Cela faisait longtemps qu’un choix de sélection d’un footballeur suisse n’avait pas provoqué autant de remous. Leon Avdullahu (21 ans), formé au FC Bâle et passé par toutes les équipes juniors de la Nati, a décidé de porter désormais les couleurs du Kosovo. Si tout se déroule comme prévu, il fera ses débuts justement contre la Suisse, lors du match de qualification pour la Coupe du monde au Parc Saint-Jacques (5 septembre).
«Nous sommes déçus qu’il ait choisi une autre voie», a déclaré Pierluigi Tami, directeur des équipes nationales, dans un communiqué. Le directeur des équipes nationales aurait pu éviter ce scénario, mais il n’a jamais cherché à établir un contact avec le jeune milieu de terrain. Lorsque la concurrence de la fédération kosovare est devenue évidente, le nouveau président de l’ASF Peter Knäbel et le sélectionneur Murat Yakin ont tenté de le convaincre. Une convocation lors d’un printemps riche en matches amicaux aurait peut-être changé la donne. Mais la Suisse ne l’a jamais appelé. La décision a été dure à prendre, et Avdullahu a finalement opté pour le Kosovo. Lundi soir, il a informé les deux fédérations, quelques semaines après avoir rejoint Hoffenheim.
«Une portée non seulement sportive, mais aussi sociale»
Les réactions, nombreuses, sont teintées d’émotion. «Dans le contexte suisse, cette décision peut susciter une déception compréhensible», explique mardi son conseiller, Sascha Fischer. «Le choix de Leon est réfléchi et personnel. Ce n’est pas un rejet de la Suisse, mais un engagement envers le Kosovo.» Il souligne que son protégé reste reconnaissant et attaché à la Suisse: «Mais il porte aussi l’histoire et l’identité de sa famille».
Avdullahu est séduit par la perspective de jouer un rôle central dans le développement du football kosovar, en devenant une figure de référence d’un jeune pays en pleine construction. Un avenir bien différent que celui de n’être qu’un joueur parmi d’autres dans le dense milieu de terrain suisse. «C’est une étape qui n’a pas seulement une dimension sportive, mais aussi sociale», insiste son conseiller. Dans le football, les choix de carrière sont souvent perçus comme opportunistes ou dictés par l’argent. «Ici, c’est autre chose», affirme-t-il.
Shaqiri: «Nous en avons souvent parlé»
Au Kosovo, cette décision est accueillie avec enthousiasme. «Leon a prouvé que le Kosovo restait un choix de cœur et que son identité et ses origines ne sont pas reniées», a déclaré sur Instagram le président de la fédération, Agim Ademi, peu avant minuit lundi. Parmi les premiers soutiens figure Xherdan Shaqiri, qui connaît mieux que quiconque la réalité des binationaux. Lui et Avdullahu ont d’ailleurs évolué ensemble une saison au FC Bâle.
«Nous en avons souvent parlé», confie Shaqiri mardi à Blick. Mais il ne pense pas avoir pesé dans la balance: «Je crois qu’il a plus de chances de jouer au Kosovo qu’en Suisse. On a dû lui présenter de meilleures perspectives sportives, sinon il n’aurait pas franchi le pas». Tout en saluant l’engagement de Peter Knäbel, le joueur de 33 ans nuance: «Savoir si la fédération a tout fait correctement, c’est une autre question».