducation de son enfant», avait indiqué le procureur Éric Mathais dans un communiqué.
Mercredi en fin d'après-midi, elle «a révélé avoir fait l'objet de deux viols durant la nuit du 28 au 29 octobre par deux fonctionnaires», avait-il expliqué, en précisant que les policiers avaient été placés en garde à vue jeudi matin. Le tribunal de Bobigny, géographiquement compétent, s'est depuis dessaisi au profit du parquet de Paris.
«Fermeté totale»
«S'ils sont avérés, ces agissements sont extraordinairement graves et inacceptables», avait réagi jeudi le ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez dans une déclaration à l'AFP, en expliquant que les deux agents avaient «été immédiatement suspendus».
L'Inspection générale de la police nationale a été saisie de l'enquête. Si celle-ci «conclut que des faits criminels ont été commis, et que l'honneur des policiers a été sali, il va de soi que des sanctions seront prises», a ajouté Laurent Nuñez, assurant que sa «fermeté sera totale».
Le dépôt de Bobigny est l'antichambre d'un des tribunaux les plus importants de France, le deuxième après Paris. Situé au sous-sol du palais de justice, il est réputé pour être perclus de problèmes mais doit bénéficier des prochains travaux d'extension du tribunal, qui prévoit l'aménagement d'un nouveau dépôt.