C’est ce qu’on appelle un marronnier. Comme la neige en hiver ou les fleurs au printemps. L’événement dont on vous parle, lui, se produit à la fin de l’été avec une régularité métronomique depuis des décennies: les fonctionnaires genevois font la grève.
Et que revendiquent ces hommes et ces femmes qui défilent avec sifflets et calicots sous les fenêtres de la rue de l’Hôtel-de-Ville, cœur du pouvoir dans la cité de Calvin? Qu’on ne touche pas un cheveu, un seul, de leurs acquis. Qu’ils soient épargnés, comme par miracle, par les difficultés budgétaires de cette ville qui a accumulé des dettes pour la somme coquette de 1,8 milliard de francs.
Dans l’ancien monde, celui d’avant Covid, les revendications des fonctionnaires avaient déjà tendance à en agacer plus d’un. Il faut dire que celles et ceux que l’administration municipale genevoise emploie ont, à juste titre, la réputation d’être «cocolés» comme dans presque aucune autre administration romande.
L'agacement se transforme en exaspération
Parlons bien, parlons chiffres. Le plus haut salaire s’élève à 20’000 francs par mois. Il correspond à un poste de secrétaire général dans un département. Le plus petit salaire, lui, s’élève à 4’500 francs par mois. Ce traitement concerne par exemple un ou une réceptionniste sortie d’apprentissage.
Dans le nouveau monde, avec son cortège de faillites et de souffrances, dans lequel les RHT sont devenues la norme, l’agacement se transforme en exaspération. Comment, en effet, supporter stoïquement de voir défiler des employés de la Ville dont les salaires étaient assurés à chaque fin de mois au plus fort de la crise sanitaire, malgré un clair ralentissement de leur activité professionnelle, comme ce fut notamment le cas dans les secteurs de la petite enfance ou encore de la culture.
Sous les yeux des indépendants et des restaurateurs
Il est aujourd’hui proposé que les progressions salariales soient gelées. Au revoir la prime d’ancienneté ou l’entrée en fonction à un tarif confortable. Bonjour le régime minceur! Les fonctionnaires ne le voient pas de ces yeux-là et défilent inlassablement, comme s’ils étaient épargnés par la marche du monde. On leur demande un effort mais ils s’en moquent. Les finances de l’Etat ont certainement peu d’importance à leurs yeux.
Dans la Cité de Calvin, tous les moyens sont manifestement bons pour garder ses privilèges et faire fi de la solidarité. Et cela en manifestant sous les yeux d’indépendants, de restaurateurs ou de commerçants qui peinent à joindre les deux bouts. La Ville de Genève a longtemps eu pour slogan la solidarité. Les syndicats, jadis de gauche, se font ici les défenseurs de celles et ceux qui sont en passe de devenir la nouvelle élite économique.