Les bâtiments sont à l’origine d’environ un quart des émissions de CO2 en Suisse. Si nous voulons les réduire, les propriétaires de biens immobiliers devront, dans les années à venir, remplacer leurs chauffages au mazout et au gaz par des solutions plus durables comme les chauffages à distance ou les pompes à chaleur. Cela ne vaut bien sûr pas que pour les immeubles d’habitation, mais aussi pour les immeubles de bureaux, les centres commerciaux… et les hautes écoles.
Un projet novateur est actuellement en cours de réalisation sur le campus des deux établissements de recherche Eawag et Empa à Dübendorf (ZH). Un nouveau complexe de bâtiments y est construit, qui sera chauffé ou refroidi, selon la saison, par des sondes géothermiques à haute température. Ces dernières s’enfoncent jusqu’à 100 mètres de profondeur. En été, la chaleur des bâtiments est transférée en profondeur et y est stockée. En hiver, la chaleur est à nouveau extraite du sol, permettant ainsi de chauffer l’immeuble.
L’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) exploite un système similaire depuis plusieurs années déjà sur son campus Hönggerberg. La chaleur des serveurs et des appareils de laboratoire y est stockée jusqu’à 200 mètres de profondeur à l’aide de sondes géothermiques, puis utilisée pour le chauffage en hiver. Dans les années à venir, les scientifiques pourront étudier les possibilités d’amélioration de ces systèmes dans leur propre environnement de travail. La recherche ne se fera donc pas seulement dans le bâtiment, mais aussi sur le bâtiment ou, mieux encore, avec le bâtiment!
À l’EPFL, l’eau refroidissant les serveurs sert à chauffer le campus
Un autre exemple est le centre de calcul de l’EPFL. Si vous possédez un ordinateur portable, vous savez certainement combien ils peuvent devenir chauds. Une salle entière remplie de serveurs génère une quantité incroyable de chaleur qui doit être évacuée. A l’EPFL, ces serveurs sont désormais refroidis par de l’eau qui passe par les portes des armoires des gros ordinateurs. Cette eau chaude est ensuite utilisée pour chauffer le reste du campus.
Ce grand et très complexe système est complété par des installations photovoltaïques sur le toit et les façades, ainsi que par des pompes à chaleur. Une petite installation de biogaz pourrait également être mise en place prochainement. Celle-ci n’est toutefois pas destinée en premier lieu à servir de source d’énergie, mais de laboratoire d’apprentissage permettant avant tout aux étudiantes et étudiants de faire des expériences pratiques. Les déchets de la cantine pourront être également valorisés par le biais de cette installation.
L’IA au service de la durabilité
Outre ces grands projets, des interventions plus modestes peuvent aussi avoir un impact important. Dans une unité d’habitation du bâtiment expérimental NEST à Dübendorf, des scientifiques ont installé une commande intelligente de chauffage et de refroidissement. Grâce à l’intelligence artificielle (IA), le système a pu apprendre comment un appartement réagit aux variations externes de la météo et de la température. Alimenté par les prévisions météorologiques de MétéoSuisse, il peut même chauffer et refroidir de manière anticipée, offrant au passage 25% d’économie d’énergie et améliorant le confort, car la température ambiante à l’intérieur reste plus stable.
Il n’est pas possible d’atteindre le zéro émission nette d’un seul coup. Cela nécessitera de nombreux petits pas de la part des décideurs, mais aussi de nous toutes et tous. Des innovations intelligentes peuvent contribuer à rendre ces étapes plus simples et plus rapides. Je suis persuadé que la Suisse, pays de l’innovation, relèvera ce défi.