C’est la scène qui a tout changé, qui a fait basculer le destin européen de Servette cette saison. On joue la 43e minute du match entre les Genevois et Molde jeudi soir. Battus 3-0 à l’aller en Norvège, les Grenat ont besoin d’un miracle chez eux pour passer ce deuxième tour des qualifications de la Conference League.
Les Servettiens sont en feu dans cette première mi-temps, à l’image du duo Diallo-Stevanovic sur l’aile droite. Le premier nommé a ouvert le score sur un tir dévié (18e). Le SFC est en route vers l’exploit.
«Oh non, c’est rouge!»
Puis survient cette maudite 43e minute. Miroslav Stevanovic reçoit le ballon pour partir en contre-attaque. Il rate son contrôle et se jette pour récupérer le cuir. Son geste n’est pas contrôlé. Il fauche Fredrik Aursnes qui s’écroule de douleur.
En direct sur la RTS, Philippe von Burg s’énerve lorsque l’arbitre néerlandais Jochem Kamphuis s’apprête à sortir un carton. «C’est très sévère de mettre un jaune là-dessus», regrette le commentateur. Puis c’est la stupeur: «Oh non, c’est rouge!»
Dans les tribunes, les près de 4000 spectateurs présents hurlent leur incompréhension. Sur les réseaux sociaux, les supporters grenat s’étranglent, crient à l’injustice. Le débat fait aussi rage en tribune de presse. À la pause, certains journalistes échangent avec des représentants de l’arbitrage suisses et européens. Les dirigeants donnent raison à leur confrère sur le terrain, malgré des discussions animées.
Dura lex, sed lex
Présent au stade, Christophe Girard a expliqué à Blick pourquoi Monsieur Kamphuis ne s’était pas trompé en sortant ce carton rouge. «L’expulsion est justifiée pour deux raisons: la jambe de Stevanovic est tendue au moment du contact et son pied touche son adversaire au-dessus de la cheville», justifie le chef de la commission des arbitres de l’ASF.
Le règlement a été donc respecté à la lettre. Mais qu’en est-il de l’esprit? «Micha» Stevanovic n’est pas un méchant. À aucun moment, il n’a cherché à faire mal à son adversaire. Enfin, c’était la première (et donc la dernière) faute du joueur bosnien dans un match très correct jusque-là.
«C’est une action qui est similaire à l’expulsion de Freuler à l’Euro, contextualise Christophe Girard. L’arbitre peut aussi se contenter d’un jaune sur le tacle de Stevanovic. Si on suit le règlement, ce rouge n’est pas faux mais sévère.»
Le «diktat de la FIFA»
Une sévérité qui n’a fait qu’attiser les regrets genevois. Comme le 2-0 de Grejohn Kyei tombé juste avant l’heure de jeu. Il ne manquait qu’un but aux Servettiens pour pousser un Molde exsangue et tétanisé en prolongations.
Même après le coup de sifflet final, Philippe von Burg n’avait pas digéré la scène fatidique. Le journaliste genevois de la RTS s’en fait l’écho sur Twitter. Il a regretté le «diktat d’interprétation de la FIFA», en invoquant «l’esprit du jeu».
Qui sait ce qui aurait pu se passer sans cette expulsion? Stevanovic a dû se poser la question quelques fois jeudi. Une bien triste soirée pour lui, d’autant qu’il était justement censé fêter son 31e anniversaire. «Micha» a mangé les bougies avec le gâteau.