Conséquence du shutdown
Sans indicateurs comme boussole, la Fed devrait poursuivre sa baisse des taux

La Réserve fédérale américaine fait face à des défis majeurs: manque de données économiques fiables, inflation persistante et signes de ralentissement du marché du travail. Une baisse des taux de 0,25 point est largement anticipée par les marchés.
Publié: 26.10.2025 à 17:47 heures
Partager
Écouter
La Réserve fédérale américaine (Fed) devrait abaisser mercredi ses taux pour la seconde fois cette année.
Photo: Getty Images
Post carré.png
AFP Agence France-Presse

Malgré l'absence de publication d'indicateurs économiques à cause de la paralysie budgétaire depuis début octobre aux États-Unis, la Réserve fédérale américaine (Fed) devrait abaisser mercredi ses taux pour la seconde fois cette année, alors que l'inflation persiste. Le «shutdown», qui semble loin de trouver une issue, a bloqué la publication de la plupart des données, chômage et indice d'inflation PCE - celui privilégié par la Fed pour sa politique monétaire - en tête.

Vendredi, le département américain du Travail a publié l'indice d'inflation CPI, une obligation dans la mesure où celui-ci sert pour l'indexation des pensions de retraite des Américains. Il a montré qu'en septembre, les prix à la consommation avaient continué d'augmenter de 3% sur un an. Sans données fiables, difficile pour la Fed de déterminer l'état réel de l'économie américaine, en particulier dans les caractéristiques liées à son double mandat: le plein emploi et une inflation de long terme limitée à 2% par an.

«Le fait que l'inflation reste au-dessus de la cible de la Fed ne devrait pas l'empêcher de réduire ses taux», ont estimé dans une note les économistes d'Oxford Economics, «car malgré l'absence de publication des indicateurs, elle estime toujours que le risque est plus élevé sur le front de l'emploi que de l'inflation».

Bessent «confiant»

Le marché du travail aux États-Unis a en effet montré des signes inquiétants de ralentissement, en particulier en termes d'embauches, et plusieurs analystes ont estimé que seule la baisse drastique des flux migratoires a permis d'éviter une hausse du chômage, à 4,3% en août, dernière donnée disponible. De fait, les marchés anticipent très largement une nouvelle baisse de 0,25 point des taux directeurs de la Réserve fédérale, qui viendraient s'établir alors dans une fourchette comprise entre 3,75% et 4%, selon l'outil de veille de CME, FedWatch.

Le ministre américain du Trésor Scott Bessent s'est dit «confiant» dimanche sur NBC sur le fait que le taux «d'inflation (allait) baisser dans les prochains mois», pour «retourner vers la cible de 2% de la Fed». Le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) «estime que sa politique reste restrictive et tente de trouver l'équilibre entre une inflation toujours forte et un marché de l'emploi faible», souligne Joseph Gagnon, chercheur pour l'institut PIIE.

Selon lui, «l'argument est que la persistance de l'inflation est seulement temporaire», du fait de l'effet des droits de douane qui est transitoire, les prix n'augmentant qu'une fois, «alors que la faiblesse du marché de l'emploi pourrait être persistante». Bessent a rejeté dimanche tout impact des droits de douane, affirmant que le prix des «marchandises importées a été en fait assez stable ou a baissé». Selon lui, un facteur d'inflation est la hausse des marchés financiers qui entraîne des commissions de gestion supérieures.

Défis à venir

Mais difficile d'envisager plus pour la suite, alors que la première économie mondiale avancera à l'aveugle concernant ses propres performances si la paralysie budgétaire persiste. «Il faudra se concentrer sur le moindre indice de la part du président de la Fed Jerome Powell à propos de la tendance à venir pour les futures baisses. Si l'inflation se maintient proche de 3% on peut envisager une pause lors de la réunion suivante», fixée début décembre, préviennent les économistes d'Oxford Economics.

Mais chômage et inflation pourraient ne pas être les seules difficultés auxquelles la Fed risque d'être confrontée, souligne la cheffe économiste de KPMG, Diane Swonk, interrogée par l'AFP. «La Fed doit également gérer la question des liquidités sur les marchés financiers, alors qu'elle essaye de gérer son bilan qui s'est largement élargi», rappelle Mme Swonk. Théoriquement, en cas de risque de ralentissement de l'économie, une banque centrale peut, outre abaisser ses taux, lancer un assouplissement monétaire, dit quantitatif, qui consiste notamment en l'achat d'actifs sur les marchés pour injecter des liquidités.

Après avoir réalisé des assouplissements en 2008 et pendant la pandémie de Covid-19, la Fed a entamé une phase de resserrement monétaire, en retirant des liquidités avec la remise sur le marché d'une partie des actifs achetés. Lors d'un événement mi-octobre, Jerome Powell avait cependant laissé entendre que ce resserrement pourrait être mis en pause. Diane Swonk voit même la Fed «s'assouplir plus fortement» l'année prochaine, «avec des taux qui pourraient aller en-dessous de ce qu'elle estime être le taux neutre». Le taux neutre est celui qui n'a pas d'effet sur l'économie, ni en soutien ni en ralentissement.

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la
Articles les plus lus
    Articles les plus lus