Interview de Jean-Philippe Rochat
«Des JO en Valais en 2030? Ce projet est amateur et mal préparé»

Un comité travaille sur une potentielle candidature valaisanne pour l'organisation des Jeux olympiques d'hiver 2030 avec la France et l'Italie. Jean-Philippe Rochat, ancien président de Sion 2026, ne donne pas cher de ce dossier mais reste convaincu du potentiel suisse.
Publié: 06.01.2023 à 13:38 heures
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Dernière mise à jour: 07.01.2023 à 15:24 heures
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Le «non» des Valaisans dans les urnes avait enterré la candidature suisse pour les JO 2026.
Photo: Keystone/Archive
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Ugo CurtyJournaliste Blick

Le frisson olympique parcourt une nouvelle fois le Valais, quatre ans après la mort de la candidature de Sion pour les JO d’hiver 2026. Comme l’a révélé «Le Temps» mercredi, un mystérieux comité ravive la flamme dans l’ombre. Leur idée? Organiser des Jeux sur trois pays en 2030, en collaboration avec Chamonix et le nord de l’Italie.

Un projet qui n’est pas encore officiellement né, mais dont la survie est d’ores et déjà menacée. D’abord par le Comité olympique suisse, qui a été catégorique dans les colonnes du quotidien romand. «Nous estimons qu’il n’est pas réaliste de le faire pour des JO qui auront lieu dans un peu plus de sept ans», a balayé un porte-parole. Problème, seul Swiss Olympic a la possibilité de déposer un dossier auprès du CIO.

Jean-Philippe Rochat, au côté du président de Swiss Olympic Jürg Stahl en 2017, a longtemps porté la candidature Sion 2026.
Photo: Keystone/Archive

Contacté par Blick, Jean-Philippe Rochat a réagi à cette nouvelle initiative. L’ancien président de la candidature Sion 2026 n’est pas tendre avec ces initiants inconnus. L’avocat du sport vaudois en reste persuadé: «La Suisse a tout pour organiser des JO dans le pays.»

Jean-Philippe Rochat, quelle a été votre réaction en découvrant ce projet transfrontalier dans «Le Temps»?
J’ai été avant tout surpris. Même si le CIO n’attribuera ces Jeux 2030 que dans deux ans, cela reste très court pour monter un dossier de candidature solide. Je ne connais pas les initiants, mais je doute du sérieux de leur démarche.

Pourquoi?
D’abord, le fait que Swiss Olympic oppose un «non» catégorique me paraît rédhibitoire. Même les autorités valaisannes ne sont pas emballées (ndlr: le Conseiller d’État Frédéric Favre a affirmé au «Nouvelliste» jeudi que le Canton du Valais ne porterait pas une telle candidature). Ensuite, il faudrait faire changer la charte olympique pour organiser des Jeux sur trois pays. Le texte actuel permet, avec quelques interprétations, d’organiser une ou plusieurs épreuves à l’étranger. Mais une organisation conjointe et internationale, c’est du jamais-vu. L’idée n’est pas sotte, mais me paraît peu réaliste. J’ai l’impression que nous sommes face à une impréparation majeure.

Organiser des Jeux d’hiver en Suisse, c’est encore possible à l’avenir?
Je reste convaincu que la Suisse peut et devrait organiser des Jeux olympiques de manière durable. C’est dommage parce que 2030 était justement une bonne fenêtre. Les JO d’hiver resteront certainement en Europe, après deux éditions en Asie. Les États-Unis ont déjà les JO d’été de 2028 en été avec Los Angeles.

Les JO sont encore associés à une image de gigantisme. Ne sont-ils pas trop grands pour un petit pays comme la Suisse?
Non, d’ici à 2030, la Suisse organise des Championnats du monde dans de nombreuses disciplines reines des sports d’hiver. Il y a les Mondiaux de ski à Crans-Montana en 2025, le biathlon à Lenzerheide la même année, le hockey sur glace en 2026 à Fribourg et Zurich. Ne pourrait-on pas s’appuyer sur ces grandes compétitions? On a tout pour bien faire et je suis convaincu que les athlètes suisses seraient enchantés.

La population n’a pas partagé le même enthousiasme en votation. Les Valaisans avaient enterré Sion 2026 dans les urnes en 2018.
La population suisse reste passionnée de sport. Des erreurs de communication ont été commises. Nous pouvons certainement monter un dossier plus intelligemment, en dépensant moins, pour convaincre les gens. La viabilité et la durabilité doivent être au centre pour rassurer.

Justement, le manque de neige est alarmant cet hiver dans nos stations. Est-ce que c’est encore crédible de réfléchir à des Jeux olympiques d’hiver dans sept, onze ou quinze ans?
La question se pose, c’est vrai. Si un tel hiver devait se répéter avec des étés aussi chauds, la neige reculerait encore. Le réchauffement climatique est une réalité indéniable, qui m’attriste. Cela dit, il y a 2,5 mètres de neige à l’heure actuelle dans certains endroits des États-Unis. Durant leur préparation estivale, les skieurs suisses n’ont jamais eu autant de neige durant leur camp en Argentine. Je trouve trop défaitiste de renoncer complètement à l’idée des Jeux, de tirer la prise et de dire que c’est la fin des sports d’hiver.

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